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Critique de BazaR


Je suis un peu embêté pour écrire un avis.
Il faut dire qu'il arrive après le superbe billet de ma co-lectrice de LC Tatooa, et qu'une fois qu'on a lu ça, on se dit qu'il n'y a rien à ajouter.

Que dire donc ? Peut-être commencer par un ressenti relatif. Je suis loin d'avoir fait le tour de l'oeuvre de Pierre Bordage, mais cette trilogie restera probablement parmi mes préférées. Elle est unique du fait de l'exploitation du fond historique – l'auteur déployant en général ses thèmes invariants dans un cadre SF – et la mise en scène crue de la brutalité humaine, pour insoutenable qu'elle soit, est peut-être encore plus marquante que dans la trilogie des Prophéties ou dans Abzalon, justement parce qu'elle se réfère à des événements ayant existé.

Le rappel des horreurs perpétrées par les soldats de la République durant la guerre de Vendée fait de ce roman un ouvrage qui devrait être étudié par les élèves, de la même manière que l'on étudie la Shoah. Il est tellement facile d'oublier de balayer devant sa porte. de la Révolution, on préfère nous enseigner que l'on a arraché à une bande minoritaire de nobliaux privilégiés les Droits de l'Homme, la liberté, l'égalité et la fraternité. On évite d'insister sur le fait que cela s'est réalisé dans un chaos sanglant, innommable. Les films les plus célèbres qui relatent la Terreur sont à cent lieues de l'horreur réelle. En lisant Bordage, on sait qu'on a affaire à quelque chose d'aussi monstrueux que le régime des Khmers Rouges de Pol Pot. le régime de suspicion permanente où chacun avait peur d'être dénoncé et de finir en prison pour une parole en l'air, la bassesse humaine qui poussait n'importe qui à profiter des malheurs d'autrui – tels les habitants des abords du mur des fermiers généraux qui « offraient » le gite à un prix indécent à ceux qui n'avaient pas espoir de quitter la ville avant le couvre-feu. Plus terrible : le génocide – appelons un chat un chat – perpétré en Vendée, avec les formes s'il-vous-plaît : les noyades dans la Loire que je ne décrirai pas ici, les colonnes infernales qui grillaient les habitants – hommes, femmes et enfants – dans leurs églises.

Bien sûr, Pierre Bordage emballe ces faits dans une histoire toujours aussi magnifiquement contée. le réalisme de ses personnages, primaires ou secondaire, masculins ou féminins, force le respect. Et fidèle à son habitude, il offre à ses deux héros Émile et Cornuaud une chance de rédemption. Il s'agit de l'étincelle d'espoir que l'auteur aime ajouter dans ces récits pétris d'abjection, de la possibilité de désamorçage de l'enchainement de la violence. Ici cela ne profite qu'à peu d'êtres humains, laissant la République baigner dans son bouge de Terreur.

Au-delà du récit un peu plus fantasy que les tomes précédents, il faut lire ce livre presque comme un témoignage, un rappel de l'horreur, un peu comme on lit L'Homme qui mit fin à l'Histoire de Ken Liu. N'hésitez pas à vous lancer. C'est finalement le seul conseil que je peux donner.
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