-Votre frère a-t-il un problème? Il me semble bien nerveux et rit si fort...
-Non. Il est simplement surmené. Il travaille beaucoup comme vous le savez.
-Il m'a l'air d'un abruti qui travaille surtout à sa perte.
-C'est à nous, les femmes, de prendre notre destin et celui de notre pays entre nos mains, dans les écoles, dans les hôpitaux, sur les barricades !
-On aura tout entendu ! Et pourquoi pas au gouvernement, tant que vous y êtes ! On vous a déjà laissé les cuisines et les bordels, mais il vous faut toujours plus, n'est-ce pas?
-il y a dix ans, monsieur le président, vous appeliez le coup d’état qui a porté l’empereur au pouvoir « une opération de police un peu rude »....Comment qualifiez-vous cette expédition mexicaine que ce même empereur ordonne dans l’unique but de plaire à ses amis banquiers ?
-Parce que tu crois vraiment que les patrons vont nous laisser prendre un peu de bon temps?
C’est facile pour toi, camarade curé, ton patron, on ne l'entend pas beaucoup râler...
-il ne consomme que des drogues ou aussi des filles?
-les deux....mais ses faveurs vont à l’opium plus souvent qu'à nous.
Qu'est-ce qu'une vie lorsque toute une ville se bâtît ?....
- A quoi bon faire fortune si ce n'est pour la transmettre à ses enfants... à sa famille...
- Mais, père, je suis là, moi! Et vos petites-filles...
- Evidemment que tu es là. Tu ne manques pas de me le rappeler chaque jour que Dieu me fait encore subir! Tu n'as rien d'un Saint-Hubert, mon pauvre garçon. Seulement les défauts de ta mère: cette mollesse de corps et d'esprit qui m'a toujours été insupportable. Quant à tes filles, que veux-tu faire d'une telle descendance?... Même pas fichu d'engendrer un mâle...
Je ne leur ai jamais rien caché de mon passé ni de qui je suis réellement. Ils me font confiance car ils savent que j'ai choisi les hommes plutôt que l'argent.
- Vous ne viendrez pas avec nous?
- Non. J'ai un combat à mener. Une cause à défendre avec les communards, qui va changer la condition des hommes et des femmes de cette ville, et qui, je l'espère, s'étendra à tout le pays... Si nous sortons victorieux de ce combat, je vous retrouverai, je vous le promets...
Il n'y a pas que votre vie qui se termine: c'est tout votre monde qui s'écroule, père. La Commune va mettre en place un nouvel ordre, une nouvelle politique où l'argent se sera plus le roi mais juste un outil... Votre race de banquiers va s'éteindre et nous l'aiderons s'il le faut. Ainsi le fruit du travail reviendra d'abord aux travailleurs. Et tout cet argent que vous avez si vilainement amassé ne servira qu'à vous étouffer dans votre tombe! A présent, je peux vous laisser mourir en paix...