Nouvel horaire pour l'émission "Le coup de coeur des libraires" sur les Ondes de Sud Radio. Valérie Expert et Gérard Collard vous donne rendez-vous chaque dimanche à 13h30 pour vous faire découvrir leurs passions du moment !
Retrouvez leurs dernières sélections de livres ici !
Les Vertueux de Yasmina Khadra aux éditions Mialet Barrault
https://www.lagriffenoire.com/les-vertueux.html
Ceux qui restent de Jean Michelin aux éditions Héloïse d'Ormesson
https://www.lagriffenoire.com/ceux-qui-restent.html
Rachilde, homme de lettres de Cécile Chabaud aux éditions Ecriture
https://www.lagriffenoire.com/rachilde-homme-de-lettres.html
L'Inconduite de Emma Becker aux éditions Albin Michel
https://www.lagriffenoire.com/l-inconduite.html
La Maison de Emma Becker aux éditions J'ai Lu
https://www.lagriffenoire.com/la-maison-1.html
Ceux de 14 de Maurice Genevoix , Florent Deludet aux éditions Flammarion
https://www.lagriffenoire.com/ceux-de-14-1.html
Les croix de bois de Roland Dorgelès aux éditions Livre de Poche
https://www.lagriffenoire.com/les-croix-de-bois-1.html
Rachilde, homme de lettres de Cécile Chabaud aux éditions Ecriture
https://www.lagriffenoire.com/rachilde-homme-de-lettres.html
Prof ! de Cécile Chabaud aux éditions de L'Archipel
https://www.lagriffenoire.com/tu-fais-quoi-dans-la-vie-prof.html
L'Air était tout en feu de Camille Pascal aux éditions Robert Laffont
https://www.lagriffenoire.com/l-air-etait-tout-en-feu.html
Poids plume de Mick Kitson aux éditions Métailié
https://www.lagriffenoire.com/poids-plume.html
Nos tendres cruautés de Anne Tyler et Cyrielle Ayakalsikas aux éditions Phébus
https://www.lagriffenoire.com/nos-tendres-cruautes.html
Nous, on n'aime pas les enfants ! de Lucille Dubisy et Grégoire Mabire aux éditions Mijade
https://www.lagriffenoire.com/nous-on-n-aime-pas-les-enfants.html
Dico Châteaux de Raphaël Fejtö aux éditions Ecole des Loisirs
https://www.lagriffenoire.com/dico-chateaux.html
Mon nom à moi, c'est Billy de Clément Loïc et Lefevre Clément aux éditions Little Urban
https://www.lagriffenoire.com/mon-nom-a-moi-c-est-billy.html
La beauté du ciel de Sarah Biasini aux éditions Livre de Poche
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C'est vrai, on oubliera. Oh ! je sais bien, c'est odieux, c'est cruel, mais pourquoi s'indigner : c'est humain... Oui, il y aura du bonheur, il y aura de la joie sans vous, car, tout pareil aux étangs transparents dont l'eau limpide dort sur un lit de bourbe, le coeur de l'homme filtre les souvenirs et ne garde que ceux des beaux jours. La douleur, les haines, les regrets éternels, tout cela est trop lourd, tout cela tombe au fond...
On oubliera. Les voiles de deuil, comme des feuilles mortes, tomberont. L'image du soldat disparu s'effacera lentement dans le soeur consolé de ceux qu'ils aimaient tant. Et tous les morts mourront pour la deuxième fois.
Non, votre martyre n'est pas fini, mes camarades, et le fer vous blessera encore, quand la bêche du paysan fouillera votre tombe.
Voici la feuille blanche sur la table, et la lampe tranquille, et les livres... Aurait-on jamais cru les revoir, lorsqu'on était là-bas, si loin de sa maison perdue ?
On parlait de sa vie comme d'une chose morte, la certitude de ne plus revenir nous en séparait comme une mer sans limites, et l'espoir même semblait s'apetisser, bornant tout son désir à vivre jusqu'à la relève. Il y avait trop d'obus, trop de morts, trop de croix; tôt ou tard notre tour devait venir.
Et pourtant c'est fini... La vie va reprendre son cours heureux. Les souvenirs atroces qui nous tourmentent encore s'apaiseront, on oubliera, et le temps viendra peutêtre où, confondant la guerre et notre jeunesse passée, nous aurons un soupir de regret en pensant à ces années-là.
Je me souviens de nos soirées bruyantes, dans le moulin sans ailes. Je leur disais: "Un jour viendra où nous nous retrouverons, où nous parlerons de nos copains, des tranchées, de nos misères et de nos rigolades... Et nous dirons avec un sourire "C'était le bon temps !"
Avez-vous crié, ce soir-Ià, mes camarades! J'espérais bien mentir, en vous parlant ainsi. Et cependant... C'est vrai, on oubliera. Oh! je sais bien, c'est odieux, c'est cruel, mais pourquoi s'indigner: c'est humain... Oui, il y aura du bonheur, il y aura de la joie sans vous, car, tout pareil aux étangs transparents dont l'eau limpide dort sur un lit de bourbe, le coeur de l'homme filtre les souvenirs et ne garde que ceux des beaux jours. La douleur, les haines, les regrets éternels, tout cela est trop lourd, tout cela tombe au fond...
On oubliera. Les voiles de deuil, comme des feuilles mortes, tomberont. L'image du soldat disparu s'effacera lentement dans le coeur consolé de ceux qu'ils aimaient tant. Et tous les morts mourront pour la deuxième fois.
Non, votre martyre n'est pas fini, mes camarades, et le fer vous blessera encore, quand la bêche du paysan fouillera votre tombe.
Les maisons renaîtront sous leurs toits rouges, les ruines redeviendront des villes et les tranchées des champs, les soldats victorieux et las rentreront chez eux. Mais Vous ne rentrerez jamais.
C'était le bon temps.
Pourquoi donques quand je veux
Ou mordre tes noirs cheveux
Ou baiser ta bouche aimée...
Les vers tant de fois entendus, frémissaient sur toutes les lèvres; Dans le brouillard des pipes, le bateau des rêves prenait le large.
Il a fallu la guerre pour nous apprendre que nous etions heureux.Oui,il a fallu connaître la misere.Avant nous ne savions pas,nous etions des ingrats...
Maintenant,nous savourons la moindre joie,ainsi qu'un dessert dont on est prive.Le bonheur partout:c'est le gourbis ou il ne pleut pas,une soupe bien chaude,la litiere de paille sale ou l'on se couche,l'histoire drole qu'un copain raconte une nuit sans corvee...
Le bonheur?Mais cela tient dans les deux pages d'une lettre de chez soi,dans un fond de quart de rhum.Pareils aux enfants pauvres,qui se construisent des palais avec des bouts de planche,le soldat fait du bonheur avec tout ce qui traine.
Le voyage pour moi, ce n'est pas arriver, c'est partir. C'est l'imprévu de la prochaine escale, c'est le désir jamais comblé de connaître sans cesse autre chose, c'est demain, éternellement demain.
mes morts, mes pauvres morts, c'est maintenant que vous allez souffrir, sans croix pour vous garder, sans coeurs où vous blottir. je crois vous voir rôder, avec des gestes qui tâtonnent, et chercher dans la nuit éternelle tous ces vivants ingrats qui déjà vous oublient.
Mais elle n'était pas au bout de ses surprises.
Se retournant, elle venait de découvrir près de la porte d'entrée un suisse d'église tout galonné, un panier à salade en guise de tête et coiffé d'un bicorne à plume.
A défaut de hallebarde, il s'appuyait sur un balai.
- Et celui-là, qu'est-ce que c'est ?
- Mon copain Anatole. Je l'ai déguisé avec un costume ramené du bal des Quat'z'arts.
- Et qu'est-ce qu'il y a d'écrit sur son écharpe ?
- A bas l'argent ! ...
Un tas de colis devant lui comme un éventaire de camelot, le fourrier appelait les lettres en souffrance, au milieu d’une cohue de soldats qui jouaient des coudes et s’écrasaient les pieds. C’était à notre porte, entre le lavoir communal, si petit que trois laveuses n’auraient pas tenu sous son auvent, et la maison du notaire, qui portait en sautoir une écharpe rouge de vigne vierge. Grimpés sur le banc de pierre, nous écoutions.
— Duclou Maurice, 1re section.
— Il a été tué à Courcy, cria quelqu’un.
— Vous en êtes sûr ?
— Oui, des copains l’ont vu tomber devant l’église… Il avait reçu une balle. Maintenant, hein, je n’y étais pas…
Dans le coin de l’enveloppe, au crayon, le fourrier écrivit : « Tué. »
— Marquette Édouard.
— Il doit être tué aussi, dit une voix.
— T’es pas louf, protesta un autre… Le soir qu’on dit qu’il s’est fait descendre, il est allé à l’eau avec moi.
— Alors, demanda le fourrier, il serait à l’hôpital. Mais on n’a pas reçu sa fiche.
— À mon idée, il a été évacué par un autre régiment.
— Mais non, il était blessé ; les Boches ont dû le ramasser.
— C’est malheureux, c’est toujours ceux qui ont rien vu qui ont le plus de gueule.
Tout le monde parlait à la fois dans un tohu-bohu d’affirmations contradictoires et de démentis insultants. Le fourrier, pressé, les mit d’accord.
— J’m’en fous. Je le porte « disparu »… Brunet André, 13e escouade…
— Présent pour lui.
Et dans le jour mourant qui frotte d'un éclat glacé le dos ciré des chaises, il me semble que je vais voir, penchées sur lui, toutes les ombres de nos morts, pour qui l'horloge égrène son rosaire.
Depuis la mort de Nourry il était arrivé deux lettres à son nom. On aurait pu les retourner avec le brutal avis de décès, dans le coin : "Le destinataire n'a pu être atteint." Demachy avait cru mieux faire de les prendre. Il les sortit de sa cartouchière, les déchira sans les ouvrir, et sur cette tombe réglementaire de soldat, carrée comme un lit de caserne, il effeuilla les pétales de lettres, pour qu'il pût au moins dormir sous des mots de chez lui.