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sur 2726 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Déclaré mort à la bataille d'Eylau, en 1807, le Colonel Chabert, comte d'Empire réapparaît en 1817 après plusieurs années de soins à l'étranger et pense ingénument qu'il va recouvrer son identité, son patrimoine et son mariage, mais malheureusement pour lui, les temps ont changé, le nouveau régime a oublié l'Empire. Sa femme, héritière de l'ensemble des biens s'est remariée avec le comte Ferraud issu d'une famille de la vieille noblesse et elle n' a pas l'intention de changer sa situation et encore moins reconnaître comme son mari ce vieil homme réapparu de nulle part...
Le Colonel Chabert apparaît comme l'empêcheur de tourner en rond. Résigné et généreux, il abandonnera ses droits pour éviter le scandale qui pourrait rejaillir sur sa première femme, sans aucune reconnaissance de cette dernière.
Une nouvelle émouvante où, au travers du destin du vieux Colonel Chabert, Balzac confronte deux mondes qui ne peuvent plus cohabiter : celui de Chabert un homme du peuple, incarnant la réussite par le mérite, symbole des valeurs de l'Empire, une société qui permet l'ascension par l'engagement, le courage et le respect de la parole et l'autre, la Restauration qui a remis en selle les aristocrates, revenus pour la plupart d'exil qui ne cherchent qu'à reconquérir leur prestige passé.
Avec cette nouvelle Balzac propose une étude moeurs en épinglant la médiocrité de Mme Ferraud et avec elle le régime de la Restauration en lui opposant la grandeur d'âme de son premier mari et celle du régime d'Empire.
Un texte poignant qui rend hommage aux perdants qui gardent la tête haute.
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Imaginez deux secondes votre retour au pays, alors que tout le monde vous croyait mort sur le champ de bataille depuis plusieurs années. Des exclamations de joie seraient les bienvenues, ainsi que quelques larmes de bonheur. Et bien que cela offense votre modestie habituelle, vous accueilleriez cette fois-ci les qualificatifs de béni des dieux et de miraculé avec une certaine indulgence.

Malheureusement pour le colonel Chabert, cette situation idéale est entravée par plusieurs obstacles : l'administration l'a déclaré mort, et n'est pas d'humeur à changer d'avis aussi facilement ; si le colonel était le bras droit fidèle d'un empereur, il se retrouve aujourd'hui face à un roi, qui ignore tout de lui ; sa femme a épousé son amant, s'est constitué une solide fortune avec l'héritage qu'elle a reçu, et a maintenant deux enfants. Bref, la société toute entière se porte beaucoup mieux avec un Chabert mort qu'avec un Chabert vivant, et n'entend pas se laisser contrarier par la vulgaire réalité des faits.

Habitué à rugueuse franchise de l'armée, et ayant rempli ses devoirs de soldat et d'époux, le colonel a bien du mal à comprendre pourquoi son comportement n'est pas payé de retour, et les voies tortueuses de la justice ont de quoi le surprendre : on l'encourage à être vivant, mais pas trop, à réclamer l'argent qui lui appartient, mais pas tout, à laisser sa femme qui lui a juré fidélité vivre avec quelqu'un d'autre. le fait qu'il soit dans son bon droit sur toute la ligne ne semble impressionner personne.

Le portrait que Balzac nous livre est finalement assez cruel : un homme qui a été intègre toute sa vie et qui ne reçoit comme récompenses que manipulation, tromperie et complications juridiques. Ce récit souligne également la fragilité de la position sociale, qui ne tient que par la bonne volonté des pairs. Quand ils tournent le dos au colonel, il ne reste plus que les anciens frères d'arme pour lui offrir un bout de pain.
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Quand j'étais petite – je devais avoir quatre ou cinq ans – mon père avait un chat, récupéré à la mort de mon grand-père.
On l'appelait Legros (le chat, pas mon grand-père).
Legros était, ironie du sort, un chat tout maigre, tout noir, avec des yeux méprisants.
En réalité, Legros avait mal supporté la mort de mon grand-père, mais il finit par s'habituer à nous.
Je l'aimais bien, ce chat.

Un jour, Legros disparut. Plus une trace de lui, alors qu'il sortait peu.
Me trouvant inconsolable, mon père eût tôt fait de trouver un petit chaton, chez une voisine. On l'appela Tancrède.
J'avais toujours ce chagrin d'avoir perdu Legros, mais Tancrède finit par me consoler.
Tancrède était jeune, vif, joueur. Legros était fuyant, triste, acariâtre. Vieux.
Tancrède était-il mieux que Legros?
Oui, peut-être.

Et puis, quelques semaines plus tard, Legros revint.

Il n'avait pas changé, hormis son regard qui avait troqué son air dédaigneux pour une lueur définitivement triste.
Il eut en plus la surprise de constater qu'en son absence, on l'avait remplacé.
Je me souviens que Tancrède essaya de nouer avec lui.
Ça ne dura pas. Legros repartit trois jours plus tard. Pour ne jamais revenir.

C'est ce qui arrive au Colonel Chabert.

Car oui, ne t'inquiète pas, j'ai beau divaguer sur mon chat, j'ai un fil conducteur et je sais où je te mène.

Le colon Chabert est officiellement mort pendant la bataille d'Eylau.

(8 février 1807, je rafraîchis ta mémoire parce que je sais que tes cours d'histoire sont loin)

Sa veuve, donc, a convolé avec un joli comte dont elle est très amoureuse.
En plus il lui fait des enfants. Deux.
Elle s'est faite plein de thune grâce à la rente de son défunt – croit-elle – mari, et en plus elle est super jolie.

Sauf que, Dieu étant ce qu'il est – c'est-à-dire un vieillard qui aime bien foutre la merde quand on ne le lui demande pas – il décide de faire en sorte que, protégé par la carcasse de son cheval, Chabert s'en sorte.

Alors, quelques années plus tard, ce haut colonel adulé par la Patrie, parce qu'elle ne vénère toujours que ses morts, il revient en France, vêtu de haillons, sans dents, sans cheveux, sans illusions.

Sans illusions ? Pas tellement.

Car Chabert a l'espoir de retrouver son identité puisque, comme de bien entendu, personne ne le croit quand il dit qu'il est El Famoso Colonel Chabert.

Il frappe alors à la porte de tous les notaires possibles, mais aucun ne le prend au sérieux.
Sa dernière chance, c'est Monsieur Derville.
Derville le croit.
Alors Derville va l'aider.

Ce très court roman (80 pages, parfait pour faire remonter tes stats dans Babelio vu que tu passes trop de temps sur TikTok au lieu de lire) exploite donc le sujet du retour des morts.
Ou du Réveil des Morts, peut-être.

Dorgelès, dans ce livre que je viens de citer une ligne au-dessus donc, abordait en 1920 je crois, ce thème avec un oeil de Poilu traumatisé.
J'en avais parlé l'année dernière (déjà !).
Dorgelès demande : Une veuve a-t-elle décemment le droit de convoler après la disparition de son soldat de mari ?
Honoré, lui, préfère : Tiens, et si le disparu revenait remuer la merde ?

C'est un joli sujet, très émouvant, même si je préfère cent fois la manière de l'aborder de Dorgelès à celle De Balzac. Heureusement qu'il ne fait pas 200 pages, sinon je l'aurais sans doute abandonné rapidement. le sujet est traité trop en surface. Je le trouve trop superficiel sur, par exemple, les sentiments du Colonel.
C'est dommage, mais je lui pardonne.

La relecture de mon billet me rappelle l'histoire d'Anthelme Mangin.
Revenu amnésique du front, incapable de décliner son identité, pendant plus de vingt ans près de trois cents familles déchirées par le deuil impossible vont tenter de prouver à la justice que ce bonhomme est bien leur fils, leur mari, leur frère.
Une fois son identité retrouvée – après vingt ans d'acharnement judiciaire – Mangin retombe dans l'oubli, lui qui avait été la figure du Disparu des tranchées pour beaucoup de mères et veuves inconsolables.

Ainsi, la Patrie ne retient que ses morts. Elle condamne ceux qui reviennent à une pension misérable (lis le Réveil des Morts, franchement, tu verras de quoi je parle), après leur avoir ôté un bras, une jambe, un oeil, un visage.

Ceux qui reviennent fous sont laissés pour compte dans les asiles, où ils seront achevés sous le régime de Vichy quand il décrètera les réquisitions et donc la revue à la baisse des repas donnés aux aliénés (400 calories par jour, ouais, c'est maigre).

Mais ceux qui sont morts au champ d'honneur, on leur fait un beau monument dans chaque ville de France. On déposera une gerbe de fleurs en pleurant un peu, avant de boire pour célébrer la victoire.

On fera du jour de leur mort un jour de liesse, car c'est avant tout la victoire nationale.

Devrions-nous ? Ne serait-il pas plus commode de faire du 11-Novembre un jour de deuil et de honte nationale ? de deuil pour avoir envoyé au casse-pipe des braves gens que l'on n'honore que si leur mort résulte d'une balle allemande, et de honte pour ne pas, ensuite, avoir été foutus de créer un monde plus juste, où la guerre ne se voit plus que dans les livres ?

Mon billet prend un ton trop politique. Je conclurai donc ici, avec une dernière question néanmoins :

le Colonel Chabert, lui, n'aurait-il pas mieux fait de rester mort ?
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Ce livre, il faisait partie des livres obligatoires à lire pour l'école.

Quelle année ? Oh... Ben... Là, je vous parle d'un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître...

Sans exagérer.

Je me souviens de ma grimace en apprenant que je devais lire du Balzac. De Balzac, moi ?

Soupirant, je commençai le roman, assez court, du moins.

Je n'ai pas soupiré longtemps, je vous le jure. Prise dans le roman, je me souviens l'avoir dévoré, pestant et jurant contre l'injustice qui frappait ce pauvre colonel.

Son épouse indigne ? Elle aurait mérité de vivre ce qu'il a vécu : enterré dans la fosse, considéré comme "mort" alors qu'il était vivant.

Vous vous imaginez enterré, vous ? Moi, ça me fait froid dans le dos.

Vous vous imaginez en train de gratter pour sortir de la fosse, vous ? Avec des cadavres vous entourant ?

Et ensuite, au lieu de l'accueil qui devrait vous être réservé, vous n'êtes plus rien, vous n'existez plus.

Le cauchemar !

Lorsque j'avais refermé le livre, je m'étais dit, un peu tard, que je ne devrais plus critiquer les livres avant de les avoir lu. J'en suis sortie sonnée, dégoutée de cette injustice avec l'envie de hurler.

Aucun regrets de lecture !

Préjugés... quand vous chevauchez à mes côtés.
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Pauvre Colonel Chabert !
Laissé pour mort sous un tas de cadavres à la bataille d'Eylau, il doit prouver qu'il est bien vivant. En dix ans, il n'est plus qu'un fantôme chassé de tous, un survivant de l'épopée napoléonienne. Personne ne veut le reconnaître pour des histoires de gros sous. Car le Colonel Chabert est riche, donc personne ne veut plus de lui y compris sa femme qui, ayant hérité de ses biens et s'étant remariée à un aristocrate, entend bien conserver la jouissance du patrimoine de son soit-disant défunt mari.
Elle prétend ne pas le reconnaître et l'accuse d'être un usurpateur.
Le Colonel fait alors appel à un avoué nommé Derville pour défendre ses droits.
Chabert est un homme droit et intègre, aussi devant la cupidité et la mauvaise foi des autres y compris de sa femme, las de toutes ces injustices, il renonce à poursuivre son bon droit et se laisse glisser dans la pauvreté sans reconnaissance de qui que ce soit.
Petit roman dur et cruel qui dénonce les travers et la médiocrité de la société au temps De Balzac, il nous laisse un arrière goût d'amertume devant la cupidité et l'indifférence humaines.
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Pour « reprendre contact » avec Balzac, j'avais besoin d'un roman très bref tant j'avais en souvenir l'époque ou adolescente je m'étais ennuyée à la lecture de quelques une de ces oeuvres, le lys dans la vallée, notamment.
Le choix du colonel Chabert fut judicieux car j'ai été littéralement absorbée par le triste sort de ce personnage, héros d'une campagne Napoléonienne.
Une oeuvre courte mais dense.
Un livre intemporel.

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J'ai enfin lu le Colonel Chabert, deuxième Balzac que je lis après le Père Goriot que j'avais beaucoup aimé. le Colonel Chabert a été une lecture agréable, bien que ardue parfois du fait du vocabulaire juridique que je ne maîtrise pas. Une lecture toutefois très courte puisque le roman ne fait qu'une centaine de pages avec les (nombreuses) notes de bas de page.

Tout le monde connaît l'histoire de ce soldat qui a perdu son identité car il a été déclaré mort et, avec elle, sa vie puisqu'il va rétrograder et passer de colonel, héros de la bataille d'Eylau, à pauvre vagabond plongé dans la misère et la solitude. J'ai trouvé ce roman très intéressant, poignant parfois. Les classiques du 19ème siècle sont toujours de belles découvertes car ce sont souvent des lectures que je trouve profondes, denses, enrichissantes. Cette fois, j'ai beaucoup appris sur le début de ce siècle, sur la politique de la période, entre Empire et Restauration, et sur le Paris de l'époque qui ne s'étendait pas encore, au sud, au-delà du boulevard de l'Hôpital. Et puis ce personnage – quel personnage ! – du colonel, qui tient à sa dignité jusqu'au bout,

Bref, une lecture intéressante que je recommande pour explorer une certaine vision de la dignité, mais aussi de l'égoïsme et de la cupidité, avec en toile de fond le Paris fascinant mais implacable du 19ème siècle.
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Honoré de Balzac a trouvé le titre universel qui peut contenir tous les ouvrages de la création. Quels qu'ils soient, ils ne seront jamais que des actes de la Comédie humaine.

Je regardais mes compagnons de voyage dans le TGV qui me transportait vers Marseille. Qui à faire l'important en ouvrant son ordinateur, qui à faire l'importun en parlant fort, qui à lire son journal, et m'adressais à eux en moi-même : n'avez-vous pas le sentiment que ce qui vous occupe et vous distrait de l'essentiel n'est que futilité, qu'agitation dans la grande comédie humaine ? Jusqu'à ce que le grand rideau tombe sur cet acte qui vous donne la vedette.

Et moi donc ? Et bien figurez-vous qu'en ce moment même où vous êtes persuadé d'avoir le premier rôle, je suis en compagnie d'un certain Honoré de Balzac. Il me ravit de sa langue, de son imagination, de son humour parfois, de son humanisme toujours. Je suis avec le Colonel Chabert, vivant parmi les morts, mort parmi les vivants, et qui sacrifiera les importances de la vie terrestre à la tranquillité de son âme.

Marseille, déjà. Quel bon voyage.
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Le colonel Chabert, un court roman De Balzac paru en 1844, est un hommage aux Grognards de Napoléon premier.
Le style De Balzac est là, reconnaissable et puissant. On y retrouve à la fois la richesse du vocabulaire tout autant que ses descriptions réalistes et minutieuses des vêtements et des décors.

Ce qui m'a intéressé lors de la lecture de cet ouvrage, c'est le talent de Balzac de prendre pour base de son récit des histoires réelles et d'en fomenter une fiction destinée à dépeindre un contexte historique et à explorer la noirceur de l'âme humaine.

Un ouvrage rapide à lire, et qui néanmoins n'en est pas moins qu'un classique à découvrir.
Lien : http://jeanmarc06.wixsite.co..
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Ce court roman est comme un concentré de l'art balzacien à travers le regard toujours narquois du narrateur sur les vices et les faiblesses des hommes de son temps. Les questions, pas toujours simples, de droits de succession et de procédures judiciaires assombrissent un peu l'intérêt du novice, mais pour les passionnés d'histoire du XIXe siècle, le Colonel Chabert est une inévitable pépite.

Lecture de l'édition Étonnants Classiques, Flammarion, édition adressée à un public scolaire, donc accompagnée de documents annexes: chronologie, commentaires, illustrations.
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