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Critique de peltier69


Quelle claque ce livre !

Il y a chez Raymond Aron une telle hauteur de vue et une telle virtuosité intellectuelle... Si on ajoute à cela, un désintéressement total (comme Sartre et Malraux, du reste) et une honnêteté intellectuelle hors norme, on a affaire à un individu tout à fait exceptionnel.

Pour les plus jeunes générations, il est bon de rappeler que Raymond Aron était juif.
Il analyse dans ses Mémoires tous les grands événements du XXe siècle, de 1930 à sa mort en 1983, avec une lucidité époustouflante. Avec le recul, il s'avère que quasiment toutes ses prises de position étaient exactes.

Loin de se contenter de son rôle de professeur, l'éternel premier de la classe (élève de l'école normale supérieure, major à l'agrégation de philosophie, docteur ès lettres) s'engagera constamment.

- de 1930 à 1933, il est assistant à l'Université de Cologne. Il est aux premières loges pour observer la montée du nazisme. Il ne se fait aucune illusion sur ce qui l'attend, lui, le Juif.

- En 1940, il laisse sa femme et sa fille, qui s'exileront au Maroc jusqu'en 1943, pour rejoindre le général De Gaulle à Londres. Il devient journaliste - ce sera son second métier - et écrit dans le journal « La France Libre » pendant la guerre.

- En 1945, à la Libération, après un court passage au ministère de l'Information, sous la direction d'André Malraux, il rejoint Albert Camus dans le journal Combat, puis jusqu'à sa mort, il sera à la fois professeur (à l'ENA, à l'Institut d'Etudes Politiques de Paris, à la Sorbonne, puis au Collège de France), et éditorialiste (au Figaro pendant 30 ans, puis à L Express - en tout, 4000 éditoriaux en 37 ans de journalisme). Pour ceux qui douterait du désintéressement de Raymond Aron, il est bon de noter qu'il fut payé à la pige durant toute la période où Pierre Brisson a été directeur de la publication du Figaro (1947 - 1962) et qu'il refusa son l'indemnité, en 1977, lorsque Robert Hersant le licencia, après 30 ans passés au journal.

- En 1955, dans le livre « l'Opium des Intellectuels », il persiste dans la voie du non-conformisme, en dénonçant l'aveuglement des Intellectuels de gauche (avec Sartre à leur tête), quasiment tous convertis au marxisme à cette époque, et incapable d'ouvrir les yeux sur les purges gigantesques commises par Staline.

- En 1957, il rentre dans l'arène politique en se positionnant ouvertement pour l'indépendance de l'Algérie, à contre-courant de la droite, sa famille politique d'après-guerre.

Je terminerai le commentaire de ce livre, par ce qui a sans doute plus que tout marqué sa vie : la naissance en 1950 de sa 3ème fille Laurence, atteinte de trisomie 21 (l'origine chromosomique de la maladie ne sera découverte qu'en 1960), et 6 mois plus tard, le décès de sa 2ème fille Emmanuelle, à l'âge de 6 ans, d'une leucémie foudroyante.

Ma conclusion est que cet ouvrage est un livre majeur pour qui s'intéresse à l'histoire politique, économique et intellectuelle de la France et du Monde au XXe siècle.
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