Petit bruit, pluie.
Cavalerie fourmi
chuchote à minces pattes avec les feuilles.
L’après-midi n’est pas augurale
mais pareille à tant d’autres.
Nous aimons sa simplicité.
Dans les vitres s’inscrivent nos visages
un peu flous
comme si nous voulions dérober le paysage
et le transporter pour toujours dans notre maison.
Il nous laisserait vivre en lui, sans histoire.
Nous serions des stratèges en gouttes et brindilles,
nous préserverions une paix
CHEMINS
Une distance se défait
Entre nous et les choses du crépuscule
Laine, étoffes, soleil rapide,
Papiers de savoir, sur quoi deux grenades rougissent.
Derniers éclats
Nous nous y attachons comme à la trace
Au fond de l'il des morts
D'un probable assassin: leur existence usée
Qui ne pouvait plus attendre derrière la porte.
Il fait nuit sans hâte. L'invisible
Investit nos mains. Nous visitons en nous
Les chemins compliqués du sang, ce pays second
Proche des questionnaires sur les fables.
« tous les liens sont cliquables. »
Je reçois cette information de mon ordinateur,
et le temps
soudain
me paraît touchable et fragile.
Ces mots n’auraient eu aucun sens quand j’étais jeune.
Mais, d’un âge assez mûr pour les rechercher dans
un livre, je sais que ces mots très jeunes vont vite
s’expliquer….
Beaux délices dissimulés
comme lécher le sucre d’un biscuit
gratter de l’ongle un savon odorant
lire un poème
par hasard
dans une revue ouverte en catimini.
On prend revanche, si mince soit-elle,
de tant de mauvaises minutes
qui nous ont menacés, détournés,
revanche qui nous lie d’un élan partagé
avec les conquérants et les grands séducteurs.
Quand la respiration difficile du réveil
aura cessé de m’agacer,
quand j’aurai vécu ma dernière nuit de femme,
je plongerai dans l’univers multiple,
j’intégrerai telle espèce animale, telle herbe,
puis telle autre.
Puis ce sera la disparition dernière du vivant.
Cher sire aimé, nous n’irons plus vers la douceur de vivre,
mais vers l’incertitude.
Des chercheurs, des savants, exhiberont quelques
fragments de nous
Et puis, et puis, ces fragments eux-mêmes auront disparu.
Des millions d’années ensuite, quelqu’un se demandera
si la vie avait existé vraiment, sur cette planète désormais
inatteignable
Syntaxe difficile de ce monde
avec toutes les actualités de l’habitude,
incendies, attentats, tornades,
exilés, offensés, meurtriers éclatants.
Tout va comme si la terre profonde
se révoltait contre l’idée d’un dieu singulier ou pluriel
comme si
la terre
haletait d’impuissance
un très, très peu d’amour
mendie et rôde
surpris
de sa propre survie.