Citations sur Au pays (47)
Mohamed osa dire de sa voix douce : mais si on ne se critique pas, on n'avancera jamais.
« Mohamed ne savait plus si le racisme était suscité par la couleur de la peau ou l’extrême pauvreté. » (p. 13)
...Aujourd'hui l'Algérie est très riche, j'ai vu ça à la télé, ils ont du pétrole et du gaz, ils ont des trésors sous la terre qui les nourriront durant des siècles, et pourtant des Algériens émigrent, ils sont de plus en plus nombreux à venir s'installer en France, c'est malheureux , un pays si riche et un peuple si pauvre !
Mes enfants ne me disent jamais « jtème », moi non plus d’ailleurs, ce ne sont pas des choses qu’on se dit dans la famille, une fois une secrétaire à l’usine m’a rendu u document mal rempli, je lui ai dit: pourtant c’est lui qui l’a rempli, j’ai confiance en lui; elle m’a dit: c’est qui lui? Ma fille cadette! La femme était choquée, mais comment lui expliquer que chez nous c’est comme ça, on ne parle pas de nos filles ni de leur mère, c’est une question de respect, mais elle n’a pas compris. Je n’ai jamais fait de compliments à mes filles…
Il s'était demandé pourquoi, dans l'esprit des enfants d'aujourd'hui, la bonté était signe de faiblesse. Fallait-il être dur, autoritaire et injuste pour être fort, pour être respecté, admiré ?
La journée était divisée selon les cinq prières. La montre c’était le soleil et son ombre. Cependant il lui arrivait de sentir tout son poids, d’imaginer le temps comme un fardeau sur le dos d’un vieil homme marchant avec difficulté. Pour tuer le temps, il donnait des coups de pied dans le fardeau imaginaire ; il labourait la terre avec une lenteur particulière. […] Il ne comprenait pas pourquoi on disait : le temps c’est de l’argent. A ce compte-là, il se considérait riche. Un jour, son cousin, celui qui boitait depuis un accident de travail en Belgique, lui proposa d’ouvrir une boutique sur la route de Marrakech pour vendre du temps. Comment tu vas faire ? C’est simple, je vends aux touristes le temps qui est trop abondant chez nous ; je les connais bien, je les ai fréquentés en Europe, je leur dirai : venez chez nous, vous aurez beaucoup de temps devant vous, il n’y a rien à faire, vous vous reposerez, vous ne regarderez plus la montre et, à la fin de la journée, vous vous demanderez où est passé le temps.
"Arrêter de travailler c'est apprendre à s'ennuyer gentiment, apprendre à ne rien faire sans tomber dans la tristesse."
"La famille s’était dispersée. Il se consolait en se disant : c’est ça la vie, on fait des enfants, on les gâte puis un jour ils s’en vont, à peine s’il se souviennent de nous, mais que faire, si nous étions au village, ils seraient tous là, sous mes yeux, là, nous sommes dans un pays impitoyable, il faut lutter tout le temps pour vivre, pour respirer, pour dormir en paix. "
"Vieux con!" Cette insulte il l'avait souvent entendue autour de lui, mais ce fut la première fois qu'elle lui était adressée. Il se dit tout en marchant la tête baissée en direction de son immeuble : ai-je la gueule d'un vieux con? C'est quoi un vieux con? ça doit être un pauvre type, un gars qui ne se bat pas, qui subit la vie, et le jour où il décide de ne pas répéter les mêmes gestes, il rencontre une violence d'un autre genre; nulle part il n'a trouvé sa place.
"Il était réglé comme une horloge de précision. Jamais en faute, jamais en colère. Il était un ouvrier modèle."