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Critique de Alfaric


Ce stand alone dans la série la sagesse des mythes est consacré à la figure d'Oedipe et force est de constater qu'il n'est pas facile de faire d'en le tour de manière cohérente en 48 pages tant les sources sont nombreuses, diverses, et sources d'interprétations différentes voire divergentes du personnage et de sa triste destinée : on met donc ici en avant les points communs plutôt que les différences...
L'Oracle de Delphes annonce à Oedipe prince de Corinthe qu'il tuera son père et épousera sa mère, et c'est donc pour échapper à son destin qu'il prend la route la haine au coeur et qu'il arrive à Thèbes ravagée par le Sphinx qui dévore ceux qui ne parviennent pas à résoudre ses énigmes... L'intelligence du jeune prince l'emporte sur celle de la créature, et c'est ainsi qu'il devient un héros et que le peuple et les aristocrates le poussent à épouse la reine veuve depuis peu... On serait dans la Quête du héros aux mille et un visages si le récit s'arrêtait là, mais il continue avec Oedipe roi souverain bienveillant et bien aimé de Thèbes une nouvelle fois frappée par une malédiction divine : selon l'Oracle de Delphes la maladie ravagera la cité et son peuple tant que ne sera pas retrouvé et châtié le meurtrier de Laïos le précédent roi... En roi juste et bon, Oedipe s'attelle à la tâche pour découvrir qu'il a tué son père biologique, épousé sa mère biologique, et donc que ses enfants Étéocle, Polynice, Antigone et Ismène sont aussi ses frères et ses soeurs...
C'est là que les versions divergent, car si le plus souvent Oedipe se crève les yeux et si Jocaste se pend, les suites sont parfois différentes. Ici Oedipe prend la route avec sa fille Antigone jusqu'à sa rencontre avec Thésée qui est le témoin de sa triste fin, les Érinyes l'emmenant vivant aux enfers pour le châtier cruellement ou mettre fin à son calvaire... (et on pourra lire la suite de la tragédie dans l'album consacrée à la figure d'Antigone).
C'est un très honnête adaptation du mythe, et les graphismes de Diego Oddi et Ruby sont plutôt jolis avec des couleurs chaudes qui soulignent les moments clés du récit consacrés à l'irruption du fantastique dans à la belle époque de Mario Bava ! (même si c'est une bizarre que Jocaste ne vieillisse pas et qu'au final sa fille Antigone fasse plus vieille qu'elle)


Alors ce coup-ci quelles sont les conneries proféré par Luc Ferry, bobo-hipster ayant naguère sévi aux ministères de l'éducation, de la jeunesse et de la recherche ? Il commence par du défonçage de porte ouverte voire par du combat contre des moulins à vent en pourfendant les travaux de Sigmund Freud (que Clotide Bruneau se fait une joie de mettre en scène dans une planche de la BD juste pour faire la nique à Luc Ferry ^^) : quelle surprise, les Grecs du Ier millénaire avec J.-C. ne pensait pas de la même manière qu'un Viennois du XXe siècle... Ensuite il reprend les travaux de Jean-Pierre Vernant mais je ne suis pas sûr qu'il ait la sagesse nécessaire pour bien les comprendre : le théâtre met en scène à la fois le libre arbitre de l'homme mais l'inéluctabilité de son destin car chacun doit affronter les conséquences de ses décisions motivées par le devoir et/ou le désir, ce qui est très parlant dans un monde où les hommes veulent être maître de leur destin... Mais c'est universel, valable autant pour les rois, que pour les aristocrates de l'oligarchie ou les petites gens de la démocratie (sans parler que pour Luc Ferry la démocratie naît à Athènes en -510 et meurt à Athènes en -429 et n'a jamais existé ailleurs dans le temps ou l'espace), donc non seulement Luc Ferry oublie que les sources antiques sont multiples, partielles et partiales, mais en plus il se lance dans un laïus sur la la bonne gouvernance où les élites éclairées par la philosophie n'ont pas besoin d'humanité pour diriger (et Clotilde Bruneau se fait une joie d'expliquer juste en face le sens du mot « laïus » ^^)... Cela fait un peur concernant l'univers mental des élites qui nous gouvernent !
Pour le mythe d'Oedipe en lui-même, il nous explique que les dieux sont garant d'un ordre harmonieux, et qu'un ordre harmonieux nécessitait de châtier cruellement à répétition une famille et un peuple... Alors Laïos est puni pour la mort de Pelops, Oedipe est puni pour la mort de Laïos, Etéocle et Polynice sont punis pour la mort d'Oedipe, Antigone est puni pour la mort d'Etéocle et Polynice, Créon est puni pour la mort d'Antigone (d'ailleurs c'est étrange que le Créon du mythe d'Oedipe soit si différent de celui du mythe de ses épigones)... Pourquoi pas ? Mais dans ce cas le Sphinx puni qui de quoi ? N'est-il qu'un jouet de plus pour les dieux afin de tourmenter les mortels juste pour le fun ??? J'ai une théorie à vous soumettre : dans l'animisme les divinités sont à l'images des forces naturelles, c'est-à-dire puissantes, primordiales, aveugles, mais dans le paganisme les divinités sont à l'images des puissants qui gouvernent, c'est-à-dire orgueilleux, mesquins, cruels... Une fois de plus Je suis bien content d'être athée ! (et en conclusion Luc Ferry est plus proche du TINA reagano-thatchérien que de Dalaï Lama hein)
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