Jolie libraire dans la lumière

Il avait éprouvé une désagréable sensation de vide : la vie, avait-il songé, est faite de petites morts qui nous apprennent sans cesse à nous retrouver, à ressusciter la flamme que nous portons dans notre coeur.

Il lisait un passage sur l'ampleur que peut prendre le chant d'un oiseau, sur la présence que cette petite trille innocente et anodine peut offrir au jour qui se lève quand on y prête attention, qu'on s'y laisse glisser, qu'on y communie.

lorsqu'elle lit, il lui arrive de marquer un moment d'arrêt, de faire une pause, à l'écart du texte qu'elle tient en main, à l'écart d'elle-même, sur ces plages de silence, où, enfant, elle aimait s'étendre et rêver.

... plongée dans son ailleurs , là où elle se réfugiait quand le monde devenait trop sauvage à son goût.

C'était son rêve lorsqu'elle était enfant : se laisser submerger par la vie bourdonnante, en savourer chaque pépite.
Elle se couchait sur son lit, dans le noir, et écoutait se lever autour d'elle ces petits bruits qu'on n'entend pas lorsque le quotidien s'agite ; les bouts de phrases, les souffles du vent derrière la fenêtre, le tintinnabulement du carillon de l'entrée ...... un grincement par-ci, un craquement par-là, elle s'évadait dans les méandres de sa vie ...

C’était avant et, même si elle n’oublie pas, elle a décidé de vivre au présent, de se fier à la lumière du jour qui s’installe même dans les gouttes de pluie. C’est sa façon de croire en Dieu. Son passé a reculé depuis qu’elle a tourné les yeux vers l’espérance. Et le malheur, qu’elle a trop longtemps serré contre elle comme un bébé malade, est devenu moins oppressant.

Ce garçon est le plus beau livre que j'écrirai jamais. Mon petit-fils.

La vie est faite de petites morts qui nous apprennent sans cesse à nous retrouver, à ressusciter la flamme que nous portons dans notre coeur.

j'éprouve pour les gens qui lisent une tendresse particulière.

Elle a conçu sa librairie comme un lieu de vie où les marins lecteurs prennent plaisir à faire escale. Malgré le flot des nouveautés qui submergent le métier, elle s'oblige à laisser à ses clients de l'espace où déambuler et, dans un coin, elle a installé deux chaises de jardin et une petite table sur laquelle, chaque semaine, elle dépose ses coups de cur. Les gens vont là pour savoir ce qu'elle a lu, ce qui l' a émue et, pour certains, c'est le premier endroit où ils font une pause après lui avoir dit bonjour. Nombreux sont celles et ceux qui en venant chez elle, sont en recherche de repères ; ils savent que, dans un livre, ils découvriront une question essentielle ou une réponse attendue. Ça fait presque dix ans qu'elle a acheté le fonds, dix ans qu'elle cherche chaque jour comment mettre en valeur ces auteurs qu'elle admire et leurs mots qui la font vivre