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Critique de jeandubus


Aurais-je sauvé Geneviève Dixmer ?

Avant toute chose, je tiens à dire tout le respect et l'admiration que j'ai pour Pierre Bayard, dont j'ai lu bon nombre d'ouvrages et dont j'aimerais, malgré mon âge être encore aujourd'hui l'étudiant fervent et pourquoi pas, l'ami.

Dans cet essai, Pierre Bayard nous prévient que toute (sa) vie aurait été différente s'(il) n'était pas pendant (son) adolescence tombé amoureux de Geneviève Dixmer. Allons bon !

De fait il ne parle pas du personnage du roman de Dumas « le chevalier de Maison Rouge », mais de celui de l'adaptation pour la télévision du roman par Claude Barma en 1963.Et plus encore de l'actrice !

Cette année-là, Anne Doat, jolie blonde de la troupe de Jean Louis Barrault incarnait Geneviève (avec une assez vilaine perruque noire) pour le petit écran et en même temps Doña Musique dans le « soulier de satin » à l'Odéon (la version de sept heures)

Adolescent privé de télé par nature (mes parents n'avaient ni le téléphone ni le précieux medium…), j'allais plus facilement à l'époque au théâtre et à la cinémathèque de la rue d'Ulm qu'au bistrot. Ce fut ma première rencontre avec Anne.

Je n'ai pas vu l'adaptation de Barma, mais je me souviens qu'on en en parlait et quand je vois aujourd'hui la distribution « Barrault Renaud » de ce « petit » feuilleton (comment le faire durer plus ….), Jean Desailly en Maison Rouge, Julien Guillomar en Dixmer, Michel le Royer en Maurice, Dominique Paturel en Lorin, Annie Ducaux en Marie Antoinette et Georges Geret en Simon, je regrette de ne l'avoir pas vu.

Côté femmes, mes fantasmes à l'époque (et encore aujourd'hui…) allaient plutôt vers les blondes à chignon « Hitch », Grace Kelly, Kim Novak, Tippy Hedren, ou les rousses, façon Déborah Kerr et Maureen O'hara
Anne Doat en brune bien que mystérieuse ne m'aurait pas inspiré.

Du coup, voyant que Pierre Bayard écrivait un essai sur le chevalier de Maison Rouge que je n'avais jamais lu et malgré son absolution tacite (comment parler des livres qu'on n'a pas lus) je me suis appuyé l'édition Folio de 2005 lourdement commentée par la grande prêtresse de la Sorbonne (du moins l'imaginé-je ainsi) Sylvie Thorel Cailleteau.

Autant peut-être, exalté comme l'auteur, aurais-je sauté dans le téléfilm en état de « métalepse », autant les personnages de Dumas ne peuvent pas m'inspirer aujourd'hui, ni hier si je puis dire, une quelconque implication dans cette histoire où tout le monde trahit tout le monde.

Pierre Bayard reconnait d'emblée que le roman est mal écrit. C'est peu dire tant la mort de la reine est inéluctable et qui plus est, celles des personnages secondaires (Maurice le niais et Geneviève la niaise) aussi.

Geneviève est une intrigante, soeur de Maison Rouge, vaguement royaliste et vaguement fidèle à son mari et manipule Maurice le lieutenant girouette et puceau pour arriver à ses fins. Quant à Maurice il pense avec sa bite, même si Alexandre Dumas exclut toute implication sexuelle dans l'amour qu'il éprouve pour une inconnue rencontrée en pleine nuit sans lumière à l'image de la marchande de crayons de Bourvil et du dindon de Feydeau (Ah! Lucienne, Lucienne …)

Pour le coup se substituer à Maurice est une bien curieuse démarche dans la mesure où le personnage du roman n'est jamais sympathique surtout dans son insistance à courtiser la femme d'un autre. Pierre Bayard est d'ailleurs constamment en désaccord avec lui (même !) jusqu'à lui rendre son prénom lorsque Geneviève s'offre en échange de la liberté de Maison Rouge. Il ne veut pas d'elle à ce prix (Noblesse de coeur de courte durée comme le montrera la suite).

Gloser agréablement sur l'éthique de principe, l'éthique de conséquence et l'éthique de loyauté me parait à la fois intéressant et... hors sujet. Et ce temps perdu à digresser n'arrange les affaires de personnes. Geneviève se donne finalement à Maurice. C'est à ce moment-là que Pierre Bayard se substitue à lui et se permet quelques phrases allusives sur la qualité de leurs premières étreintes et de l"'enhardissement" progressif de la belle sous les draps.(Jésus, Marie, Joseph !)

Une fois l'acte accompli et réitéré pendant quelques jours, le fantasme assouvi par personnage interposé, il n'existe plus aucune raison de sauver Geneviève d'elle-même, de son amant et de la guillotine. Et le destin s'accomplit.

A tout prendre j'aurais fait le choix de me substituer à Maison Rouge, seul personnage honnête de l'histoire et qui eut peut être, à défaut de sauver la Reine, sauvé Geneviève, sa propre soeur. Averti de l'odieux marché passé avec son mari, il le provoque en duel et lui subtilise le précieux laisser passer.
A l'évidence seul Maison Rouge pouvait forcer sa soeur à vivre.
Sans l'aide de Pierre Bayard,qui a choisi le mauvais rôle, le personnage éponyme se suicide bêtement en amoureux frustré et dans l'indifférence..

Un bien beau sujet qui entre dans la catégorie « comment améliorer les livres ratés ».







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