Le fanatisme de l'Apocalypse

La vraie vie est dans l'intensité, non dans la durée. Tant qu'on aime, qu'on étudie, qu'on s'étonne, on est immortel jusqu'au dernier jour. (p.272).

Plus un peuple se civilise et réfrène ses pulsions meurtrières, plus il se délecte d'histoires atroces.

La sauvegarde du globe commande de dénigrer tout ce qui relève de l'esprit d'entreprise, du goût de la découverte, surtout en matière de science. Nous avons cessé d'admirer, nous ne savons que dénoncer, décrier, geindre. La faculté de s'enthousiasmer est en voie de dépérissement.

L'écologie a ceci d'inquiétant qu'elle s'insinue dans las aspects les plus intimes de la vie, habitudes alimentaires, vestimentaires, énergétiques pour mieux les contrôler. (p.213).

Les Français qui sont passés maîtres dans l'art de se surestimer, sont aussi les plus gros consommateurs de psychotropes et de tranquilisants en Europe. Le centre des villages n'est plus l'église ou la mairie mais la pharmacie. France doit rimer avec souffrance, avec déchéance, nous ne sommes jamais assez reconnus, aimés, choyés. La nation entière n'est qu'un immense syndicat de plaignants et nous donnons à nos moindres difficultés le caractère fantastique d'une tragédie. Nous sommes affligés d'une inaptitude à surmonter l'adversité qui accroît notre faiblesse.

C'est encore le philosophe allemand Hans Jonas qui a théorisé cette idée en inventant le concept de "repentir prévisionnel". L'excès de notre pouvoir technique et scientifique sur notre savoir nous contraint à imaginer tous les torts que nous pourrions infliger à nos descendants en vivant comme nous le faisons. Le raisonnement est à la fois brillant et tortueux : le mal que j'accomplirai à l'avenir compte plus que les maux sont souffre les hommes dans le présent. Jusqu'à le remords ne s'adressait qu'à des fautes déjà perpétrées ; avec Jonas il touche les péchés à commettre demain.

Notre train-train serait un désordre absolu qu'il faut conjuger. Le voilà élevé au rang d'un crime contre la vie : prendre un bain, consommer de la viande, mettre le chauffage à fond, conduire un 4 x 4 deviennent des actes hautement nuisibles dont les conséquences peuvent s'étendre jusqu'à la stratosphère. La duperie en l'occurence consite à conférer aux choses du quotidien, l'alimentation, le logement, le même potentiel de destruction que l'arme atomique.

Pour échapper à l'incertitude de l'histoire, on décrite la certitude du chaos.

Aujourd'hui les hommes se retrouvent dans l'enfer du développement dont ils doivent sortir sous peine de désintégrer leur planète.

Nous avons besoin de nouvelles frontières pour les franchir, pas de nouvelles prisons pour y croupir. L'humanité ne s'émancipera que par le haut. (p.275, fin du livre).