La vérité sort de la bouche du cheval

« La vérité sort de la bouche du cheval », Meryem Alaoui, 2018, Gallimard

Amis de la poésie, les beaux mots et des personnages romantiques, passez votre chemin… cette histoire n'est pas pour vous.

Les autres, suivez-moi, on va faire un tour à Casablanca !

Ça n'a pas été facile de rester aux côtés de Jmiaa qui tapine sur les trottoirs de Casablanca. Jmiaa est paumée, vulgaire, inintéressante, pathétique, mauvaise mère, amoureuse des mecs les plus pitoyables que l'on puisse rencontrer.

Je me suis accrochée à ma patience qui deviendra un jour légendaire. J'ai appris à connaitre Jmiaa, j'ai fini par tolérer son langage châtié, j'ai regardé d'un autre oeil ses formes grotesques, j'ai essayé de comprendre les misères affective, éducative et financière dont elle est prisonnière.

La petite bourgeoise que je suis, dans son petit paradis occidental, a gratté la croûte répugnante de ce Maroc populaire pour découvrir une femme, une vraie, futée, butée, débrouillarde qui sait finalement aussi bien manipuler la vie que celle-ci la manipule.
Cette Jmiaa, je m'y suis attachée, et j'en veux un peu à « Bouche de cheval » d'avoir compris avant moi à quel point elle est précieuse dans sa fange. Parce que « bouche de cheval » a tout compris depuis le début et qu'elle elle sait que personne ne jouera mieux le rôle de Jmiaa que Jmiaa elle-même dans son prochain film sur ces personnages hauts en couleur de Casablanca.

J'ai fermé ce livre avec un sourire en coin qui voulait dire : « Merci de m'avoir fait côtoyer Jmiaa ! »
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Ce premier roman au titre un peu long de Meryem Alaoui est une belle réussite.
Il s'agit de nous raconter l'histoire originale et aussi dramatique qu'amusante de Jmiaa, prostituée de Casablanca.
C'est donc depuis l'intérieur de l'esprit de cette femme que nous découvrons un Maroc populaire, loin des cartes postales touristiques.
Jmiaa vit chichement dans un quartier animé de la capitale marocaine. Elle a une fille, des collègues prostituées plus ou moins sympathiques, et elle enchaîne les passes entre deux soap passant à la télévision.
Le père de sa fille a émigré en Espagne, mais elle ne manque pas de partager avec lui ses bénéfices.
Un jour Jmiaa va rencontrer « bouche de cheval », venue de hollande pour interroger des prostituées afin de réaliser un film.
Va s'en suivre pour notre héroïne une carrière d'actrice qui la conduira jusque de l'autre côté de l'Atlantique.
Une des grande force de ce roman c'est d'arriver à restituer l'ambiance du Maroc populaire.
Les référence musicales, les mots de la langue, nous transportent sur les lieux et nous font vivre une expérience chaude et lumineuse.
Ce qui est intéressant également, c'est cette « misère heureuse » qui est exposée. Jmiaa ne se plaint jamais de son sort et fait face aux difficultés avec une grande force de vie.
La confrontation de son caractère populaire avec le monde du cinéma et ensuite avec la profusion matérielle qui règne aux Etats-Unis est aussi une expérience sociale pertinente.
Ce livre ne fait à aucun moment dans le misérabilisme et est très souvent drôle alors que le sujet est parfois grave ou glauque.
Meryem Alaoui maîtrise de bout en bout la gouaille de son personnage, mais on sent une grande dextérité littéraire en arrière plan.
Un mot sur la dernière phrase du livre que je perçois comme un clin d'oeil affectueux et bienveillant de la créatrice sur son sujet.
Un très bon livre, allez-y !

Parfois tu lis une critique de livre et tu te dis , tiens ce livre m'interpelle . Et tu achètes un roman dont la couverture ne t'aurait même pas attirée … et là tu te prends une claque en pleine figure .
À la lecture des premières pages , j'ai cru que tout cela allait être trop glauque pour moi mais non .Je suis entrée dans l'univers sordide de Jmiaa et j'ai aimé la lire nous raconter son quotidien à mille lieux de ce que je connais et savoir qu' une simple rencontre peut changer notre vie .
Ce livre m'a sortie de ma zone de confort mais ce fut agréable et une belle découverte littéraire .

Ce roman de Meryem Alaoui offre une perspective captivante sur la société marocaine contemporaine. À travers des personnages riches et des dialogues percutants, l'auteure explore des thèmes tels que la classe sociale, l'identité et la quête de vérité.

Dans l'ensemble, c'est une oeuvre audacieuse qui pousse à la réflexion sur la réalité complexe du Maroc moderne.

Une « putain » de vie


Bent Larbi Jmia, trente-cinq ans, est une boule d'énergie. Dans son bout du Maroc, entre un mari qui devient vite un ex collant, une petite fille dont elle ne sait pas toujours que faire et une mère plutôt envahissante, elle dégomme tout sur son passage, déployant un art de la séduction à nul autre pareil. C'est qu'il lui faut faire face d'abord et avant tout. Survivre, envers et contre tout.

Elle sera donc prostituée (ainsi en ont voulu les hommes de sa vie), mais – sur la tête de sa fille, elle se le jure – gare à celui qui lui manquera de respect ! Actrice de sa « putain » de vie, elle le devient finalement au sens propre du terme lorsqu'elle croise le chemin de « Bouche de Cheval » qui lui propose de devenir une héroïne de cinéma. Il faut dire que sa vie vaut bien un film, même si la réalité dépasse de loin la fiction. Qu'à cela ne tienne, c'est toujours bon à prendre. En route pour l'Amérique !

Tout n'est que mouvement, caracoles et péripéties dans ce roman. de ruades en provocations, l'héroïne y déroule son quotidien dans ce qui prend la forme d'un journal intime. Un journal sans filtre où elle professe des horreurs avec une candeur et une spontanéité désarmantes.

Ici, il n'y a pas de honte bue, pas plus que de détours : le personnage est cash autant que son langage et c'est là tout ce qui fait la force de ce roman qui, derrière une façade volontiers criarde, dresse le portrait d'une femme forte et sensible en quête d'indépendance. Un hymne à la vie et à la liberté.