Comme tous les individus fortunés, Jewell brillait d'un éclat terne et seuls ses yeux, sertis tels des rivets dans un masque souriant, faisaient vrais.
- Les affaires, c'est une autre forme de guerre.
- Oui, mais, dans une guerre, les gens se font tuer.
- Et vous croyez que ce n'est pas pareil en affaires ?
Il y avait un certain malaise entre eux, infime mais presque palpable, et ils le notaient, l'un comme l'autre. C'était la mort qui faisait ça : elle était aussi gênante qu'une mauvaise odeur.
Quel drôle de personnage, songea t-il, même pour une française.
Il éprouvait toujours un curieux sentiment de paix en présence de la mort.
Comment lui donner des conseils quant à ce qu'il fallait qu'elle fasse, quant à la manière dont elle devait vivre sa vie ? La sienne représentait déjà un mystère pour lui, un mystère insoluble, comment aurait-il pu avoir des idées sur ce que devait être celle des autres ?
Sinclair eut l'impression qu'une minuscule particule de ténèbres, un rayon de lumière noire perçait l’atmosphère ensoleillée, un rayon d'une finesse infinie, mais ne cessant pourtant de gagner en épaisseur.
Selon elle, c'était la culpabilité qui les avait rapproché, mais la culpabilité était un knout fait de bien des lanières, toutes raides et cinglantes pour mieux entailler la chair.
Il préférait rester seul. Passer du temps en compagnie d'imbéciles ne lui procurait aucun plaisir, or le monde fourmillait d'imbéciles.
Dehors, sur le rebord de la fenêtre, des pigeons roucoulaient sur le mode feutré et secret qui était le leur, comme s'ils s'ébaudissaient devant un scandale ahurissant qu'on leur aurait rapporté.