UTANAPISHTIM : L'être humain, quel qu'il soit, est fauché comme un roseau de cannaie. Bâtissons-nous des maisons pour toujours ? Scellons-nous des engagements pour toujours ? Partage-t-on un patrimoine pour toujours ? La haine se maintient-elle ici-bas pour toujours ? Le fleuve monte-t-il en crue pour toujours ?
GILGAMESH : Maintenant que j'ai vu ton visage, tavernière, puissé-je ne pas voir en face celui de la mort, que je redoute tant.
LA TAVERNIÈRE : Où cours-tu ainsi, Gilgamesh ? La vie-sans-fin que tu poursuis, tu ne la trouveras pas. Lorsque les dieux ont créé les hommes, ils leur ont légué la mort, gardant pour eux seuls l'immortalité. Toi, Gilgamesh, remplis-toi le ventre, chaque jour, chaque nuit, réjouis-toi. Chaque jour, chaque nuit, fais la fête, danse et joue de la musique. Baigne-toi, lave-toi, revêts des habits propres. Contemple l'enfant qui te tient par la main et rends heureuse la femme blottie contre toi car telle est l'unique perspective réservée aux hommes.