...il y a des gens disposés à payer des milliers de dollars pour une vieille tronçonneuse signée Jon Vacuo; j'imagine qu'ils l'accrochent dans leur salon,et expliquent ce que cela signifie.Moi franchement,bien que je comprenne le sens historique des objets,la dénonciation sociale qu'ils renferment,et alors même que je l'ai aidé à concevoir,cela me fait plutôt rire.Je n'imagine pas le salon de Pilar,celui de maman,ou un couloir de La Secréte, avec une vieille tronçonneuse suspendue à un crochet, et un carton à côté qui explique, sur plusieurs paragraphes et dans une prose tarabiscotée,l'importance de l'œuvre comme témoignage de la mémoire historique du conflit en Colombie.p.161
Se souvenir, c'est comme prendre dans ses bras les fantômes qui nous ont permis de vivre ici.
Maman avait une théorie qui avait toujours guidé sa vie, et c'est que les vieux doivent acheter la compagnie des autres. (Page 18)
Parfois les malheurs sont ainsi, ils ne s'espacent pas à travers les ans, mais arrivent tous à la fois, comme il en va aussi des joies, l'un après l'autre. La vie est faite de vagues de joies et de vagues de tristesses, et de longues années de calme, sans sursauts, qui sont les meilleures.
Le rire très souvent [...] est la meilleure cuirasse.
La pensée magique, si trompeuse soit-elle, nous aide parfois.
La vie ne tient qu’à un fil, et dans l’air il y a des ciseaux qui volent au vent.
Les inégalités naissent de l'effort ou de l'astuce de quelques-uns, voire de la méchanceté ; des vices, de la paresse ou de la simple malchance. Ou encore d'un héritage , [...] ? Ou parfois par malice, par mérite ou par chance. Il suffit d'une chute de cheval pour rester invalide et sombrer dans la pauvreté ; à l'inverse, on peut tomber de son mulet et trouver par terre une mine d'or. Voyez bien qu'il n'y a pas seulement les injustices des hommes, il y a aussi celles du destin, comme l'a dit un poète. Comment savoir ? Il est possible que les inégalités s'accentuent et alors, si elles sont trop grandes, dans un siècle ou plus, il faudra battre les cartes à nouveau et les redistribuer.
[...] j'ai cherché sur la galerie de mon portable de vieilles photos de maman. Les photos de sa jeunesse, celles où on la voyait jolie et souriante, pleine de vie, avec tout son avenir devant elle. J'en ai trouvé une où elle me tenait, à un an, dans ses bras, et nous souriions tous les deux en nous regardant, remplis d'amour et de joie. Je l'ai mise sur Facebook, qui est l'endroit où maintenant on poste les annonces, les deuils et les condoléances [...].
Malédiction de la vie : tout est si lent et difficile à construire, si facile et rapide à détruire, il suffit d’un peu d’essence et d’une allumette.