A NANA
d'après l'Anthologie grecque
Tu m'as trahi, Nana, cette nuit, je le vois.
Tout me le prouve, tout: tes yeux fanés, ta voix
Qui ne peut me tromper, ta démarche lassée...
Cette guirlande à tes cheveux entrelacée,
Qui s'écroule... et tel un coquillage où les flots
Ont, en partant, laissé l'écho de leurs sanglots,
Ton oreille meurtrie et de baisers rougie,
Qui tinte encor du bruit des flûtes de l'orgie.
Madrigal
Comme il faudrait, reine de mes amours,
Un rythme aux précieux contours
Pour célébrer l’originalité
De ta fière beauté,
Je ne saurais, vois-tu, trouver des mots
Qui soient d’assez parfaits émaux
Pour enchâsser dans leurs flancs précieux
La grâce de tes yeux.
La neige auprès de toi semble du lait,
Le lys royal est ton valet,
Le cygne est blanc, mais il faut pour cela
Que tu ne sois pas là.
Il me vient plus de chaleur et d’éclat
De ton visage délicat
Que du soleil qui fait fleurir les fleurs
Aux cent mille couleurs.
Je ne sais pas de son plus étonnant
Que ton parler si doux sonnant
Et les oiseaux qui ravissent les bois
Sont jaloux de ta voix.
Auprès de toi, fleur de ma passion
Toute grâce est illusion
Et le regard d’un Dieu te fanerait
Et te profanerait.
Quand mon verre est vide, je le plains; quand mon verre est plein, je le vide.