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Citations sur La ligne de crête (12)

Ni sport ni exploit technique. Il ne s'agit ici ni de vaincre un sommet, ni même, comme on dit, de se « dépasser ». Plutôt d'entrer dans un rapport où sujet et objet confondus ne sont plus qu'un seul continu de pierre, de chair, de regard, de lumière, de mémoire, d'espace, de pensée et de vide. Et ce rapport ne peut avoir lieu que dans l'emportement d'un mouvement. La montagne écrase quand on l'affronte dans la fixité du regard; elle accueille si l'on marche vers elle, si l'on s'y oublie. L'expérience à laquelle elle invite est celle d'une dépossession. Du temps, de l'espace et de soi-même. Gravir pas à pas sa grande forme à la fois inquiétante et accueillante, massive et aérienne, c'est entrer dans un présent qui ouvre à l'instant des choses. Dans la lenteur de l'ascension s'établit un contact d'ordre... ontologique. J'hésite à écrire ce mot, tant il recouvre de facilités et de prétentions. Je veux parler de cette manière d'être ensemble où, aux moments les plus forts de l'ascension, le temps de l'homme et le temps du monde se rencontrent. Alors, on est là, totalement. Dans l'éclat unanime - anonyme. Où chaque parcelle d'espace et de temps reflète l'infini du monde. Une expérience d'être, effectivement. Je marche, et chaque pas réaffirme la vie. L'intensifie. Face à la mort. Qui, un instant recule. Dans l'oubli de soi-même. Dans l'affirmation de tout.
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Le temps s'étire comme, mot à mot, une phrase si lente qu'elle semble immobile. Et c'est peut-être dans cette lenteur qu'on voudrait entrer. Pour y trouver ce qui pousse et à la fois appelle. Ce passage comme d'une eau obscure, silencieuse, qui coulerait on ne sait où pour resurgir soudain, miroitante et sonore, ouvrant la vie - un espace si clair qu'il serait sans limite.

p. 62
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Qu'est-ce qu'un lieu - ce qu'on appelle un lieu ? Non pas l'en face du paysage, la distance du panorama, mais cette configuration singulière où, sans qu'on l'ait ni prévu ni voulu on se découvre soudain là, au centre. De quoi on ne le sait pas. Mais on est dans un espace où habiter, où découvrir, une fois encore, que quelque chose commence, ne cesse de commencer et qu'on commence avec.
Comme parfois au détour de tel chemin, la surprise d'un jardin entrevu - l'obscur d'un tronc, le vert liquide de l'herbe et des feuillages - par la porte entrebâillée d'un mur. Ou, plus simplement, ce coin de place au soleil, ce banc à l'ombre de trois peupliers sur lequel on attend. Car c'est peut-être l'attente qui fait le lieu. Tout ce que le corps et le regard y mettent de vie pressentie et promise. En ce sens, n'importe quel morceau d'espace peut devenir un lieu, pour peu que l'habite l'intensité d'une attente qui est moins peut-être celle de ce qui vient que de ce qui revient. Quelque chose comme un grain d'enfance. Et tout se met à briller.

Pp. 11-12
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Au lever, c’est un éblouissement sur lequel se détache l’encre de deux grands feuillages, quelques bosquets, un ou deux toits. L’air est d’une fraîcheur sonore, rayée d’insectes vifs, l’herbe un infini de feux liquides. Si les yeux montent, ils ne rencontrent que la dérive floconneuse d’une buée et la découpe lumineuse et obscure à la fois d’un grand vide bleu.
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Le jour passe trop vite. Soudain, la montagne est cette lampe rose dont l'éclat se prolonge bien après que tout soit tombé dans l'ombre. Et même quand elle s'éteint, c'est encore une buée lactée qui touche presque les étoiles.

p.104
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La marche et l'écriture se ressemblent. Une chose obscure, impérieuse, insiste, emporte, et si l'on avance c'est pour savoir, pour la découvrir... Pas à pas, mot à mot, avancer c'est s'approcher de cet autre côté dont on sait bien pourtant qu'on ne l'atteindra pas.
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La marche et l'écriture se ressemblent
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nous n'atteindrons jamais le pays du silence
où les arbres craquent avec le vent
où la nuit tombe
sur la blancheur des pierres
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A chaque instant recommençant. Au bord toujours d'abandonner.. D'en rester là. Perdu. Sans autre repère que le souffle, le coeur qui bat trop fort. Comme au bord de la phrase inachevée. Quand il n'y a plus rien à voir, à dire, à penser. Et qu'on avance, pourtant, mot à lot, sur le vide. Et qu'on n'en finit pas.
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L' écriture ne me donne pas les choses mais la trace d'un passage. Celui du regard et du corps qui le porte ? Elle ne donne rien à voir – ou si peu. Mais à sentir, sûrement, à éprouver dans le mouvement des phrases comme habitées d'une double présence : celle du regardeur et celle du regardé.
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