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Critique de beatriceferon


Enfant, Satoru Miyawaki était très attaché à son chat, Hachi. Aussi est-il tout ému de lui découvrir un sosie qui semble surgi du passé et qui squatte le capot bien chaud de son monospace. Mais le félin, s'il accepte les croquettes, reste méfiant et ne se laisse pas approcher, jusqu'au jour où il est victime d'un terrible accident. Satoru le soigne avec amour, l'adopte et le nomme « Nana », ce qui, en japonais, signifie « sept », en raison de la forme de sa queue courbée.
Hélas, après cinq ans de vie commune, à son coeur défendant, Satoru va devoir se séparer de son compagnon. Il demande l'aide de tous ses amis.
Nana et Satoru vont traverser le Japon en voiture. C'est aussi l'occasion pour le jeune homme de renouer avec son passé.
Au cours d'une visite à ma librairie préférée, je pille allègrement le rayon littérature, pendant que mon mari déambule dans la section sciences humaines, au sous-sol du bâtiment. Mes achats terminés, je descends le retrouver et, à ma grande surprise, je remarque dans un coin une caisse remplie de romans qui n'ont pas leur place dans ce secteur. Au sommet, une belle couverture m'attire comme un aimant. On y voit sortir de derrière un rideau vert, la tête curieuse d'un magnifique matou. Évidemment, je m'en empare aussitôt. Ce sont les « Mémoires d'un chat » de Hiro Arikawa. C'est Nana, l'ancien SDF à moustaches qui a décidé de raconter sa vie. Sauvage et habitué d'un parking de Tokyo, Nana ne se laisse approcher que par Satoru. C'est naturellement vers lui qu'il se traîne lorsqu'il est victime d'une fracture ouverte impressionnante.
Satoru croit voir revenu le fantôme de Hachi, « presque entièrement blanc avec des taches bicolores uniquement sur la tête, la queue noire qui fait crochet. La seule différence, c'est que le crochet de sa queue était tourné dans l'autre sens. » Satoru aime tellement son nouveau compagnon qu'il n'hésite pas à déménager puisque son immeuble n'accepte pas les animaux de compagnie. On est donc surpris et intrigué d'apprendre que, cinq ans plus tard, Satoru va se résoudre à se défaire de Nana. Il cherche quelqu'un qui pourra prendre soin de l'animal et le chérir comme il le fait lui-même. Nous allons embarquer avec les deux amis dans le monospace et traverser le Japon.
Chacune des cinq parties du roman porte le nom de la personne à laquelle Satoru rend visite. Celle-ci prend la parole et raconte comment elle a connu Satoru, en évoquant souvenirs et anecdotes du passé.
C'est ainsi que le lecteur prend petit à petit connaissance de la vie de Satoru, orphelin très jeune, recueilli par la soeur de sa mère, dont le métier l'oblige à déménager continuellement d'un appartement de fonction à l'autre au gré de ses diverses affectations. Satoru est ainsi amené à changer sans cesse d'école et doit laisser Hachi, son chat adoré, à de lointains cousins.
Kosuke est son ami en primaire. Tous deux sont de fervents adeptes de la natation et c'est sur le chemin de la piscine qu'ils découvriront, dans un carton, des chatons abandonnés. le tyrannique père de Kosuke est allergique aux animaux. Satoru va développer des trésors d'ingéniosité pour permettre à son ami de garder le petit félin qui les avait fait fondre.
Les enfants se perdent de vue lorsque Noriko, la tutrice de l'orphelin , déménage. Satoru est un garçon particulièrement facile et sage, terriblement mûr pour son âge, toujours souriant et capable de s'accommoder de toutes les situations. Il ne veut pas causer le moindre problème à cette jeune femme qui se retrouve encombrée d'un rejeton qui n'est pas le sien. Dans chaque établissement scolaire, il se fait rapidement des camarades et devient vite très populaire.
Au collège, il rencontre Yoshiminé, seul comme lui, puisque ses parents divorcent et le laissent aux bons soins d'une grand-mère. C'est avec lui que Satoru apprend à aimer la terre et à cultiver plantes et légumes.
Au lycée, il se lie avec Sugi et Chikako qui se connaissent depuis toujours. Les deux garçons auront une petite rivalité amoureuse, mais Satoru est assez généreux pour éviter de causer de la peine à un ami en essayant de séduire sa compagne.
Enfin, le voyage se termine à Sapporo où vit Noriko, qui complétera le portrait de son neveu, si attachant, et nous révélera pourquoi il doit se séparer de son petit compagnon.
Le récit est prétexte à nous faire faire la connaissance des personnages par petites touches, grâce à une foule d'anecdotes tour à tour comiques, touchantes, poignantes ou même tragiques.
A travers les vitres du monospace, nous verrons défiler les paysages du Japon. Aux côtés de Satoru, Nana admire pour la première fois la mer, le Mont Fuji, la campagne, les forêts.
L'histoire délivre aussi de nombreuses leçons de vie. Satoru est un personnage solaire qui m'a rappelé la Kyoko du roman éponyme de Ryu Murakami. Comme elle, il fait bénéficier ceux qui l'entourent de son empathie et de sa joie de vivre. A son contact, chacun se sent meilleur.
J'ai adoré ce livre et j'ai eu plus d'une fois le coeur serré et les larmes aux yeux. Certains passages m'ont carrément fait pleurer. Et pourtant, l'auteur s'arrange pour nous montrer le beau côté des choses. Par exemple, Nana énumère toutes les merveilles qu'ils ont pu admirer, Satoru et lui, faisant ainsi naître mille images dans l'imagination du lecteur :
« Les villes où Satoru a grandi,
Les champs où les pousses frémissent,
La mer et son bruit lourd et effroyable,
Le mont Fuji de tout près tout près,
La télé-boîte si agréable pour s'asseoir,
Mme Momo, une vieille dame charmante,
Toramaru aux poils tigrés, un pénible mais sincère,
L'immense ferry blanc et toutes les voitures qu'il avalait dans sa gueule,
Les chiens qui agitaient leur queue pour faire fête à Satoru,
Le chinchilla qui avait un langage déplorable, mais qui m'a dit « good luck »,
Les vastes paysages de Hokkaido,
Les fleurs jaunes et mauves pleines de vigueur au bord de la route,
La prairie de miscanthus grande comme la mer,
Le cheval qui broutait,
Les fruits rouges des sorbiers,
Les différentes nuances de rouge des sorbiers que Satoru m'a expliquées,
Les très distingués bois de bouleaux,
L'atmosphère franche et ouverte du cimetière,
Les fleurs aux couleurs de l'arc-en-ciel dans les vases,
Les fesses marquées d'un coeur blanc des daims,
Le grand grand arc-en-ciel double aux pieds campés sur la terre,
Et puis surtout le sourire de nos amis. »
Cette sorte de poème fait chaud au coeur et nous donne une note de formidable espoir. Il suffit d'ouvrir les yeux et de savoir profiter de toutes les beautés, parfois grandioses, parfois insignifiantes qui nous entourent et sont accessibles à tous, même si on n'a pas la chance de pouvoir admirer réellement le Fuji Yama ou les paysages de Hokkaido.
J'ai seulement regretté que la couverture, bien que magnifique (c'est l'oeuvre d'Irina Garmashova-Catow) ne nous donne pas une image du véritable Nana, que je me représente plutôt comme Sam (le chat de la page « samhaseyebrows »). Mais ce n'est qu 'un détail.
Ce roman est pour moi un gros coup de coeur.
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