Un autre paradoxe des êtres humains, pensa-t-elle. Tordus, le cerveau dérangé. Vous faites du mal à quelqu'un et vous vous sentez obligé ensuite de lui en vouloir, faute de pouvoir arranger les choses, alors que c'est vous qui lui avez fait du tort.
Il voulait avoir tout ce qu'il pouvait désirer, il n'aurait que ce qu'il pouvait avoir.
" La pensée de Layla apporta une petite lueur de bonheur, un peu de chaleur dans la coquille froide de son être; puis le froid revint, la froide conscience qu'il ne devait pas, qu'il ne le ferait pas, la pensée de sa fille, le fils à venir... Il avait prit des engagements et le temps était venu d'agir en homme face à eux. Et ensuite, d'être un homme, peut être un peu desséché en dedans mais qui tenait bon, tenait le coup jusqu'à la fin, son Amy (sa femme) lui sourirait parfois, et n'était ce pas assez? Cela devait être assez. Ce serait assez."
Le temps détruit, se dit-elle. Une chose est là puis elle n'y est plus. Ma mère n'est plus là, ni mon père, ni mon mari. Voilà l'oeuvre du temps. C'est ainsi qu'il agit.
"Tu n'y as jamais pensé? A cet autre monde de l'autre côté? Juste aussi réel que celui-ci, et nous sommes seulement le rêve qu'ils ont de l'autre côté. Nous n'en avons aucun souvenir exact. Ils se réveillent de l'autre côté, et ils se disent : j'ai fait le plus étrange des rêves."
Le 5 juillet, RL et June allèrent à la rivière, s'installèrent sur les rochers avec une bouteille de Johnnie Walker Red et parlèrent de Taylor. Le 5 juillet était le jour de son anniversaire et ils faisaient la même chose tous les ans. Il aurait eu cinquante ans. RL avait été son ami d'enfance et June l'avait épousé. Il était mort onze ans auparavant.