Walter de La Mare

Bien avant Tolkien et ses Hobbits, un autre anglais avait imaginé un voyage en des contrées lointaines et étrangères pour un héros frêle mais courageux détenteur d’un objet magique qu’il ne devait jamais lâché.

En 1910, le Britannique Walter de la Mare publie son second roman : Les Trois Malla-Moulgars. Cet ouvrage pour le moins atypique appartient à un genre très particulier, celui de la fantasy animalière.

En effet, la quasi-totalité de ses personnages sont en réalité des singes, appelés « moulgars », et son action se déroule dans une Afrique fantasmée saisi les neiges du « Ouitzaouilwullah » (ou Blanc Hiver).

Admiré par Richard Adams (Watership Down) et Robert Silverberg (L’Oreille Interne) qui signe d’ailleurs la préface de la présente édition, Les Trois Malla-Moulgars trouve pour la première fois son chemin dans l’Hexagone grâce au travail des éditions Callidor et à la traduction de Maxime Le Dain. Ajoute-y les illustrations patrimoniales de Dorothy P. Lathrop, J.R Monsell et J.A Shepherd avec une nouvelle fournée signée par la brillante Anouck Faure…et voici que nous pénétrons dans la forêt de Munza-moulgar avec une vieille guenon grisonnante et ses trois enfants : Pouss, Coudd et Nod…



Dans cette forêt si immense qu’elle semble recouvrir le monde, les différentes espèces de moulgars cohabitent entre elles mais également avec d’autres animaux plus dangereux tels que les « Boutons-de-Rose » ou les « Minimuls ». Bien à l’abri dans une cabane décrépite d’un Portingais trépassé et dont il ne reste plus que le squelette blanchi, Matta-mattouta, une vieille guenon, et son compagnon, Souilem, s’occupe de leurs trois enfants : Pouss, Coudd et Nod.

Trois « Malla-moulgars » en réalité, c’est-à-dire trois moulgars de sang royal puisque leur père, Souilem, est le frère d’Assasimmon, le prince des vallées de Tishnar, le royaume par-delà les lointains monts Arrakkaboa.

Un jour, lassé d’être si loin de chez lui, Souilem décide de repartir et laisse Matta-mattouta et ses fils derrière lui. Accablés par le froid et la faim, les trois frères décident de partir à la suite de leur père, à la recherche du royaume d’Assasimmon et de ses merveilles. Bravant l’Hiver Blanc qui s’abat sur la munza et ses habitants, les Malla-Moulgars devront autant compter sur leur courage que sur la magie de Nod, le plus petit d’entre eux mais aussi le plus extraordinaire.

Et ainsi, chemin faisant, le lecteur va découvrir une Afrique qu’il n’a jamais imaginé. Une Afrique couverte de neige et de glace, où les légendes vivent et meurent, où la magie s’invite doucement dans l’aventure et où les différentes espèces animales se réinventent le temps d’un récit qui ne cesse d’émerveiller et d’étonner.



Pensé comme un récit d’aventures, Les Trois Malla-Moulgars n’est pas tant porté sur la morale que sur le plaisir constant de la découverte.

On y découvre des espèces à la fois fabuleuses et familières, revues et corrigées par l’auteur dans un subtil mélange d’érudition et d’imagination qui les rend fascinant au premier contact.

Le personnage principal, le petit Nod, est à la fois candide et entêté, prêt à tout pour suivre et aider ses frères. C’est sa naïveté d’ailleurs qui causera souvent bien des soucis à ses ainés, allant jusqu’à le faire se capturer par le seul humain du récit, un certain Andy Battle, marin britannique de son état qui rêve de revoir Plymouth.

Et pourtant, malgré les différences qui existent entre les moulgars et les hommes, Nod sympathise et s’attache à Andy. Car si le livre renferme de nombreuses créatures effrayantes et parfois carrément hostiles, Walter de la Mare affectionne la compréhension et l’entraide entre les espèces, tentant de percer les pelages pour mieux saisir les sentiments des personnages. Page après page, le lecteur s’attache à Nod, à sa fragilité et à ses espoirs un peu fous. Il devient un héros de petite taille face à un monde de démesure où les obstacles naturels s’accumulent à perte de vue.

Walter de la Mare fait preuve d’une imagination débordante, livrant un récit pour la jeunesse qui force le respect dans le soin apporté à la langue, qu’elle soit réelle ou imaginaire. On est saisi par le travail minutieux sur les mots et les expressions employés par les moulgars, ajoutant une profondeur inattendue à ce périple déjà merveilleux. Pour peu qu’on se laisse porter par la langue, les termes les plus extravagants finissent par faire sens, se transformant en zèbres ou en crocodiles, en divinités ou en concepts philosophiques.



Et puis surtout, on est étonné par l’intemporalité de ce récit qui date de plus de 100 ans maintenant. Complètement dépaysant, jouant jusqu’au bout la carte de la magie et de la fantasy, alignant les moments de bravoures et osant même parfois la poésie et le chant, Les Trois Malla-Moulgars est une expérience littéraire complète à peine entachée par une fin abrupte qui reflète le sort cruel de cette œuvre qui, en son temps, n’a pas eu le succès nécessaire à une suite qu’on aurait aimé connaître.

En l’état, rassurez-vous, Nod et ses compagnons terminent bel et bien leur histoire, mais l’on devine jusque que le conteur avait bien d’autres choses à dire sur la munza et ses peuples.

On ne pourra s’empêcher d’ailleurs de saluer le travail d’archéologue des éditions Callidor qui, non contentes de nous offrir ce texte fondateur de la fantasy moderne, nous offrent une édition d’une beauté renversante, richement illustrée notamment par une Anouck Faure au sommet de son art. Rares sont les livres de cet acabit, qui comprennent qu’une grande histoire mérite un écrin à sa mesure.

Voilà qui justifie encore davantage de se procurer cet ouvrage qui a tout de l’évènement pour les amateurs de genre mais aussi pour ceux qui aiment les classiques littéraires injustement oubliés par l’Histoire.



Ouvrage sublime, sur la forme comme sur le fond, récit d’aventures dépaysant et attachant en diable, Les Trois Malla-Moulgars mérite amplement la qualification de classique et de chef d’œuvre.

Walter de la Mare pose une pierre fondatrice de la fantasy et il serait dommage pour vous de ne pas en profiter enfin, surtout dans un tel écrin.
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Le personnage principal de ce livre, Arthur Lawford, sortant d'une maladie fait une promenade qui le mène dans un cimetière. Il s'endort près de la tombe d'un Français suicidé. Rentré chez lui, il constate que son visage est devenu celui d'un inconnu.



Malgré le résumé que je viens de faire, il n'y a que très peu de surnaturel visible dans ce roman. Même le changement de visage du héros principal est remis en question. L'épisode sert en quelque sorte de révélateur à Arthur pour faire une sorte de bilan de sa vie, et de constater l'insatisfaction générale de lui même et de l'existence qu'il mène, et tout particulièrement de ses relations avec sa femme, qui ne sont pas réellement cordiales.



Ce n'est pas intéressant, mais j'ai trouvé tout cela relativement ésotérique, en partie sans doute à cause de l'écriture. Une histoire de fantôme qui n'en ait pas vraiment une, la lassitude du personnage principal, constitue une trame un peu évanescente, sans doute un peu longue pour un roman. Il y a par moment un sentiment d'étrangeté, troublant, mais cela ne tient pas complètement la durée pour moi, à certains moments cela m'a semblé terriblement artificiel.

Rien de sexuel dans cette orgie, ni aucun autre élément de débauche hédonistique. Il s'agit plutôt d'une orgie de consommation perpétrée par quelque jeune homme en mal de grandeur. Malgré l'humour et le raffinement de la langue, cette histoire n'a pas surpassé chez moi le seuil de l'indifférence. Par ailleurs, ce n'était pas précisément ce que je venais chercher chez Walter de la Mare. Les détails bibliographiques m'ont appris qu'il s'agit d'une traduction tardive d'une nouvelle encore inédite en français ; aussi, je ne désespère pas de trouver chaussure à mon pied.

Un homme s'endort sur la tombe où gît, depuis deux siècles, un suicidé. Et voici que l'âme du suicidé s'empare du dormeur. Possession et dédoublement. Il restera au héros hanté à livrer un terrible combat entre ce "Horla" du passé pour reconquérir sa propre personnalité. Un fantastique feutré, en lisière, comme s'il évoluait sur un lit entre réalité et surnaturel. C'est original et captivant.

Voilà un livre qui m'attendait sur mes étagères depuis un certain nombre d'années. Acheté au hasard à la librairie Galerie de la Sorbonne à Paris (qu'est-ce que j'ai pu faire comme belles découvertes chez eux...), je me suis décidée à le lire il y a quelques semaines parce que je suis (toujours) dans ma période Jane Eyre.



Je ne sais pas grand-chose de cet écrivain anglais si ce n'est qu'il écrivit des oeuvres pour les enfants, des poèmes, des nouvelles et romans teintés de fantastique. Ce roman est apparemment épuisé en Français (non, sans blague ?), il faut donc se rabattre sur la version originale.



Ce jeune homme qui décide de partir avec sa jument au tout début de ce roman est un grand lecteur. Son voyage débute instantanément dans des contrées mystérieuses où il croise des personnages de livres.



Walter de La Mare a choisi de faire quelques haltes chez Shakespeare, Wordsworth, Keats, Chaucer, Charlotte Bronte, Herrick, Jonathan Swift, Edgar Allan Poe et Shelley. J'ai découvert pour ma part Lucy Gray, tragique héroïne d'un poème de Wordsworth, dont l'histoire m'était vaguement familière.



Je n'ai pas lu le texte original, juste des extraits, mais la traduction de Christiane Guillois est superbe, le texte est empreint de poésie, les descriptions sont magnifiques. C'est un périple mélancolique et nostalgique que le lecteur fera pour peu qu'il soit, comme l'écrivain, épris de littérature, et doté d'un tempérament de poète. Un peu de mystère, de fantaisie saupoudrent ce délicieux roman, inclassable, qui devrait plaire à ceux que leurs livres préférés habitent, encore et toujours. Loin d'être un livre-hommage à cette littérature, un peu aride ou impersonnel, Henry Brocken est une porte ouverte sur un monde que l'on crée en parallèle de nos vies, né de nos lectures, enrichi de nos songes et de nos désirs. Un livre qu'il serait impossible d'écrire et de publier aujourd'hui, raison de plus pour redécouvrir Walter de La Mare.
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Nous suivons donc les trois frères moulgars, principalement depuis le point de vue de Nod, qui je trouve s'inscrit dans la droite ligne du petit dernier des contes de fée sur qui tout repose, mais qui fait aussi plein de bêtises. Et c'est ainsi que les trois frères sont contraints d'entamer leur voyage en plein hiver alors qu'ils avaient prévu d'attendre le printemps : ça commence bien.



J'ai trouvé les personnages très bien fait, ainsi que leur relation.



Attention, deux illustrations dans le début du roman ont été inversées !

Il faut également souligner le nombre impressionnant d’illustrations tant historiques (de J. R. Monsell, J. A. Shepherd ou Dorothy P. Lathrop) qu’originales (d’A. Faure) qui viennent sublimer le texte et faire de l’objet-livre un recueil historique d’illustrations d’un même récit.
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Les Trois Malla-Moulgars est une fantasy animalière immanquable, qui gagne à être enfin reconnue comme telle, et le travail éditorial fantastique de Callidor confirme ce statut, alors foncez, et faite attention à l'Inappelée !
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