Que Ben Jelloun ait attendu cinquante ans pour nous livrer ce récit n'est pas l'un des moindres attraits de son livre. On savait le régime alaouite peu amène (le mot est faible) sur le sort réservés à ses opposants. L'auteur nous en apporte une preuve supplémentaire en décrivant les humiliations subies par une troupe d'étudiants, enrôlés après une manifestation pacifique dans un pseudo service militaire. On imagine le traumatisme, resté bien présent après plusieurs décennies. le style est clair, clinique, les phrases sont composées "à l'os", ce qui ajoute à la force du témoignage. Un document nécessaire, à coup sûr.
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C'est un récit autobiographique très fort, quelquefois éprouvant car la violence et la cruauté sont omniprésentes. L'auteur n'occulte aucun détail, décrit avec précision les mauvais traitements infligés aux « punis » par les militaires, en particulier les gradés, qui sont de dangereux psychopathes.
Il relate cette époque où personne, au Maroc, n'est véritablement en sécurité, et où, à tout moment, un citoyen peut disparaître. Pour lui, le camp où ils sont emmenés sont des « territoires de l'absurde » qui ne laissent place à aucune pensée, aucune idée, et plus encore, aucune amitié, et où le mal règne en maître.
Pour survivre, le narrateur se réfugie dans la poésie et les souvenirs. A sa libération, il perd un temps ses repères mais rapidement reprend ses études de philosophie et se met à écrire. Ainsi, il parvient à se reconstruire, en gardant au fond de lui « toutes ses illusions de jeune homme, et sa tendresse pour l'humanité ».
Il lui aura malgré tout fallu plus de cinquante années pour relater ces pénibles souvenirs.
Un très beau livre.
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livre court mais dense. l'armée marocaine années 60 on y est. L'avilissement, la torture, la soumission, l'injustice. Temoignage plutot que roman, très bien documenté, texte à découvrir.
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Un témoignage intéressant sur un pan de l'histoire marocaine que je ne connaissais pas.
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L'auteur se souvient que, dans les années 60, et pour avoir participé à une manifestation étudiante hostile au pouvoir marocain, il a été emprisonné durant 18 mois, avec une petite centaine de ses pairs turbulents; ceci pour être "rééduqué", en subissant des sévices humiliants, pénibles, sensés redresser une jeunesse perdue. On n'est pas vraiment surpris de cela: qui pourrait croire que le régime du roi du Maroc était une démocratie, où l'on pouvait manifester sans risques? Et le régime auquel était soumis ces jeunes égarés, s'il était un régime de type militaire, violent, stupide, n'était finalement pas si éloigné de bien des traitements infligés là-bas et ailleurs à d'autres, notamment ceux qui suivaient, de gré ou de force, une formation militaire. Autrement dit, si l'on compatit aux malheurs qu'a connus notre malheureux auteur, on n'est quand même pas passionné par tout cela. Et est-ce que cet épisode aura facilité l'auteur dans sa démarche de futur écrivain, cette épreuve aura-t'il enrichi notre homme, l'aura-t'il finalement éclairé quant à la connaissance de la vie, des hommes? C'est probable, à quelque chose malheur étant bon. Une chance pour nous lecteurs de ce livre assez peu convaincant: cela fait à peine 150 pages. C'est largement suffisant.
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