Générations
Au générique, des
photos extraites de l'
album "L'Automne des étudiants". Sont invités pour cette émission des écrivains représentant diverses générations et donc témoins d'époques
historiques différentes.
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Alain BESANCON, Directeur d'Etudes en Sciences Sociales à l'Ecole des Hautes Etudes, né en 1932, évoque sa
jeunesse dans les années d'avant-guerre. Il explique comment le...
... la confusion demeure indéracinable entre la morale commune et la morale communiste, celle-ci se cachant derrière celle-là, la parasitant, la gangrenant, faisant d'elle l'instrument de sa contagion. Un exemple récent : dans les discussions qui ont suivi la parution du "Livre noir", un éditorialiste de l'Humanité a déclaré à la télévision que les 85 millions de morts ne ternissaient en rien l'idéal communiste. Ils n'en représentaient qu'une très regrettable déviation. Après Auschwitz, continua-t-il, on ne peut plus être nazi ; mais après les camps soviétiques, on peut rester communiste. Cet homme qui parlait en conscience ne se rendait nullement compte qu'il venait de formuler sa plus fatale condamnation. Il ne s'apercevait pas que l'idée communiste avait à ce point perverti le principe de réalité et le principe moral, qu'elle pouvait en effet survivre à 85 millions de cadavres, alors que l'idée nazie avait succombé sous les siens. Croyant parler en grand honnête homme, idéaliste et intransigeant, il avait prononcé une parole monstrueuse. Le communisme est plus pervers que le nazisme parce qu'il ne demande pas à l'homme de faire consciemment le pas moral du criminel et qu'il se sert de l'esprit de justice et de bonté pour répandre dans toute la terre le mal. Chaque expérience communiste est recommencée dans l'innocence.
p. 72
L'essayiste catholique, spécialiste de la Russie et lucide analyste de la modernité Alain Besançon, a publié la première édition de cet ouvrage en 1978, pour l'actualiser en 2002, après la chute du communisme. La première "tentation" catholique selon lui, est celle de l'opposition à la démocratie, incarnée de diverses manières depuis le XIX°s, dont la plus intéressante est la tentation idéologique marxiste, qui reprend d'anciennes tendances présentes dans le christianisme depuis l'origine. La seconde tentation est celle de la "démocratie", à savoir l'invasion d'idées politiquement correctes, sentimentales et "humanistes", ou plutôt humanitaires, qui détruisent entièrement toute perspective chrétienne de charité au profit de l'élan caritatif. Associée à cette tentation vient celle de l'islam, auto-annihilation du christianisme devant une tradition autre, conquérante et manipulatrice. Ce dernier chapitre, écrit en 1996, est resté d'une brûlante actualité, comme le second sur le sentiment caritatif.
Alain Besançon, non seulement nous aide à décrypter les discours médiatiques à l'oeuvre autour de nous, et destinés à nous soumettre et à nous faire avaler les pires sornettes, mais il nous donne aussi des éclairages théologiques simples, mais bien approfondis, mis à la portée du lecteur profane, qui font de ce livre un grand livre.
Un coup d'oeil sur le passé montre qu'une Eglise malade passe facilement à l'islam. On peut estimer que le succès de cette religion est venu essentiellement de la massive hémorragie des chrétiens séduits par la doctrine ou peu enclins, à cause de la faiblesse de leur foi, à résister à la technique efficace de conversion, à la pression fiscale, aux humiliations et à la misère du statut de dhimmi. Les tribus arabes n'étaient pas nombreuses, et malgré leur extraordinaire valeur militaire, leur domination eût été éphémère si la masse chrétienne ne s'était pas convertie rapidement. Quels chrétiens ? Les monophysites d'Egypte, les nestoriens de Syrie et de Perse, les donatistes d'Afrique, les ariens d'Espagne, les Eglises restées orthodoxes, mais travaillées par ces diverses hérésies, ou exaspérées par la politique de Byzance. Les derniers cathares de France et d'Italie, assurent certains historiens, réfugiés en Bosnie y sont devenus musulmans. A contrario, quand fut clos le grand cycle des hérésies trinitaires et christologiques, vers le IX°s, on vit des Eglises affermies dans la foi tenir bon sous la plus dure férule musulmane : ainsi dans les Balkans.
Le léninisme opère une cristallisation brutale et simplificatrice des thèmes et attitudes gnostiques qui hantaient la Russie et les refond en un système dont la structure ne nous est pas inconnue.
Le monde qui est homogène, composé de matière plus ou moins subtile, est le théâtre d’un conflit qui lui est immanent. Par ce conflit il se meut dans le temps vers la fin des temps. Le léniniste, comme le manichéen, confesse les deux principes et les trois temps.
Les deux principes : le léninisme est un dualisme. Ce qui anime la matière n’est pas un désordre, mais un couple de forces. Les contraires tendent toujours, chacun à son niveau dans le cosmos matériel, à se polariser. A l’étage social, la polarisation porte sur deux classes. Les autres classes tendent spontanément à s’agréger à l’un des deux camps antagonistes. Cette polarisation est bonne, car elle aggrave le conflit et le rapproche par conséquent de sa solution. L’ennemi principal, prioritaire, sera le libéral, le conciliateur, l’opportuniste qui maintient les choses dans l’état amorphe du mélange et empêche le mouvement. (p. 263)
Toujours l'église a subi le mimétisme des formes du pouvoir et il ne pouvait en être autrement. Impérialiste sous les empereurs romains, elle a été féodale au Moyen-Age et monarchiste sous l'ancien Régime. Aujourd'hui,il est naturel qu'elle prenne la forme démocratique des partis.
La représentation plastique des dieux dépend de la conception que s'en fait la cité. Cette théologie a été fixée par Homère et Hésiode, qui ont attribué aux dieux leurs caractéristiques, partagé entre eux les honneurs et les compétences, suggéré leur figure.
La généralisation de la soutane ,autrefois vêtement de choeur,est d'origine française etvsymbolise assez bien la volonté de ségrégation du prètre.