L'aventure intérieure lui sembla dès lors la seule à légitimer la vie d'homme libre. Et la recherche de l'au-delà des apparences, la seule qui ne soit assujettie à aucune pression extérieure.
La première phrase :
Le train fonçait dans la nuit de novembre. Il jeta un coup d'oeil sur sa montre : comme d'habitude, le Rome express avait pris deux heures de retard sur le trajet italien.
La dernière phrase :
On n'échappe pas au Prophète, béni soit son nom.
En entrant dans le minuscule bureau de Leeland, Nil s'excusa de son retard :
- Pardonne-moi, j'ai flâné sur la place...
Il s'assit, déposa sa sacoche contre le pied de la chaise, et sourit.
- J'ai réuni là-dedans mes notes les plus précieuses. Il faut que je te montre mes conclusions - elles sont provisoires, mais tu commenceras à comprendre...
L' interrompant d'un geste, Leeland griffonna quelques mots sur un morceau de papier, et le tendit à Nil en plaçant l'index sur ses lèvres. Surpris, le Français prit le papier, et y jeta un coup d'oeil :
'Nous sommes écoutés. Ne dis rien, je t'expliquerai. Pas ici.'
Il leva vers Leeland des yeux stupéfaits. Sur un ton volubile, celui-ci enchaîna :
- Alors, bien installé à San Girolamo ? Hier nous avons eu un coup de Sirocca, tu n'as pas trop souffert ?
- Euh... si, j'ai eu mal au crâne toute la soirée. Qu'est-ce que...
- Il est inutile que nous retournions aujourd'hui à la réserve de la Vaticane : je voudrais te montrer ce que j'ai dans mon ordinateur, tu verras le travail déjà accompli.
Et le père Nil raconta. De cette aventure, il était l'acteur principal : pourtant il ne me parla pas de lui, mais d'un homme dont il avait découvert la trace dans l'Histoire, un Judéen du Ier siècle. Et derrière cet homme, je perçus l'ombre lumineuse d'un autre encore, dont il me dit peu de choses mais qui expliquait la clarté de son regard limpide.
Ouverture
Mais les nazôréens vont connaître une postérité inattendue : quiconque lit le Coran en se référant à l'original arabe s'aperçoit que dans nos traductions françaises il y est souvent question des "chrétiens" : mais c'est naz'ra que l'auteur du Coran a écrit, nazôréen. Et c'est dans leur conception de Jésus qu'il puise pour exposer sa compréhension si particulière du christianisme. Nous devons donc au Coran de posséder une documentation relativement étendue sur la façon dont les nazoréens du VIIe siècle avaient fait évoluer l'enseignement du treizième apôtre sur Jésus.
Dans Le Secret du treizième apôtre; j'ai tenté de mettre en scène cette histoire si troublée (et si pleine de trous), depuis la disparition du disciple bien-aimée à la fin du quatrième Evangile, jusqu'à la réapparition des nazoréens dans le texte du Coran.
Vous ne devez jamais craindre la vérité
Une fois de retour dans mon monastère, j'enfouirai le résultat de mes recherches dans le silence du cloître. Sauf un, que je veux publier sans tarder : le rôle joué par les nazoréens dans la naissance du Coran.
Le cardinal connaissait bien l'âme humaine : il suffisait de savoir trouver la blessure secrète, et d'appuyer dessus.
Un peu après l'an 2000, un jeune Alexandrin nommé Origène commença à fréquenter assidument la bibliothèque. Chercheur infatigable, il était passionné par la personne de Jésus. Sa mémoire était prodigieuse.
Il était conscient de s'aventurer dans une direction interdite, depuis toujours, aux catholiques. (...)
Etait-il possible que l'étude puisse devenir dangereuse ? (...)
Livré à lui-mêle dans l'immense solitude d'un monastère, une sensation inconnue l'envahissait : la peur.