2 heures du matin, je m'éveille en sursaut, baigné de sueur, en proie à une angoisse inexprimable qui me broie le torse. Presque en même temps ma femme ouvre les yeux. Elle a senti ma peur, elle comprend tout de suite ce que je crains.
A cet instant, Michel (ndr : le fils de Belline) est sur l'autoroute, à bord de sa DS qui a parcouru déjà une centaine de kilomètres. Rien encore ne le menace. Non, rien, sauf cette fatalité qu'il a pressentie ; mais il ignore où, quand et comment elle l'atteindra.
"Je sais que je mourrai jeune...". "Dix ans, je ne crois pas que j'y arriverai..."
J'ai la certitude que je suis impuissant à conjurer le sort. Il ne nous reste, à ma femme et moi, que l'espoir et la prière. [...]
A 6 heures du matin, le policier qui sonne à la porte ne nous apprend rien que nous ne sachions déjà. Michel a été transporté à l'hôpital de Garches. Il est en réanimation ; de l'espoir ? Seules les médecins en ont ; moi hélas ! non. Tout a été dit au moment du choc. J'ai raison. Au bout de trois jours, Michel nous quitte sans avoir repris connaissance.
Homme de la nature et force de la nature : c'est là tout Mességué. Pendant des années il fut décrié, aujourd'hui il nous faut bien reconnaître qu'il avait raison et que la phytothérapie est une science d'avenir. A sa façon, mon ami Maurice Mességué est un prophète.
Elle qui était venue dans ses vêtements les plus seyants, pour ne pas dire les plus sexy, repartit assez surprise de ma froideur et de mon sérieux. Sur le seuil de ma porte, elle se retourna encore pour me dire:
- Je vous remercie, monsieur Belline, de vos conseils. Je dirais à mes amis que vous êtes un maître.
Savez-vous qu'en Chine quand il s'agissait de procéder à une cérémonie de désenvoûtement, les prêtres obligeaient toute la population du villageà sortir dans la campagne et lui faisant brûler des bâtons ?
Elle me quitta dans un nuage de parfum coûteux. De toute façon, je n'avais pas à m'inquiéter sur son sort. Elle portait ce jour-là un vison et un diamant qui me prouvaient que ses clients - les maniaques et les autres - l'aidaient à remonter la pente.
Le journaliste reprit alors:
- C'est extraordinaire ce que vous venez de me dire car c'est exactement ce qui m'est arrivé. Je suis entré chez un brocanteur à qui j'ai acheté un tableau. Je croyais que c'était un Rembrandt et je l'ai fait expertiser; ce n'était, hélas ! qu'une mauvaise copie (Et il ajouta en rian) mais vous vous êtes trompé quand même; l'expert, je ne l'ai pas payé, c'était un ami.
La dame shizophrène n'était pas shizophrène, mais voyante.