Shoki, chasseur de démons

Nous découvrons donc Umi, une jeune femme probablement au Lycée, qui s'en va avec son petit frère Den, potentiellement autiste non verbal (ce n'est pas dit noir sur blanc), passer les vacances chez leur Grand-Mère. Umi souffre de harcèlement scolaire, elle souffre du manque d'attention de ses parents entièrement dédiés à son frère handicapé, elle souffre d'anxiété chronique et de dépression. Une fois arrivés chez leur Grand-Mère, qui se trouve être une miko (sorte de prêtresse), Umi se retrouve à devoir faire équipe avec Shoki, un semi-Yokai particulièrement ronchon pour sauver son frère kidnappé, voire plus.

J'avoue que j'ai un peu grimacé à l'introduction du personnage de Den. Etant moi-même handi, le trope du perso handi qui est un fardeau, je ne suis pas fan. Mais j'étais prête à accorder le bénéfice du doute à l'autrice : c'est le point de vue de Umi, et effectivement, certains enfants peuvent se sentir mis dans l'ombre d'un'e adelphe à besoins particuliers. le vrai problème que j'ai avec Den, c'est que j'ai eu l'impression que ce n'était pas un personnage, mais un prétexte, ou plus précisément un McGuffin. Den ne sert qu'à propulser sa soeur à l'aventure, mais on ne le verra quasiment jamais, pas plus qu'on ne verra évoluer sa relation avec sa soeur. Il n'a pas d'arc narratif à lui, il ne sert que d'élément de caractérisation d'un autre personnage. Ca m'a un peu rappelé le trope de la « femme dans le frigo« .

En fait, dans tout le roman, certaines choses sont expliquées ou racontées, sans qu'elles ne soient montrées, et donc sans qu'elles ne prennent vie. On ne voit pas la relation des deux personnages avec leurs parents, notamment (alors que ça aurait pu être intéressant, ne serait-ce que pour caractériser Umi). On va passer beaucoup de temps sur le harcèlement scolaire, avec des passages souvent répétitifs, alors que la situation de Umi est un tout, pas seulement dû à ce harcèlement. de même, l'évolution de Umi ou l'évolution de sa relation avec Shoki se passent à mon avis trop vite pour que ce soit convaincant. L'aventure se déroule sur 2 jours et il n'y a pas tellement d'occasions pour eux de surmonter leurs démons et d'apprendre nouer des liens.

J'ai aussi trouvé Umi assez gamine/immature par moments dans ses réactions, et surtout j'ai tiqué sur le « Couché » qu'elle balance de nulle part à Shoki. On a le même running gag dans le manga Inuyasha, dont je parlerai probablement un jour, et les deux héroïnes ont le même âge. Sauf que dans le manga, ça s'explique parce que Inuyasha est un semi-yokai chien, donc on comprend d'emblée d'où sort le « Assis ! » que Kagume lui lance. Là, Shoki ne ressemble absolument pas à un chien, donc je ne comprends pas trop. C'est peut-être une référence à Inuyasha (je dis bien : peut-être, sans aucune ironie), mais si c'est réellement une référence, j'aurais préféré qu'elle soit assumée, d'autant qu'il y a des références à d'autres choses dans le roman : si Umi avait été fan d'Inuyasha, par exemple, j'aurais tout à fait compris qu'elle sorte instinctivement un « Couché !/Assis ! » devant une situation un peu similaire.

Après, je n'ai pas passé un mauvais moment. le roman se lit bien, la thématique du harcèlement, des blessures psychologiques, du parallèle avec le kintsugi et le personnage de Umi sont plutôt intéressants, surtout pour un jeune lectorat. J'ai aussi bien aimé le personnage de Makoto et sa relation avec Yohiki. Les néophytes pourront être un peu perdus par certains termes japonais qui ne sont pas expliqués, mais je ne pense pas que ce soit un frein à la compréhension. En fait, je pense que le livre s'adresse plutôt à une cible jeunesse, ou à la limite young-adult, mais en ce qui me concerne, il m'a manqué trop de choses pour vraiment pouvoir me laisser embarquer.

Par contre, un point qui n'a rien à voir avec l'histoire, mais ça m'a sauté aux yeux assez vite : les coquilles. Trop pour un roman publié en ME. Et certaines sont vraiment très visibles, du genre ponctuation qui pop aléatoirement, des mots isolés qui se promènent, vestiges oubliés de corrections avec des phrases curieusement répétées. Ca ne donne pas forcément bonne impression d'entrée, et mine de rien, ça a peut-être un peu joué sur mon appréciation globale.

Bilan

Un roman sur lequel j'avais peut-être trop d'attentes, trop jeunesse et pas assez étoffé à mon goût notamment au niveau des personnages, je n'étais sans doute pas la cible visée. Je regrette quand même le nombre de coquilles trop important, qui m'a parfois sortie de la lecture.
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Fans de Ghibli, de mangas et de mythes japonais, foncez sans vous posez de question. Les autres, restez un instant que je vous explique pourquoi ce livre vaut le détour.
Umi est une adolescente aux failles multiples. Dépressive, harcelée, perdue, elle doit tenter de rassembler les morceaux de celle qu'elle était autrefois pour se reconstruire.
Pour sauver son petit frère capturé par une terrible sorcière, elle va devoir faire face à ses peurs, ses cauchemars, ses amours (fraternels, amicaux, amoureux ?) refoulés. Elle plonge donc dans un rêve, côtoient des créatures toutes aussi fragiles qu'elles. Elle réapprend à sourire, à s'accepter, à être elle même.
Suivre Umi grandir tout le long du roman est un véritable plaisir. Sa personne est un réalisme saisissant et, malgré ma différence d'âge avec elle, je suis parvenue à m'attacher à cette jeune fille sans peine. Toutes les personnes qui ont un jour subi du harcèlement, se sont posées trop de questions peuvent se reconnaître en elle.
Umi n'est pas parfaite. Elle me rappelle un peu ces tasses de porcelaine qui chantent quand on passe le doigt sur leur rebord, mais qui se brisent à la moindre chute. Pourtant, lorsqu'on rassemble les morceaux, leur mélodie n'en devient que plus belle, plus unique. Sa résilience est fabuleuse.
C'est un livre que j'aurais aimé lire adolescente. Il apprendre que, oui, même si l'on ne va pas bien, que tout semble perdu, on peut apprendre de ses erreurs, aller de l'avant et se (re)construire.

Je connaissais l'autrice pour ses romans adultes et sombres, j'ai ici découvert sa plume sous un autre jour : celle du roman "young adult". Et c'est réussi !
Les thématiques propres à l'adolescence (le harcèlement scolaire, notamment) se mêlent ici à une revisite du conte de Shoki, dans une quête trépidante qui nous fait voyager de notre monde à celui des yokais.
Pour résumer, une jolie revisite de conte où se mêlent onirisme et aventure, folklore japonais et thématiques actuelles fortes, avec un petit côté Ghibli.
À noter, de nombreux termes japonais sont employés dans le texte, ce qui permet une immersion totale, mais n'étant pas familière avec ce vocabulaire, cela a un peu ralenti ma lecture au début. Un lexique aurait été appréciable !