Les matinales invitées Yvonne Salamon et Frédérique Agnés sur RCJ
« Sur une couchette voisine de la mienne, git une toute jeune fille.
Elle s’appelle Anne Franck.
Elle me dit qu’elle a quinze ans, mais il est difficile de donner un âge, à Bergen Belsen.
Elle a l’air beaucoup plus jeune et beaucoup plus vieille.
Je pense à mes enfants qui se trouvent dans le midi de la France et qui, certainement, en ce moment mangent correctement.
Elle chante en néerlandais. Elle chante malgré cette maladie qui la terrasse. Elle est aussi atteinte du typhus.
Une grande pitié m’envahit pour cette enfant courageuse, qui me fait comprendre, un peu dans sa langue, un peu en français, qu’après la guerre elle ira visiter Paris.
Je l’encourage des mots qu’elle ne comprend pas.
Ses traits parlent pour elle : la mort approche. »
(p. 59 et 60)
"Je m'appelle Hélène Salamon.
Je suis juive. Née en Pologne en 1905. Arrivée en France en 1924. Mère de famille. Sage femme. Et à partir de 1943 résistante.
C'est ce qui me vaudra d'être arrêtée, emprisonnée, torturée puis finalement déportée dans le camp de concentration de Bergen Belsen, en Allemagne.
Un destin semblable à tant d'autres.
A un détail près : j'arrive dans le camp enceinte de quatre mois. Avec une obsession : mettre au monde mon enfant."
« J’ai la volonté farouche de te mettre au monde.
Car je veux que la vie triomphe dans cet univers de mort. Cela devient mon obsession. Et probablement ma planche de salut. Ce désir, cet espoir fou m’ont aidée à tenir, j’en suis certaine, grâce à toi ma fille, j’ai pu m’oublier.
Surmonter mes souffrances, mes moments de désespoir.
Il est parfois plus facile de sauver quelqu’un d’autre que soi-même.
J’ai agi comme ces mères qui, à côté de moi, se sacrifiaient pour leurs enfants, leur laissant leur ration quand la faim de leurs petits, n’était plus tolérable.
Combien sont mortes en sauvant ceux-ci ? »
(p. 51 et 52)
« On nous envoie bientôt à la douche collective. Elle dure des heures car l’eau n’arrive pas.
Nous sommes nus, femmes et enfants mélangés. Regard supérieur des soldats allemands qui nous observent.
Dans leurs yeux, dès ces premiers instants, je ne me sens plus un être humain, mais un animal. »
(p.47)
J'ai la volonté farouche de te mettre au monde. Car je veux que la vie triomphe dans cet univers de mort. Cela devient mon obsession." Un récit bouleversant et poignant, à lire absolument pour se souvenir et honorer la mémoire de celles et ceux qui ont vécu ces atrocités.
Dans ce livre, nous suivons le témoignage profondément bouleversant d’Hélène, résistante arrêtée, torturée et déportée dans un camp durant la seconde guerre mondiale ainsi que celui d’Yvonne sa fille née dans ce même camp.
Tout d’abord, j’ai trouvé ce livre très touchant. Le sort de ces femmes, ces héroïnes si fortes et courageuses ne nous laisse pas indifférents. Je les ai trouvé inspirantes, chacune à leur manière. Les événements sont parfois durs à lire, mais nécessaires pour comprendre ce que ces femmes ont enduré.
Ensuite, ce témoignage historique est très précieux pour la préservation de la Mémoire et des souvenirs de notre histoire. Nous sommes parfaitement bien immergés dans cette période troublée par l’horreur et par la guerre. C’est un bel hommage à deux femmes qui méritent que l’on connaisse leur histoire.
Enfin, j’ai adoré la plume de l’auteur. Elle fluide, sincère et réaliste. Toute son histoire et celle de sa mère sont parfaitement bien relatées. C’est un récit fort et puissant qui va à l’essentiel et qui nous transporte dans l’histoire.
C’est un livre profondément humain que je recommande à tous se procurer. Je remercie beaucoup les éditions Mon Poche pour l’envoi et leur confiance.
Transmettre aussi un peu de cette force de vie qui m'anime. Qui me fait penser que, si les hasards n'existent pas, la chance, si. A condition de savoir la saisir, ou plutôt la provoquer.