Ayant d'abord été séduit par la bande-annonce de l'adaptation cinématographique récemment sortie, j'ai préféré commencer sa découverte par la lecture de ce roman, afin de me faire ma propre idée de ce récit.
Comme l'ont souligné d'autres avis, l'histoire est assez pauvre. Il y a peu de péripéties ou rebondissements, inhabituel pour un roman apocalyptique. Mais on se rend compte que c'est un choix délibéré de l'auteur : axer son récit sur les relations humaines.
Dès le départ,
Rumaan Alam insiste bien sur les conditions sociales des personnages : un couple de blancs de la classe moyenne, dans le but d'être représentatif de la société américaine actuelle. La narration est très moderne, insistant sur des problèmes sociétaires de notre époque avec de nombreux détails (société de consommation, carrière professionnelle, éducation, inégalités sociales, racisme, …).
Un évènement va vite survenir, une sorte de black-out, dont peu de détails nous sont donnés. L'auteur a fait ce choix très particulier de nous priver de ces informations extérieures et de nous laisser au même stade que les protagonistes, coupés du monde et dans l'inconnu. Jusqu'à la fin du livre, on ne saura guère plus de ce qui est réellement survenu, renforçant le côté mystérieux à ces évènements.
La narration est donc très personnelle, nous donnant une vision très subjective des péripéties, survenant au compte-gouttes et décrites principalement au travers du ressenti des différents protagonistes. L'auteur privilégie donc les relations humaines et les sentiments de ces personnages ; cette cohabitation forcée avec les propriétaires au départ si différents, que le destin va rapprocher. La grande majorité du livre se passe en huis-clos dans cette maison de vacances, maison de rêve initialement, mais dont l'isolement géographique anxiogène la transforme à la fois en prison et en forteresse.
A travers ce roman, l'auteur nous dresse un état des lieux sur la société américaine actuelle et la société en général : le citoyen dépendant envers la technologie, perdu et impuissant sans elle ; le citoyen profitant de ses privilèges et apeuré par l'inconnu et le risque de les perdre ; le citoyen attaché à ses plaisirs personnels, etc. Cette maison isolée, huis-clos oppressant et anxiogène, constitue ainsi une représentation métaphorique de la société avec ses défauts, ses peurs, ses faiblesses, ses doutes, ses envies, … Il dénonce les principes et préjugés dont les individus ne peuvent se défaire et qui peuvent conduire véritablement au chaos.
On se rend compte ainsi de l'implication du comportement des personnages en réaction au black-out qui va contribuer tout autant à la création de ce fameux « monde après nous ». L'effet papillon causé par cet évènement initial, auquel on ajoute cette peur de l'inconnu, ces instincts de survivalisme et d'individualisme, cette paranoïa, qui sont véritablement à l'origine de ce monde apocalyptique. Ainsi, privé de l'omniprésence d'internet, unique source d'informations, l'Homme perd ses moyens, préférant s'isoler plutôt que chercher des réponses à ses questions.
Oubliez les romans post-apocalyptiques habituels,
Rumaan Alam nous livre ici une vision subjective des prémices de l'apocalypse, d'un réalisme déconcertant. Pour le côté action et fantastique, on peut rester sur sa faim, mais pour le côté psychologique et représentation métaphorique de la société, c'est pour ma part une réussite.