Une femme peut séparer deux nations, et rompre des liens qu’on pensait indestructibles.
Faith ne sait pas mentir. Elle a cette lueur dans le regard, celle qui dit tout sans un mot.
Mes actes parlent pour eux-même, et j’ai beau essayer de chercher le regret dans mes gestes, il n’y a rien. Je ne regrette rien, et c’est ça qui m’effraie.
Je ne peux pas me battre contre moi-même et contre mon passé. Il faut choisir ses ennemis si l’on veut les combattre un jour.
Soudain, je perçois chez le mâle une lueur dans son regard qui m’est connue. Cette lueur. Celle qu’un homme éprouve pour la femme qu’il aime plus que sa propre vie et qui serait capable du pire pour la protéger de n’importe quel danger.
Nous avions peu de chances de gagner la bataille. Nous nous contentions seulement de faire gagner du temps à nos proches pour fuir.
Je le savais. Je l’ai su à la minute où j’ai aperçu cette foule d’êtres courant dans la vallée. Il fallait que je me tourne vers ces courageux sacrifiés pour leur donner la force de lever leur épée et de combattre malgré tout.
Et je l’ai eu. Les mots sont sortis d’eux-mêmes, le courage que ma femme m’avait donné, je leur transmis, sous les yeux terrifiés de mon frère qui savait très bien que nous n’aurions plus jamais l’occasion, un jour prochain, de bavarder autour d’une bière.
Il savait que ce regard serait notre au revoir et il n’a pas flanché.
Et nous avons attendu.
Crescentia m’a murmuré un « je t’aime » silencieux, seules ses lèvres ont remué. Et l’instant s’est figé. Il n’y avait plus que son regard plongé dans le mien, et ce lien étrange qui nous a toujours unis. Je sentais l’amour qu’elle me portait à travers son regard inquiet. Elle me donnait la force et le courage de survivre à cette nuit. Et c’était tout ce dont j’avais besoin.
Je n’ai rien demandé Senan. Je n’ai pas demandé à naître, mais je suis là, vivante. Je suis née de l’union de deux personnes qui se sont aimées, malgré certains préjugés, malgré certains inconvénients, et barrières dans leurs vies. Mon père est tombé amoureux d’une autre femme alors qu’il était marié, il était plutôt heureux même si sa compagne n’était pas la meilleure des épouses, il l’aimait. Mon père est un homme de paroles, de responsabilités. Lorsqu’il dit oui, il ne revient jamais en arrière même s’il aimerait faire les choses autrement. C’est sans doute pour cela qu’il n’a jamais cherché à se battre pour ma mère. Il savait que face à ses convictions, il serait perdant. Il a résisté, longtemps d’après ce qu’il m’a raconté. Ce n’est pas qu’il aimait moins ma mère, ou qu’il m’aimait moins moi, il était prisonnier de deux amours envers deux femmes différentes. Et puis parfois l’évidence est plus forte que tout. Parfois on succombe, malgré nos convictions. Parfois on tombe amoureux d’une personne qu’on ne devrait pas aimer et c’est compliqué.
Les hommes, quels qu’ils soient, humains, vampires ou démons, se retrouvent sur un pied d’égalité lorsqu’il s’agit d’aimer. Nous devenons faibles. C’est comme ça, c’est ainsi, et lorsque nous nous en rendons compte, il est déjà trop tard depuis longtemps.
Et je me souviens de ce jour, de ce fameux jour qui m’a fait réaliser que j’étais foutu, et qu’étrangement, aussi douloureux que la situation fût, cela ne me dérangeait nullement.
Mais c’est toujours le même schéma, il n’y a que les culs d’un soir qui ne se ressemblent pas. Les autres femmes, celles qui entrent sérieusement dans ma vie pour une durée indéterminée sont toutes dotées de capacités pour écorcher mon cœur.