C’est par suite d’une première division du travail que les charpentiers cessèrent de fabriquer les meubles, et que les huchiers, devenus plus tard menuisiers, furent chargés plus spécialement d’exécuter les portes, les fenêtres et les volets des maisons, ainsi que les coffres, les bancs, les bahuts et les armoires. Tous ces meubles étaient taillés et assemblés comme de la charpenterie fine, et les bois toujours employés à tenons et à mortaises chevillés en bois ou en fer. Les collages n’étaient admis que pour les applications de marqueterie de peaux ou de toiles peintes sur les panneaux. Quant aux moulures et à la sculpture, elles étaient taillées en plein bois, et non point appliquées.
Les meubles de provenance portugaise se reconnaissent à l’aspect sauvage des sculptures ainsi qu’au caractère de leur mosaïque sur bois qui constitue une tarsia spéciale. Vers le commencement du XVIIe siècle, les ébénistes de Lisbonne commencèrent à exécuter des meubles dont la composition se rapproche des œuvres franchement européennes.
On voit à l’Académie des Beaux-Arts de cette ville un cabinet en écaille incrustée d’ivoire et d’appliques en cuivre doré, dont les panneaux du centre représentent le jugement de Salomon. Ce meuble, qui porte la signature de Prabo Fibrug, rappelle la disposition des cabinets italiens.
Vers les premières années du XVIIe siècle, la mode délaissa sans retour les œuvres sévères des menuisiers sculpteurs de la Renaissance, pour rechercher des meubles plus précieusement travaillés, dans lesquels la richesse de la matière l’emportait sur la conception artistique. Les antiques dressoirs et les armoires à double corps furent remplacés par les cabinets d’ébène ou de bois exotiques, revêtus de pierres dures ou d’incrustations en os et en ivoire qui répondaient mieux au caractère décoratif des demeures contemporaines du règne de Louis XIII et des premières années de celui de Louis XIV.
La création de l’Académie royale de peinture et de sculpture introduisit dans notre pays l’art patronné par le gouvernement. L’une des conséquences les plus heureuses de cet établissement fut l’inauguration de biographies consacrées aux artistes privilégiés qui, si elles laissaient dans l’ombre les côtés inférieurs de leur existence, donnaient des renseignements exacts sur l’ensemble de leurs travaux. C’est la première tentative faite pour transmettre à la postérité le souvenir de nos célébrités disparues.