Je suis un monstre. Au secrous, maman, sauve-moi de moi-même...
Mais bon, quand on ne connaît de toute façon que le malheur, quand on pense que le pire est déjà en train de nous arriver, on ne fait pas attention à ce genre de petits signes. Un malheur de plus ou de moins dans ma vie, ce n'est pas grand-chose, hein ?
Oh maman. Si tu savais maman. Si tu savais comme je m'en fiche des C en chimie et des D en biologie. Comme je me fiche de la vaisselle sale dans l'évier et du prochain anniversaire de cousine Léa. Si tu savais maman comme rien ne compte. Si tu savais comme je me meurs.
— Bébé, je vais t’expliquer un truc. C’est pas compliqué à comprendre. Même pour une gamine avec un cerveau pas fini comme le tien. Il n’y a rien ni personne, et sûrement pas toi, pour me faire peur. Je ne passerais pas mon temps à te menacer si tu arrivais à te soumettre et à faire ce qu’on te dit.
Ne va pas croire que j’ai peur de toi, Gilmore. Un mot de travers, une seule parole que je trouverais trop déplacée, un geste abusif et je te pulvérise. Je t’écraserai. Je te briserai si fort, que tu n’auras pas le temps de le voir venir. Tu as déjà entendu le bruit des os quand ils se brisent sous les coups, Mia ?
Moi, oui. Je te promets que ça n’a rien d’agréable à l’oreille sauf pour celui qui les inflige.
Ces paroles me feraient presque vomir si j’avais quelque chose dans l’estomac, et tomber à la renverse si je n’étais pas dès à présent appuyée au mur avec les mains d’Isaac posées de part et d’autre de moi, pour m’encercler.
Il a parlé en se rapprochant de plus en plus, un air menaçant imprimé sur le visage.
Je ferme les yeux et déglutis. Ça y est, il est bien trop proche. Ses effluves de chèvrefeuille, de savon, de cuir, de tabac froid et de menthe, se mélangent gentiment à l’entrée de mes narines frémissantes. J’inspire à fond.
— Qu’est-ce que tu fais ? dit-il, abrupt.
J’ouvre les yeux et son visage est à moins de cinq centimètres du mien. Je louche sur sa bouche.
— Je respire.
— Quoi ?
— Toi.
— Pourquoi ?
— Tu sens bon.
Je lève les yeux et le vois hausser des sourcils perplexes.
Il vient de me menacer et moi je lui dis ça ?!
Trouble. Émotion. Mélange. Confusion. Bouleversement. Frénésie. Égarement. Excitation. Surexcitation. Aliénation. Déséquilibre. Démence. Dépravation...
Mes sentiments s'emmêlent, s'entrechoquent, se nouent, se dénouent, montent et descendent decrescendo tandis que maintenant, je frôle à peine sa peau de mes lèvres.
La moto, c'est comme le sexe, sortez couverts. Avec du cuir, c'est encore mieux.
Dans la vie, le meilleur moyen de réaliser l'impossible est de croire que c'est possible.
Maman dit que la méchanceté a deux visages. Le premier, celui du mal profond, celui des gens qui sont nés sans amour et qui ne savent pas ce que c’est que de l’éprouver. Le deuxième, celui de l’âme esseulée, meurtrie et maltraitée tellement souvent, qu’il ne lui reste que la vilenie comme défense. Blesser les autres est le meilleur moyen de les tenir éloignés, de ne pas les laisser entrer dans votre vie.
Je me demande dans quelle catégorie se situe Isaac. Parce que j’ai du mal, moi, à savoir.
« Tout comme il y a deux versions à chaque histoire, il y a deux versions à chaque personne. Une version que nous révélons au monde et l’autre que nous gardons cachée… Une dualité gouvernée par l’équilibre de la lumière et de l’obscurité. Chacun de nous a la capacité d’accomplir le bien et le mal, mais ceux qui sont capables de brouiller la ligne de division morale détiennent le vrai pouvoir. » Revenge
— Tu es fragile. Je vais te faire mal.
— Je vais te faire plus mal encore.
— Cap ?
— Cap.
— On va voir ça.