L'histoire se déroule au Maroc, où le corps du narrateur, décédé, est acheminé depuis Paris pour être inhumé auprès des siens.
Pourtant, la France, il y a grandi, réalisé des choses, fait des rencontres... On comprend rapidement que sa vie là-bas sera un personnage à part entière du récit.
Ce personnage un peu secret, différent, fantasmé pour certains, serait plutôt de ceux qu'on aimerait garder pour soi, pour en définir et savourer les contours comme bon nous semble. Seulement voilà, notre narrateur est mort et n'a donc plus de prise sur le vivant, et ce qui va se dire et se dérouler sans lui.
MAIS... il entend tout! Et il entendra tout jusqu'au 40ème jour après son décès, moment très important dans la religion musulmane.
Il entendra famille, amis, voisins s'épancher et déverser leur peine (réelle ou moins), se confier à lui - comme s'il était encore là - sur leurs propres démons.
Il les entendra aussi mieux comprendre qui il était, au fil des témoignages tissés les uns aux autres, et de certaines vérités qui étaient restées bien dissimulées.
Il entendra la façon dont cohabitent, mal parfois, les traditions d'un territoire laissé derrière soi et la modernité d'une vie qui ne nous appartient plus.
Il entendra et ne pourra pas expliquer, se défendre, rétablir, consoler.
Très beau roman réédité chez l'Aube, qui permet d'apprécier un style très littéraire qui se retrouve moins dans les plus récents ouvrages de
Samira El Ayachi. Cette différence de ton et de posture concourrent au fait que l'on redécouvre véritablement l'autrice, pour notre plus grand bonheur.