Depuis l'Illiade et l'Odyssée, je ne crois pas avoir une seule fois eu l'occasion de lire un roman grec. Lacune comblée grâce à
Panagiotis Agapitos. Ce dernier, professeur d'histoire byzantine à l'Université de Chypre, est l'auteur d'un roman historique aux allures de polar :
le Luth d'ébène : une enquête de Léon le protospathaire.
Un roman traduit du grec et publié en 2013 dans une maison d'édition toulousaine qui m'était inconnue : Anacharsis. Un petit pavé de 380 pages, doté d'une liste impressionnante de personnages en début de roman, d'une carte de la ville de Césarée où se déroule l'histoire et d'un glossaire touffu. Un roman où l'on apprend effectivement du vocabulaire pour peu qu'on soit un peu curieux historiquement parlant : aplikton, cataphractaire, drongaire, logothète, myrepse, saldamare…
Une richesse du vocabulaire à l'image de la richesse tourmentée de l'Histoire. En effet, dès les premières lignes, on plonge en 832, au coeur de l'Empire byzantin, à Césarée, ville frontalière située en Cappadoce, entre Constantinople et Bagdad. Une cité à la limite des mondes musulman et chrétien, entre cultures arabe et byzantine ; une cité qui bouillonne ! La postface de l'auteur est à ce titre vraiment très utile et permet de situer pleinement le contexte et de préciser le cadre historique de l'écriture.
Léon, l'ambassadeur – ou prothostataire – arrive dans cette ville fortifiée en mission diplomatique pour l'Empereur Théophile. Une arrivée sordide, au pied d'un échafaud qui plante le décor pour tout le roman : « Trois hommes à demi nus étaient empalés sur des pieux pointus érigés sur les larges planches d'une estrade de bois. Leurs bras écartés avaient été liés à des montants horizontaux formant une croix avec les pieux ; leurs têtes tondues étaient maintenues en arrière par une corde. Membres tordus et visages déformés étaient figés dans la lumière livide du soleil. »
Il règne une confusion manifeste dans la cité. le stratège Nikophoros, commandant militaire de la ville, délaisse en effet ses affaires, trop préoccupé par la santé défaillante de sa fille et la mort prématurée de son fils. Quand la fille du Juge disparaît et est retrouvée quelque jours plus tard morte et atrocement mutilée, c'est une toute une ville qui se met à tourbillonner de violence. Les disparitions et meurtres sauvages de jeunes femmes semblent être légion et c'est à Léon que le stratège confie alors l'enquête. le diplomate endosse bon gré mal gré le costume de Sherlock et se met en quête du meurtrier.
Ruelles sombres, bordels douteux, militaires violents, moines patibulaires, complots, faux-semblants : les péripéties s'enchaînent jusqu'au dénouement…
Un roman facile à lire, une fois qu'on a accepté le vocabulaire historique ; une intrigue assez prenante découpée en 23 chapitres qui permettent alternativement de changer d'atmosphère et de personnages et de se fondre un peu plus dans l'ambiance étrangement sordide de cette cité.
En fouinant un peu sur le web, j'ai découvert que l'auteur avait publié deux autres romans qui font suite au Luth d'ébène : The Copper Eye (Agra, 2006, recently published in Italy as L'occhio di bronzo, Crocetti 2008), while the third novel in the series, Enamel Medusa, will be appear in July. (source : https://french-italian.stanford.edu/opinions/agapitos.html / date : 2009)
Autant dire que je vais surveiller de près les publications d'Anacharsis.
Lien :
https://deambulationsrennais..