Il était une fois, ô gué,
Un cœur si neuf, ô gué, ma mie,
Qu’il n’avait jamais navigué
Jamais navigué de sa vie.
Le cœur craignait de chavirer,
Mais la mer se faisait si belle,
Qu’il ne sut pas lui résister,
Et vogue, vogue la nacelle.
Le cœur, essuyant son chagrin,
S’embarqua, jeune d’espérance ;
Et, seul, Dieu sait ce qu’il advint
De ce pauvre cœur en partance...
Il était une fois, ô gué,
Un cœur si neuf, ô gué, ma mie,
Qu’il n’avait jamais navigué,
Jamais navigué de sa vie.
C’est la Vanité du Demain,
L’effritement de la Matière :
Deux mains qui se « serrent la main »
Sur un marbre du cimetière.
Qui dira le tertre glacé,
Sous lequel dort votre âme blanche,
Et si l’œil cher d’un fiancé
Suivit votre cercueil de planche,
Vierge fatale, dont la mort
Plongea le secret dans la terre,
Vous dont la main étreint si fort
Une main close de mystère ?
C’est la Vanité du Demain,
L’effritement de la Matière :
Deux mains qui se « serrent la main »
Sur un marbre du cimetière...
La brume du soir
La brume du soir a tissé
Sa mousseline violette
Sur le paysage, effacé
Comme derrière une voilette.
Ce jour d’automne agonisant,
Où le parfum fané des roses
Tourbillonne dans l’air grisant,
Il pleut de la mort sur les choses…
Le souvenir d’un baiser pris
Au hasard troublant d’une fête,
Passait mélancolique et gris,
Et s’est en allé de ma tête…
La brume du soir a tissé
Sa mousseline violette
Sur le paysage, effacé
Comme derrière une voilette.