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Critique de ODP31


ODP31
08 novembre 2020
Déracinés…des elles.
D'ordinaire, je fuis les sagas familiales comme les téléfilms de Noël. En littérature, je suis plutôt amateur des bûcherons d'arbres généalogiques, de ceux qui bouturent les champs du voisin. Les soirées diapos pour admirer les photos jaunies d'ancêtres à moustache ne me passionnent guère. C'est comme cela, je n'ai pas la nostalgie génétique.
La fresque de Miguel Bonnefoy vient de me réconcilier avec le genre. Il conte de façon très poétique, dans un style qui flirte parfois avec un onirisme exotique qui n'est pas sans rappeler « Cent ans de solitude », le destin tourmenté d'une famille de pigeons voyageurs, d'aventuriers autant attachés à leur terre d'accueil qu'à leur patrie.
L'histoire débute vers 1870, dans le Jura. Un vigneron, ruiné par le phylloxéra, puceron alcoolique, quitte la France pour la Californie, un pied de vigne comme seul bagage. Comme il vient de Lons-le-Saunier, il est rebaptisé Lonsonier par le service d'immigration qui le débarque au Chili. Heureusement qu'il n'était pas originaire d'Arnac La Poste, de Bourg-Madame ou de Crotenay. Because fièvre typhoïde, ce n'est pas la Californie de Julien Clerc qui l'accueille, c'et un Chili sin Carne mais avec une terre accueillante.
La lignée des Lonsonier est donc née d'un double malentendu, ce qui me l'a rendu tout de suite bien sympathique.
L'auteur nous raconte ensuite le destin des trois générations suivantes en moins de 250 pages. Un romancier américain nous en aurait fait un pavé de 1000 pages, un anglais se serait lancé dans une trilogie et un mormon aurait élaboré une arborescence aux milles ramifications.
Le premier fils, Lazare, va s'engager et combattre en France avec ses deux frères lors de la première guerre mondiale. Il va y laisser un poumon, beaucoup d'illusions et reviendra presque seul, en compagnie du fantôme d'un soldat allemand.
La fille de Lazare, Margot, rêve d'aviation et partira à Londres pour la seconde guerre mondiale. A son retour, les ailes brisées, elle mettra au monde, IIlario, partisan du président Salvatore Allende, qui connaîtra les geôles chiliennes du général Pinochet, comme le père chilien de l'auteur.
Les personnages de Miguel Bonnefoy sont flamboyants, hommes et femmes égaux dans l'audace, le courage, la mélancolie et ce récit parlera aux déracinés de tous les continents, aux nostalgiques des terres d'origine. L'esprit de clocher à l'échelle planétaire.
Si son précédent roman, « Sucre noir », était une friandise, irrésistible chasse aux trésors à la Stevenson, « Héritage » reste un roman d'aventure, mais mariné dans l'exotisme magique des auteurs sud-américains.
Un roman bilangue, qui raconte des époques sombres de l'histoire mais dont la prose jubilatoire colore les vieux albums photos.
Un très bon cépage.
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