AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de CDemassieux


Premier roman de la maturité et premier signé du nom de l'auteur, Les Chouans de Balzac participe de cet engouement des écrivains français du XIXe siècle pour la Révolution (Hugo, Dumas, Dickens, d'Aurevilly, etc.). Même si dans ce cas la Révolution est moribonde, puisque l'action se déroule sous le Consulat, antichambre du Premier Empire.
Sans atteindre les cimes littéraires d'Eugénie Grandet ou le Père Goriot, c'est là un très grand roman qui mêle la machination politique à une passion amoureuse imprévue, sur fond de chouannerie. Comme pour Une ténébreuse affaire – où l'on retrouve le sinistre et génial, dans son genre, ministre de la Police Joseph Fouché –, c'est une femme qui se trouve au centre de l'intrigue : Marie de Verneuil, espionne pour le compte du « crime », ainsi que Chateaubriand désigna Fouché dans ses Mémoires d'outre-tombe. La femme balzacienne n'est décidément pas une potiche mais, au contraire, occupe l'espace narratif avec autant de poids – au sens figuré, mesdames ! – que les hommes.
Dans la région de Fougères, l'une des portes fortifiées de la Bretagne – où Balzac rédigea d'ailleurs une partie de son roman pour s'imprégner des lieux – s'étale un drame restituant l'atmosphère de guerre civile qui régnait alors depuis quelques années en France, opposant les partisans du roi à ceux de la Révolution, laquelle se verrait bientôt mangée par l'ogre impérial.
Maintenant, une question : l'auteur prend-il parti pour un camp au détriment de l'autre ? Quelque part, oui, car les chouans y sont dépeints comme les défenseurs d'une cause perdue, comme si Balzac savait qu'on n'arrête ni ne fait reculer l'Histoire : « ces hommes assez hardis, assez fanatiques, assez calculateurs de l'avenir, pour attaquer une République victorieuse dans l'espoir de relever une monarchie morte, une religion mise en interdit, des princes errants et des privilèges expirés. »
La nostalgie du « C'était mieux avant ! » ne peut rien contre le progrès des moeurs politiques, qu'elles soient bonnes ou mauvaises. Charles X, qui règne à l'époque où Balzac rédige son roman, s'y cassera la couronne en voulant rétablir une monarchie archaïque, passée entretemps sous le souffle « léger » de la guillotine !
Dans ce tumulte de l'Histoire, la passion orageuse entre le marquis de Montauran et Marie résonne comme une tragédie antique. Ou lorsque les sentiments luttent contre la raison d'Etat.
Commenter  J’apprécie          142



Ont apprécié cette critique (13)voir plus




{* *}