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Critique de clesbibliofeel


C'est une curieuse coïncidence que cette épigraphe de Louis Aragon évoquant l'esprit de ce blog, « clés bibliofeel » cherchant « des clés littéraires » originales et libres : « le roman, c'est la clé des chambres interdites de notre maison ».
Isabelle Carré c'est pour moi une longue histoire, depuis le choc du merveilleux film « Se souvenir des belles choses » (2002), puis cette superbe carrière avec une liste impressionnante de films, de téléfilms et de pièces de théâtre.

Quel merveilleux souvenir de l'avoir vu jouer, placé au premier rang, dans « L'hiver sous la table » de Roland Topor, au théâtre de l'Atelier à Paris en 2004, une sorte de conte drolatique sur le sujet de l'immigration. Isabelle Carré, avec Dominique Pinon lui donnant parfaitement la réplique, montrait là un talent époustouflant, avec naturel et simplicité. C'est une artiste exceptionnelle ayant su construire sa carrière avec de grands réalisateurs et de grands textes, pleinement engagée dans son époque.
Alors forcément, il fallait bien que je lise son roman, même si la publication par un artiste reconnu d'un livre largement autobiographique me laissait quelques doutes sur l'intérêt littéraire. Mais avec Isabelle Carré, rien à craindre, elle arrive à faire vivre les souvenirs et quand la mémoire lui fait défaut, elle sait imaginer les scènes... C'est passionnant car on sent toute l'intensité de ce travail d'écriture, une volonté de mesurer le chemin parcouru par une petite fille perdue dans des histoires de vie trop compliquées pour elle, qui a tenté de se suicider à 14 ans, puis a refait surface à la vie par le théâtre, ensuite a construit une belle famille, moins rêveuse semble-t-il, et autant que possible à l'abri de l'agitation des médias.

Isabelle est née suite à la rencontre par sa mère d'un étudiant des beaux-arts, futur designer de la maison Cardin. Elle raconte qu'elle accompagne « mamie Monique » au marché, place Velpeau... Toute sa famille, côté paternel, est de Tours, de Villandry aussi, avec un « grand père cheminot comme beaucoup d'hommes de la famille. »

Côté maternel ce n'est pas la même musique. Des grands parents aristocrates, revendiquant une ascendance royale avec Marie Stuart, qui accepterons enfin de recevoir leur fille, rejetée dans un premier temps car fille mère ayant refusé d'abandonner l'enfant, dans leur château à tourelles avec mur extérieur, couloirs immenses et multitude de chambres. « Mon frère avait presque 5 ans, j'étais plus jeune d'un an et un jour, comme les objets trouvés. »
Le château des grands parents, comte et comtesse, est impressionnant, un véritable conte de fée selon l'auteur, alors que le futur designer « offre des robes étranges et fantastiques ».

Le contraste entre les familles est saisissant. L'environnement familial d'Isabelle sera « pop-post-soixante-huitard-zen » dans l'appartement rouge (ce devait être dans l'air du temps car à la même époque j'avais repeint ma chambre en orange lumineux).

L'écriture est déroutante car les informations arrivent dans le désordre mais cela figure bien le temps qui passe, les souvenirs douloureux évoqués avec pudeur et retenue et cela permet de découvrir cette vie peu commune.
On comprend mieux après ce beau roman autobiographique pourquoi Isabelle incarne si bien ses personnages et trouve en cela une famille, des repères qu'elle n'a pas eus, entre ses ancêtres illustres et sa famille de prolétaires, avec une mère abandonnée et dépressive, un père découvrant son homosexualité sur le tard.
La force de ce roman est aussi dans la précision des descriptions, la musique et les couleurs de l'époque (tout débute dans les années 60...) qui en fait un objet intéressant et à valeur historique certaine. Et puis cela évoque ces ruptures de classe sociale qui donne quelquefois des destinées exceptionnelles. Je pense à Valeria Bruni Tedeschi au cinéma, voire notre grande George SAND mais ce sera là un prochain article...

blog clesbibliofeel à retrouver C'est une curieuse coïncidence que cette épigraphe de Louis Aragon évoquant l'esprit de ce blog, « clés bibliofeel » cherchant « des clés littéraires » originales et libres : « le roman, c'est la clé des chambres interdites de notre maison ».
Isabelle Carré c'est pour moi une longue histoire, depuis le choc du merveilleux film « Se souvenir des belles choses » (2002), puis cette superbe carrière avec une liste impressionnante de films, de téléfilms et de pièces de théâtre.

Quel merveilleux souvenir de l'avoir vu jouer, placé au premier rang, dans « L'hiver sous la table » de Roland Topor, au théâtre de l'Atelier à Paris en 2004, une sorte de conte drolatique sur le sujet de l'immigration. Isabelle Carré, avec Dominique Pinon lui donnant parfaitement la réplique, montrait là un talent époustouflant, avec naturel et simplicité. C'est une artiste exceptionnelle ayant su construire sa carrière avec de grands réalisateurs et de grands textes, pleinement engagée dans son époque.
Alors forcément, il fallait bien que je lise son roman, même si la publication par un artiste reconnu d'un livre largement autobiographique me laissait quelques doutes sur l'intérêt littéraire. Mais avec Isabelle Carré, rien à craindre, elle arrive à faire vivre les souvenirs et quand la mémoire lui fait défaut, elle sait imaginer les scènes... C'est passionnant car on sent toute l'intensité de ce travail d'écriture, une volonté de mesurer le chemin parcouru par une petite fille perdue dans des histoires de vie trop compliquées pour elle, qui a tenté de se suicider à 14 ans, puis a refait surface à la vie par le théâtre, ensuite a construit une belle famille, moins rêveuse semble-t-il, et autant que possible à l'abri de l'agitation des médias.

Isabelle est née suite à la rencontre par sa mère d'un étudiant des beaux-arts, futur designer de la maison Cardin. Elle raconte qu'elle accompagne « mamie Monique » au marché, place Velpeau... Toute sa famille, côté paternel, est de Tours, de Villandry aussi, avec un « grand père cheminot comme beaucoup d'hommes de la famille. »

Côté maternel ce n'est pas la même musique. Des grands parents aristocrates, revendiquant une ascendance royale avec Marie Stuart, qui accepterons enfin de recevoir leur fille, rejetée dans un premier temps car fille mère ayant refusé d'abandonner l'enfant, dans leur château à tourelles avec mur extérieur, couloirs immenses et multitude de chambres. « Mon frère avait presque 5 ans, j'étais plus jeune d'un an et un jour, comme les objets trouvés. »
Le château des grands parents, comte et comtesse, est impressionnant, un véritable conte de fée selon l'auteur, alors que le futur designer « offre des robes étranges et fantastiques ».

Le contraste entre les familles est saisissant. L'environnement familial d'Isabelle sera « pop-post-soixante-huitard-zen » dans l'appartement rouge (ce devait être dans l'air du temps car à la même époque j'avais repeint ma chambre en orange lumineux).

L'écriture est déroutante car les informations arrivent dans le désordre mais cela figure bien le temps qui passe, les souvenirs douloureux évoqués avec pudeur et retenue et cela permet de découvrir cette vie peu commune.
On comprend mieux après ce beau roman autobiographique pourquoi Isabelle incarne si bien ses personnages et trouve en cela une famille, des repères qu'elle n'a pas eus, entre ses ancêtres illustres et sa famille de prolétaires, avec une mère abandonnée et dépressive, un père découvrant son homosexualité sur le tard.
La force de ce roman est aussi dans la précision des descriptions, la musique et les couleurs de l'époque (tout débute dans les années 60...) qui en fait un objet intéressant et à valeur historique certaine. Et puis cela évoque ces ruptures de classe sociale qui donne quelquefois des destinées exceptionnelles. Je pense à Valeria Bruni Tedeschi au cinéma, voire notre grande George SAND mais ce sera là un prochain article...

Blog avec photo "hommage" _ clesbibliofeel _ avril 2019

Les grands parents cotés maternels seraient Joseph Edouard Henri Marie MORISSON DE LA BASSETIERE et Marie Elisabeth Charlotte D'ANTHOUARD DE VRAINCOURT (geneanet, généalogie Isabelle Carré). le château de la Bassetière est situé en Vendée, occupé depuis un demi-millénaire par les Morrisson de la Bassetière, descendant d'un clan écossais venus en France pour la guerre de cent ans.


Les grands parents cotés maternels seraient Joseph Edouard Henri Marie MORISSON DE LA BASSETIERE et Marie Elisabeth Charlotte D'ANTHOUARD DE VRAINCOURT (geneanet, généalogie Isabelle Carré). le château de la Bassetière est situé en Vendée, occupé depuis un demi-millénaire par les Morrisson de la Bassetière, descendant d'un clan écossais venus en France pour la guerre de cent ans.

Lien : https://clesbibliofeel.blog/
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