Les devoirs de vacances

Cette célébrité-là, celle qui l'empêchait désormais de flâner en toute quiétude dans Paris aux heures creuses de la journée, de se perdre, seule, dans une salle de musée ou de cinéma, d'errer sans maquillage et en baskets, tout cela lui était désormais interdit. Partout, on la dévisageait , on lui jetait des coups d'œil qui se voulaient discrets, on chuchotait sur son passage des " si si, c'est elle, j'en suis sûr, mais non, tu vois bien qu'elle est beaucoup plus vieille " pour les moins délicats.

Je croyais que c'était la mode des vieux prénoms moches , chez les bobos.
- Mais, on n'est pas des bobos , enfin !
- Ah oui ? Et c'est quoi, alors, un bobo ? Ariane, je porte des chemises en jean à quarante ans, des baskets vintage, mes gosses ont des fringues aussi chères que les miennes et tu t'habilles en salopette pour aller bruncher le samedi midi. Si c'est pas être bobo, ça !

- Je crois que j'ai rêvé que je devenais Beyoncé, avait alors répondu avec sérieux la fillette ,(…)
Les gens chantaient ma musique, et moi j'avais de jolies tenues à paillettes, et des cheveux trop beaux qui bougeaient dans le vent. Tout le monde m'adorait. Et là, je me suis réveillée, trop déçue.

Mathilde connaissait ces moments, qu'elle exécrait parmi tous. Ceux où le couple se fissure, où l'on doit se dire les choses, décider de faire céder la jolie façade et gratter dessous pour vérifier si les fondations sont assez solides pour soutenir l'édifice où s'il vaut mieux abandonner.

C'est le monde qui nous entoure qui est fou, qui nous enferme tous dans des rôles que l'on s'impose trop jeune, sans plus s'interroger sur ce qu'on désire vraiment.

Lorsque vous pensez à lui, faites-le en souriant. Si vous devez évoquer son souvenir en pleurant, alors, oubliez-le à jamais.

La nature s'était lentement réveillée, à l'instar de chacun des acteurs de ce petit théatre de quadragénaires sidérés par tant de changements suvenus dans leurs existences après des années de douce banalité.

Mais, tu l aimes ?
Interloquées, Lucie et Mathilde regardèrent Eva comme si elle venait d emettre un pet en plein office religieux.

C'est fou comme parfois l'amitié se confond avec l'amour. Son pardon me rend à la vie. Je me sentais vraiment mal, sans elle.

En rémission de sa maladie depuis plus d'un an, la jeune femme rayonnait de bonheur. Ses cheveux avaient repoussé, elle avait repris du poids ainsi que ses études, embrassait la vie comme personne, refusait de se plaindre pour un rien, disait-elle, alors que d'autres étaient mis entre parenthèse du simple bonheur de voir le soleil se lever dans l'attente insoutenable du lancement de la nouvelle saison de leur vie.