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Maigret et son mort

Il y a des Maigret plutôt "atmosphère", d'autres qui sont un peu plus dans l'action. Certains se rattachent aux milieux poussiéreux de la bourgeoisie, d'autres à la pègre, certains nous amènent dans des petites villes de province ou sur les bords de Marne, d'autres sont parisiens. Maigret et son mort nous font suivre une enquête lié au grand banditisme, au cœur de Paris. Ca tire sur les trottoirs et ca se bagarre.

Plus on lit Maigret, plus on s'étonne de se perpétuel renouvellement tout en retrouvant toujours le même personnage, avec une unité de traits et de style.

Un bon Maigret, assez animé; pas forcément très réaliste : et après?
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Maigret aux assises

Ce récit correspond plus à une nouvelle qu'à un roman.



L’intrigue, fort convenue, est sans surprise, mais sans redondance.



Le plaisir de lecture repose sur le propos, parfaitement calibré, qui nous livre un condensé d'atmosphère à la Maigret.



Du Simenon à l'os !


Lien : https://www.babelio.com/livr..
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Chez les flamands

Début des années 30’s, Givet, un gros bourg ardennais proche de la Belgique. De part et d’autre de la frontière, la traditionnelle opposition entre deux communautés voisines. Au cœur de l’hiver, la Meuse en crue. Des centaines de péniches à l’amarrage, coincées, agglutinées en amont du pont presque submergé qui coupe la cité en deux. Une aubaine pour le commerce local. Au-dessus du fleuve et de la ville : la pluie battante et le vent glacé, le froid persistant, les gens tôt le soir calfeutrés chez eux près du poêle ronflant, la lumière de chiches lampes à pétrole derrière les volets clos sur de vilains secrets cachés.



Une atmosphère à la Simenon : lourde et pesante. Les écharpes de brumes comme des serpillières mouillées autour des cous, le gris terne des jours sans soleil, la boue crottant les semelles cloutées des mariniers, le reflet des réverbères allumés sur l’eau gelée des caniveaux, les cols de pardessus relevés sur les épaules rentrées … Un paysage grisâtre, des gens en noir et blanc, sous des cieux plombés, de tristes et pesants destins en attente. Le drame couve, Maigret s’y montrera en arbitre, en re-conciliateur plus qu’en investigateur. Mais a-t-il eu raison ? Le lecteur se pose la question.



Une famille flamande, les Peeters, côté pile ; une autre française, les Piedbœuf, côté face.



Les premiers, aisés, détestés et jalousés, tiennent une modeste mais fructueuse épicerie-buvette à cheval sur la frontière. Le père, perdu dans les brumes du grand-âge. La mère, toute entière dévouée à son mari et ses enfants. Deux filles, Anna (gérante du commerce) et Maria (institutrice chez les Sœurs à Namur), tournées vers le bel avenir promis au frère, Joseph, qui fait son droit à Nancy et doit épouser sa cousine, Marguerite, fille d’un médecin généraliste local. Un futur espéré radieux, si ce n’est que ce garçon idolâtré par les siens a fait un enfant, il y a 3 ans maintenant, et sans formellement le reconnaitre, à une dactylo de Givet, Germaine Piedbœuf. Cette dernière disparait. L’a-t-on tuée ? Les soupçons se portent logiquement sur Joseph, son arrestation est proche. Anna, sur recommandation, s’en va à Paris demander l’aide de Maigret qui, fasciné par cette femme froide, au physique de vielle fille laissée pour compte, mais sûre d’elle-même, impassible et qu’il ne peut vraiment cerner, accepte.



Les seconds, les Piedbœuf: aux antipodes des Peeters, leur versant pauvre ; le père gardien de nuit dans une usine ; le frère Gérard, simple employé, naïf et matamore, ponctuel buveur colérique ; sa sœur Germaine à qui l’on prêtait quelques aventures.



Deux familles qui s’affrontent, se haïssent … s’accusent l’une l’autre : d’avoir tué, fait disparaitre Germaine pour l’une ; de réclamer indument pension, dommages et intérêts pour l’enfant abandonné qui ne peut être celui de Joseph pour l’autre.



A la croisée des deux familles, deux policiers :

_Machère, l’inspecteur en charge de l’affaire qui remonte en vain le fil de sa logique policière, celle des indices concrets, des horaires de trains, des sempiternelles preuves matérielles ;

_Maigret : Au-delà du fait qu’il n’est pas en service commandé, se posant en spectateur attentif et patient de chacun, le commissaire est poussé d’un clan à l’autre comme un coin forcé dans une souche, tiré d’un bord l’autre, à hue et à dia … il peine à imposer sa neutralité.



Le commissaire tournera quatre jours durant autour de chacun des personnages, creusant leurs psychologies, sondant leurs âmes, leurs faiblesses et forces, avant de se convaincre que ….



Et tandis que la pluie peu à peu faiblit, que la Meuse amorce lentement sa décrue, que les péniches s’échappent au compte-gouttes vers l’aval, Maigret arrache lentement et difficilement des bribes de compréhension au mystère, jusqu’à la révélation finale qu’il gardera pour lui et la personne qu’il démasque mais laisse en liberté … il prend le train du retour pour Paris sans référer à quiconque de ses conclusions.



Comme d’habitude chez Simenon, loin de la simplicité apparente du style, « Maigret chez les flamands » cache une intrigue où le moindre détail compte, où tout est dense et complexe mais elliptiquement travaillé et amené à un épilogue étonnant où le non-dit allusif prend tout son poids. Gare à celui qui perdrait un détail d’importance sous peine de se perdre dans un récit désormais sans tête, alors qu’au final tout se tient dans une finesse et une finalité toutes deux d’importance, un équilibre méticuleux entre ce qui est dit et ce qui est suggéré. Il faut quelques heures de réflexion pour, qu’à postériori, le lecteur tire toutes les implications de la situation. C’est à çà que l’on reconnait les bons bouquins, quand lecture close, il en reste encore des bouts qui trainent et interrogent. Et là, il y à faire .. !



Reste, néanmoins, que le positionnement final de Maigret pose questions. Au-delà du fait que le Commissaire n’est pas en service commandé, le coupable à mon sens ne méritait pas tant de mansuétude. Même si, selon toute vraisemblance, il n’y aura jamais récidive de sa part, il y a eu crapulerie, meurtre avec préméditation, subornation de témoins, violences aux portes de la folie (un crane explosé à coups de marteau, quand même). Quid des circonstances atténuantes ? Perso je n’en vois pas. Ce coupable en liberté ne me plait pas alors qu’un faux meurtrier acheté courre toujours et que tous les personnages, ici, ont leurs parts de responsabilité dans un drame qui aurait pu trouver une solution autre … Une pièce de puzzle manque (à moins de ne pas l'avoir perçu). Maigret semble t’il se mettre aux ordres de la recommandation première qui lui demandait de protéger les Peeters (il ne s’offre pas ainsi le beau rôle, ce n'est pas conforme à son image). Maigret ressent t’il un petit faible inconscient pour Anna (oui, non ? Je ne sais pas) ?



Néanmoins, malgré le questionnement final, « Chez les flamands » est un des meilleurs Maigret qui soient .. ! Il laisse des bouts de lui-même derrière lui et, trois jours plus tard après l'avoir refermé, je ne sais pas toujours quoi penser: coupable et policier me trottent dans la tête.



Bruno Cremer, en 1992 à la TV, reprend, après Jean Richard en 1976, le rôle de Maigret chez les flamands. Le téléfilm fait l’impasse sur la crue, sur l’hiver (juin au lieu de janvier) ; une bien jolie et charmante Anna remplace son aller-ego romanesque ; on y parle d’Occupation et de Résistance alors que le livre fut écrit en 32 … En somme, les miracles des adaptations ciné sont de sortie ; mais l’essentiel est bien présent : une atmosphère lourde et pesante, des sourires contraints et de minces chuchotis prudents sur des lèvres à peine entrebâillées, des regards impénétrables et durs, apeurés ou haineux …. Et un coupable toujours aussi étonnamment mystérieux, avec qui Maigret va entretenir un duel voilé et trouble qui fait tout le charme du roman.


Lien : https://laconvergenceparalle..
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