Voici le livre qui recueille l'oeuvre, et pour ainsi dire, la vie complète d'un poète.
La poésie de Cadou me fait l'effet d'être des plus autobiographiques et des plus intuitives qui soient. Dans cette somme extraordinaire de vers composée sur si peu de temps (Cadou est l'éphémère qui ne vit que 31 années), l'urgence de témoigner est pareille à l'urgence de vivre du passereau. Dire la grande parole soufflée dans le vent du pays de Brière. Cadou est sans doute un poète des petites gens (voyez que passent l'artisan, l'écolier de campagne et son maître, le père de famille besogneux, le facteur, le curé...) et des petites choses de la vie de tous les jours. Mais les ramassant tous et toutes dans son chant, il en fait un hymne ample et transcendant. C'est le chant de la Vie, du coeur antédiluvien des hommes dans l'espoir et l'agonie.
L'obsessionnel pressentiment de mort qui traverse ces poèmes est le marqueur de la destinée tragique du poète. En plein, en creux, dans la lumière comme dans les ombres, l'idée en est omniprésente le faisant double de son père chéri et perdu.
En exil d'une société qui ne peut le reconnaître il affronte cette jeunesse de sa mort dans la soupente de sa maison d'école en tissant ligne à ligne son éternité d'encre.
L'appel d'un chien au loin, un train passé, et la grande silhouette marchant d'un Christ pour escorter l'homme redevenu enfant dans sa marche définitive.
Les poèmes en offrande à Hélène qui fut celle à venir, celle qui fut et resta sont l'accomplissement de l'autre destin du poète, destin amoureux et celui-ci pareillement accompli la plume à la main.
Le chant est dit, il résonne et résonnera encore.
Je referme le livre...
Ah ! Que la campagne native me manque !
(Cette édition regroupe également les notes de Cadou sous le titre "Usage interne")
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