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Critique de PrettyYoungCat


J'ai découvert James Baldwin dans le fabuleux documentaire de Raoul Peck "I am not your negro". Celui-ci est véritablement d'utilité publique et devrait être projeté dans les écoles.
Immédiatement, j'ai été touchée par cet homme brillant, éloquent, inspirant.
Je l'ai tout de suite estimé et admiré.

Le livre et le documentaire sont un écho l'un de l'autre, mais s'apportent l'un à l'autre une richesse. Tantôt on se concentre sur le poids des mots, tantôt les images nous transpercent l'esprit.
Je veux saluer, vraiment, l'extraordinaire travail réalisé par Raoul Peck pour avoir, pas seulement su exploiter, mais transcender les notes éparses que James Baldwin destinait à l'écriture d'un livre à jamais inachevé. La mort nous l'en ayant privé.

I am not your negro c'est "L'histoire des Noirs en Amérique, c'est l'histoire de l'Amérique. Et ce n'est pas une belle histoire."

Le projet de livre de James Baldwin était de parler de trois grands activistes noirs qu'il a côtoyés, tous décédés assassinés en l'espace de cinq ans, à moins de quarante ans.

Le moins connu d'entre eux (du moins en Europe), est Medgar Evers. James Baldwin dit ceci de lui "(...) je me suis souvenu de son visage, lumineux, franc, beau, et de la lassitude qu'il portait comme une seconde peau (...)
et de ce qu'il m'avait raconté sur les haillons d'un homme lynché
qui pendaient de l'arbre,
battant au vent pendant des jours,
et qu'il avait dû passer chaque jour devant cet arbre."

Malcom X ensuite, il dit de lui "Quand Malcom X parle, ou quand les autres prédicateurs du mouvement musulman parlent, ils mettent des mots sur la souffrance de tous les Noirs qui les entendent et les écoutent. Cette souffrance qu'on nie depuis si longtemps dans ce pays. de là vient la grande autorité de Malcom sur ses publics. Il confirme leur réalité. Il leur dit qu'ils existent vraiment, vous savez."

Martin Luther King, le troisième grand leader noir à qui James Baldwin souhaitait rendre hommage répondait aux dissensions existant entre la philosophie de Malcom X et la sienne comme "du Noir comme créature docile qui tend l'autre joue", King répondait donc "Nous ne sommes pas engagés dans un combat où nous nous asseyons sans rien faire. Il y a une grande différence entre la non-résistance au mal et la résistance non violente".
Malcom X voyait en lui "un Oncle Tom du XXè siècle".
James Baldwin quant à lui soulignait "Le Noir n'a jamais été aussi docile que les Américains blancs ont voulu le croire. C'est un mythe. Nous n'étions pas en train de danser et de chanter, là-bas sur la jetée. Nous étions en train d'essayer de rester en vie; nous étions en train d'essayer de survivre à un système extrêmement brutal. le "négro" n'a jamais été heureux d'être là".

Dans un discours en 1963, James Baldwin nous renvoie à nous-mêmes et nous pose la question :
"Ce que les Blancs doivent faire, c'est essayer de trouver au fond d'eux-mêmes pourquoi, tout d'abord, il leur a été nécessaire d'avoir un "nègre", parce que je ne suis pas un nègre, je suis un homme. Mais si vous pensez que je suis un nègre, ça veut dire qu'il vous en faut un. La question que vous devez vous poser, que la population blanche de ce pays doit se poser, (...) Si je ne suis pas un nègre, ici, et que vous l'avez inventé, si vous, les Blancs, l'avez inventé, alors vous devez trouver pourquoi. Et l'avenir du pays dépend de cela, de si oui ou non le pays est capable de se poser cette question".

Et cette question, cinquante-cinq ans plus tard, est toujours brûlante d'actualité, au pays de Trump ou ailleurs, n'est-il pas ?

En conclusion, je terminerai ce billet par les mots de Raoul Peck : "James Baldwin a aimé la France, mais la France l'a oublié (NDLR : James Baldwin a fui l'Amérique et a vécu plusieurs années à Paris, avant de retourner dans son pays).
A la sortie du film "I am not your negro" en France, en 2017, (...) dans mes échanges avec le public après les projections, j'ai perçu une soif nouvelle pour Baldwin, une curiosité, un élan, un amour pour cet esprit bouleversant.
La personnification même de l'humaniste. (...)
James Baldwin a aimé la France, mais la France se souviendra-t-elle de lui ?"

Vous l'aurez compris, autant le livre, le documentaire que l'homme sont passionnants. Souvenez-vous de James Baldwin.
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