A propos de Soljenitsyne
Emission consacrée à
Alexandre SOLJENITSYNE à l'occasion de la publication de son dernier livre "Le Chêne et le veau".
Bernard PIVOT reçoit l'écrivain, qui est interrogé (en
russe, trad off) par
Jean d'ORMESSON,
Jean DANIEL,
Georges NIVAT et
Pierre DAIX.
Nikita STRUVE et
Gilles LAPOUGE participent également au débat. - En prégénérique,
Bernard PIVOT exprime son émotion de recevoir...
+ Lire la suite
Michel LERMONTOV
Non, ce n'est rien ! c'est dans la mousse
Le bruit d'une feuille qui pousse.
Le vent parfumé de la nuit.
Rempli d'une amère tristesse
Je me couche dans l'herbe épaisse
Et m'endors d'un sommeil profond.
Tout à coup, tremblant, je m'éveille :
Sa voix me parlait à l'oreille,
Sa bouche me baisait au front.
1840
( écrit en français )
DERNIER AMOUR
Théodore TIOUTCHEV
Oh, comme au déclin de nos années,
L'amour se fait plus tendre, plus angoissant...
Rayonne, rayonne, lumière crépusculaire,
Ultime passion, feux du couchant !
L'ombre recouvre la moitié du ciel,
Seule rôde une lueur à l'Occident,
Attarde-toi, attarde-toi, rayon du soir,
Perdure, perdure, enchantement !
Le sang se fige dans les artères,
Mais la tendresse en moi ne tarit pas...
O, toi, ô ma passion dernière,
Tu es félicité et désespoir !
Entre 1852 et 1854
Caroline PAVLOVA
Quand ta voix est si tendre,
Ton œil si plein d'espoir,
Et j'entends sans entendre,
Je regarde sans voir ;
Quand un soupir achève
Quelques mots dits tout bas, -
Oh ! Laisse que je rêve,
Ne t'en étonne pas.
Quand une étoile blanche
Luit au dessus de nous,
Quand, muette, je penche
Mon front sur tes genoux ;
Quand la tristesse effleure
Mon cœur entre tes bras, -
Oh ! Laisse que je pleure,
Ne m'interroge pas.
Que t'importe qu'une ombre
Passe devant mes yeux,
Qu'un instant tombe, sombre,
Dans mes instants joyeux ?
Mes bonheurs, mes souffrances,
M'inondant tour à tour,
Mes rêves, mes silences,
Mes pleurs ne sont qu'amour.
Avril 1837
( écrit en français )
Pouchkine...fut pour tous les poètes de son temps comme un feu descendu du ciel, auquel, comme des cierges, s'allumèrent les autres poètes originaux. Autour de lui se forma d'un coup toute une constellation.
GOGOL
Pour comprendre cette citation du poète Nicolas Nekrassov (1821-1877) il faut savoir qu'il date de 1855-1856, époque d'une autre guerre de conquête russe contre la Crimée. Les «élites» russes étaient alors divisées en deux courants, qui éclairent en grande partie les évènements d’aujourd’hui.
D’une part, les Occidentalistes touchés par l’esprit des Lumières, la démocratie parlementaire, les libertés individuelles qui gagnaient peu à peu tous les pays européens, la dignité humaine (et la nécessité d’abolir le servage), et qui souhaitaient bénéficier des progrès économiques de l’Europe.
Et d’autre part les Slavophiles, nationalistes qui considéraient d’une manière mythique que la Sainte Russie était un pays complètement différent de tous les autres pays, qui n’avait pas à copier les modèles occidentaux, mais à leur résister. Ce courant défendait l’autocratie, la suprématie du collectif sur l’individuel, et l’alliance du pouvoir avec la frange la plus conservatrice de l’Église orthodoxe. Le pouvoir aujourd’hui est l’héritier de ce courant de pensée qui reste ancré dans l'imaginaire collectif.
Voici donc un très beau poème de Nekrassov. Il parle d’une autre guerre, celle de la Russie de l’époque pour la conquête (déjà) de la Crimée, dont Tolstoy revint sain et sauf, mais pas le tsar Nicolas Ier, tué au siège de Sebastopol lors de cette défaite russe.
Lorsque j’entends parler des horreurs de la guerre,
À chaque annonce d’une victime nouvelle,
Je ne plains pas l’épouse, je ne plains pas l’ami,
Ni même le héros mort…
Hélas, demain, l’épouse saura se consoler,
L’ami ne saura plus le nom de son ami,
Mais il est quelque part une âme esseulée
Qui jusqu’à la tombe va ignorer l’oubli…
J’ai vu couler des larmes saintes et vraies :
C’étaient les pleurs des mères malheureuses
Qui n’oublieront jamais leurs enfants égorgés
Dans les sillons des champs ensanglantés,
Comme toi, ô saule, tu ne peux relever
Tes branches pleureuses.