Pilate a le triste privilège d'être évoqué à chaque récitation du Credo « Jésus a souffert sous Ponce Pilate, a été crucifié, est mort et a été enseveli… » et son cas est grave car il est resté sourd aux conseils de son épouse et a commis l'inverse de ce qu'elle suggérait !
Que sait-on, historiquement, de lui ?
Wikipédia résume : « Ponce Pilate, né à un endroit inconnu, vraisemblablement vers la fin du Ier siècle av. J.-C., est un citoyen romain membre de la classe équestre qui, à partir de 26, sous le règne de l'empereur Tibère, et durant dix à onze ans, a occupé la charge de préfet de Judée. Il est renvoyé à Rome à la fin de 36 ou au début de 37, pour une raison inconnue, par le proconsul de Syrie Lucius Vitellius, afin de s'expliquer devant l'empereur. Après son arrivée à Rome, l'histoire perd sa trace.
Il est essentiellement connu pour avoir, selon les Évangiles, ordonné à l'issue du procès de Jésus l'exécution et le crucifiement de ce prédicateur juif, ce qui a conféré une notoriété exceptionnelle à ce simple gouverneur de province.
La pauvreté de sources historiques a permis le développement de légendes et de traditions locales à son sujet, telles celles qui veulent qu'il ait été exilé, qu'il ait fini martyr à Rome ou encore qu'il se soit suicidé en Gaule, à Lyon ou à Vienne.
L'Église éthiopienne orthodoxe le vénère comme saint et martyr avec sa femme, tandis que les Églises grecques orthodoxes honorent seulement celle qui, selon la tradition chrétienne, aurait été son épouse sous le nom de Claudia Procula. »
L'historien
Flavius Josèphe et le philosophe
Philon d'Alexandrie (
Flavius Josèphe, Antiquités juives 18, 55-62 ;
La guerre des Juifs 2, 169-177 ; Philon, Légation à Caïus, 299-306) évoquent l'occupation brutale de la Judée et « sa vénalité, sa violence, ses vols, ses assauts, sa conduite abusive, ses fréquentes exécutions des prisonniers qui n'avaient pas été jugés, et sa férocité sans bornes ».
Flavius Josèphe décrit la violente répression des Samaritains au mont Garizim, vers 35.
L'évangile évoque sa lâcheté : Pilate prit de l'eau et se lava les mains en présence de la foule, en disant : « Je suis innocent de tout ce sang. Cela vous regarde (Mt 27, 24) ».
L'histoire ne connait rien de Pilate avant 26 et après 37 ce qui laisse le champ libre au talent des romanciers et permet à
Anne Bernet de nous offrir les «
Mémoires de Ponce Pilate ». Elle imagine ainsi Pilate commençant sa carrière dans les légions envoyées pacifier la rive orientale du Rhin, légions écrasées par les germains, laissant quasi mort notre homme sauvé par son ordonnance devenu désormais inséparable.
Pilate épouse Claudia Procula, de noble ascendance, ce qui lui vaut une promotion rapide en Judée, exil qui l'éloigne de Rome et l'abrite de ses intrigues, mais le plonge dans un territoire troublé par des résistants de divers courants qui profitent du moindre incident pour susciter des révoltes.
En l'an 33 survient « l'incident Jésus » qui déconcerte Pilate manipulé par le Temple et aboutit à la crucifixion de Jésus, puis après divers troubles au rappel de Pilate à Rome en 36-37.
Commence alors la moitié la plus intéressante, à mes yeux, du roman qui révèle les vocations de Pilate, son ordonnance, son épouse, leur fille Pontia et leur gendre. Etapes en Gaule et à Rome, et conversions successives des uns et des autres …
Dénouement inspiré de Ben Hur (Lewis Wallace) et de la veine de "Fabiola ou l'Eglise des Catacombes" publié en 1854 par le Cardinal Nicolas Wiseman ou de Callista de
John Henry Newman publié en 1855. Roman très moderne qui aborde des questions occultées au XIX siècle dont l'homosexualité revendiquée du gendre de Pilate.
Ces «
Mémoires de Ponce Pilate » m'ont passionné. C'est un livre d'histoire sur la Rome des Césars et la Judée. C'est une évocation de Jésus et des débuts du Christianisme. C'est une histoire d'amour entre le préfet et son épouse qui, comme toujours, finit par avoir le dernier mot et convertit son mari.
Seul petit bémol, pourquoi baptiser Petros, celui qui depuis vingt siècles est connu comme Saint Pierre, et écrire bar Abbas et non Barrabas ? Ces innovations sont déconcertantes, ralentissent la lecture et brouillent la mémoire.
Ces «
Mémoires de Ponce Pilate » sont une lecture inspirante en période de carême et rappellent que ce préfet n'est qu'un maillon de la tragédie de la crucifixion et que son admirable épouse mérite d'être vénérée.