Sérieusement ? Des limbes, des sangsues, et maintenant des chiens ? Quelle serait la prochaine surprise : des arbres carnivores ?
- Quel adorable petit coin de forêt ! ai-je soupiré.
- La mémoire est un socle. Quand on la perd, on perd aussi un peu l'équilibre.
Parfois, je me sens piégé. Je suis comme une plante qui a arrêté de pousser à mi-hauteur, bloquée entre deux âges. Je n'arrive plus à monter, mais je ne peux pas redescendre non plus. Pourtant, ma place n'est pas au milieu, je le sens...
- Alors nous sommes tous des limbes.
Pietro me renvoie un regard interrogateur.
- La montagne, c'est la vie; la forêt, c'est la mort, non? Et nous, nous sommes coincés au milieu. Tu n'as jamais l'impression qu'à trop vouloir survivre, on ne vit pas vraiment?
J'ai laissé mon regard filer jusqu'à la ligne verte de l'horizon. Le ciel était sans nuages; des oiseaux colorées s'élevaient au dessus de la canopée, leurs cris se mêlant aux bruits de la forêt à la manière d'un chœur délicat. Tout semblait si paisible ! A cet instant, il aurait été facile d'oublier les dangers qui se cachaient sous le couvert des grands arbres...
Les derniers rayons de soleil, perçant à travers les nuages, dessinaient des vagues lumineuses sur la canopée. Sous cette lumière rasante, la forêt devenait si belle que j'en oubliais de craindre ce qui se tapissait dans son ombre. Les tâches grises que dessinaient les ruines sur le parterre émeraude aiguisaient mon imagination, se transformant en symboles mystérieux. A quoi avaient bien pu ressembler ces villes, avant que l'épidémie ne les vide et que la nature ne reprenne ses droits ?
La voix des limbes avait cet effet sur la plupart des gens : elle leur retournait l'estomac et faisait monter en eux une tristesse infinie. J'avais entendu des Maîtres parler de chants des sirènes, évoquant une vieille légende oubliée. Certaines personnes n'étaient pas capable de les supporter...
Si le mush fonctionnait depuis tout ce temps
" La vie n'est pas un jeu, rien n'y est acquis "