Mais il y a encore, pour la couleur, un autre axe de rationalité, car la notion de couleur, avec la notion de fréquence de vibration, a trouvé sa variable fondamentale. À chaque couleur la physique a assigné une fréquence. L'ordre des couleurs est tout simplement l'ordre de leurs fréquences.
Autrement dit, la définition de la couleur est liée à une définition très méticuleuse de l'épaisseur de la matière. La couleur d'une matière est un phénomène de l'étendue matérielle ou, plus exactement, de l'extension de la matière.
La couleur d'une cerise, si l'on prend cette couleur comme objet d'une expérience immédiate, n'est guère plus qu'un signe de sa maturité. C'est l'expérience de la ménagère au marché qui renvoie son achat à la semaine prochaine quand les cerises ayant leur pleine couleur auront vraiment du goût, quand elles mériteront la dignité de la confiture. Le peintre, à son tour, jouit avec l'intensité des couleurs multiples et contrastées, des couleurs irisées du fruit. Il sait bien que, suivant les heures, tout le ciel bleu, tout l'or du soleil viennent travailler la cerise rouge. Et si elle est au cerisier, pendue sous quelques feuilles bien composées, dans la jeunesse de l'été, le peintre donne à la cerise la charge de faire « chanter » l'arbre vert.
On n'a pas alors à s'étonner que les leçons de l'alchimiste soient immédiatement des leçons de psychologie intimiste. Le mystère objectif renvoie au mystère subjectif et vice versa. Les plans mystérieux de la substance matérielle révèlent des plans cachés de l'inconscient humain. Les deux grandes ombres se correspondent si bien qu'elles sont comme image et objet dans un miroir.
Si l'on prend d'ailleurs la connaissance scientifique dans son aspect moderne en réalisant au mieux toute son actualité, on ne peut manquer de mettre en valeur son caractère social bien défini. Ensemble, les savants s'unissent dans une cellule de la cité scientifique, non seulement pour comprendre, mais encore pour se diversifier, pour activer toutes les dialectiques qui vont des problèmes précis aux solutions originales. La diversification elle-même, comme elle doit faire la preuve socialement de sa validité, n'est pas totalement individualiste. Cette socialisation intense, clairement cohérente, sûre de ses bases, ardentes dans ses différenciations, voilà encore un fait, un fait d'une singulière actualité. N'en pas tenir compte, c'est verser dans une utopie gnoséologique, l'utopie de l'individualisme du savoir.
Nous avons été capables de créer des formes bien avant de savoir créer des concepts.
Peu d'hommes ont une connaissance nette de la ligne de démarcation qui sépare le connu du connu.
Un philosophe du concret aura vite fait de dire qu'en généralisant la lumière, qu'en universalisant la couleur, nous avons tout perdu de ce qui luit, de ce qui brille. Il oublie que le bonheur de voir est le bien de tous.