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Critique de SZRAMOWO


Une analyse très complète et très bien documentée sur les raisons de l'échec de VGE à se faire élire pour un second mandat le 10 mai 1981.

1974, VGE est élu tambour battant (comme en témoigne le film de Depardon sur sa campagne) et fait de l'élimination de l'état UDR l'un des axes de sa campagne.
Il a su capter la volonté de changement de la société française - 53 % des femmes ont voté pour lui contre 47 % pour Mitterand, de même 55 % des inactifs, 63 % des cadres supérieurs et 70 % des agriculteurs. Des scores que les 52 % de cadres moyens et employés et 67 % d'ouvriers en faveur de Mitterand ne parviennent pas à contrebalancer.

Tous les feux sont au vert pour VGE. Mais voila, il y a un hic qui s'appelle l'UDR et deviendra le RPR…On connait la suite !

Pour l'UDR, VGE est un traitre il y a eu son « oui mais » et « l'exercice solitaire du pouvoir » en 1967, pour qualifier la politique du Général de Gaulle, et l'appel à voter NON au référendum de 1969 qui s'est traduit par le départ du Général.

L'auteur documente très bien l'épisode Chaban, candidat malheureux abandonné par ses compagnons gaullistes. Considéré comme un social-démocrate par Pierre Juillet et Marie-France Garud, les deux stratèges qui poussent Chirac à la trahison et choisissent VGE pour éviter que la droite ne perde. Chirac premier ministre UDR va en baver des ronds de chapeau confronté à VGE et sa clique (Michel Poniatowski et consort) à laquelle il réserve des informations qu'il ne transmet pas à son premier ministre.
On connait la suite, qui a trahi sera trahi…

Les suites de de la démission de Chirac sont ravageuses :
Le 5 décembre 1976, Porte de Versailles, devant 50 000 personnes, « Jacques Chirac se voit triomphalement élu président du RPR avec 96,52 % des suffrages. »
À la société libérale avancée de VGE, il oppose une « démocratie du quotidien » apte à repousser les deux fléaux qui menacent la France : le « collectivisme » et le « renoncement » - Autrement dit, le programme commune la gauche et le giscardisme. »
VGE déclare « Chirac a tout de Perón. » ; Roger Chinaud parle de « national-chiraquisme » et Jean-Pierre Fourcade, « Le Rassemblement c'est Nuremberg. »
La messe est dite !

En 1977, Chirac remet le couvert en se présentant contre Michel d'Ornano, poulain de VGE, à l'élection du maire de Paris.
Au journal de 20 heures de TF1, Chirac déclare « Je viens dans la capitale de la France parce que, dans notre histoire, depuis la révolution de 1789, chaque fois que Paris est tombé, la France a été vaincue. »
Élu en mars, dès le mois de juin, Chirac reçoit Brejnev à la Mairie de Paris à l'occasion d'une visite officielle de ce dernier en France…

Avec la nomination de Raymond Barre, considéré comme un technicien avec tout ce que cela a de péjoratif dans la bouche des politiques, au poste de 1er ministre, les choses ne s'arrangent pas : Les échanges d'amabilité avec ce dernier, présenté comme le meilleur économiste de France par VGE, se font par courrier « Ne dites pas, monsieur le Premier ministre que vous n'êtes pour rien dans la constitution du front anti-RPR » écrit Chirac.

Malgré ces escarmouches permanentes, le soleil brille à nouveau dans le ciel giscardien avec la création de l'UDF en 1978, et contre toute attente le bon maintien de cette fédération de partis et d'associations, aux législatives de 1978. le RPR perd 29 députés et l'UDF en gagne 4. Même si VGE perd son pari de voir l'UDF remporter ces élections, la droite avec 277 députés contre 199 pour la gauche qui pâtit de ses divisions, reste au pouvoir. Et RPR + UDF constituent, malgré les rancoeurs, une majorité présidentielle. Voire !

« Le lundi 13 mars, à la réouverture de la bourse, les valeurs françaises font un bond de 9,06 %, tandis que le Franc regagne entre 1,5 et 3,5 % face aux monnaies étrangères. »

« Le « Programme de Blois » de Raymond Barre a constitué l'assise de la campagne giscardienne. »

Paix armée ou guerre ouverte ? Chacun des protagonistes regarde l'autre en chien de faïence, personne n'osant faire le premier pas vers la rupture. Encore 3 années à patienter…Mais ce qui est sûr, c'est que le RPR revendique être l'acteur principal de la victoire de la droite !
L'élection de Jacques Chaban-Delmas au perchoir sera une couleuvre de plus pour le RPR.

En 1979, la question de l'Europe ravive la guerre Giscard-Chirac, le fameux « Appel de Cochin » lancé par Chirac depuis son lit d'hôpital stigmatisant « le parti de l'étranger », une initiative appuyée et encouragée par les durs du RPR (Juillet, Garaud, Pasqua, Tibéri, Guéna, Devaquet Sanguinetti…)
Yves Guéna écrit « (…) on l'a vu par exemple en 1940. Il y a eu. Un « parti de l'étranger » dans tous les partis. À droite (…) avec Maurras (…) au sein du parti radical avec les « Munichois » (…) qui firent partie du gouvernement Pétain.»
Hélas, l'UDF remporte haut la main les élections européennes, leur liste menée par Simone Veil remporte 26 % des suffrages, celle du RPR 16 %. C'est la fin des illusions, le départ du couple Juillet Garaud et l'entrée, dans l'entourage immédiat de Chirac, des jeunes du RPR (Juppé, Toubon(, accompagnés des anciens Pasqua et Balladur.

Mais c'est du côté de l'économie que vient la menace. Pour faire face à l'enchérissement du prix du pétrole, la diplomatie française joue un double jeu qui se retournera contre le pays, négociation d'un prix raisonné du baril avec le Shah d'Iran et accueil de l'Ayatollah Khomeyni à Neauphles le Château…
C'est dans ce contexte que vont se mettre en place les prémices du scandale des avions renifleurs qui éclatera avant la campagne présidentielle de 1981.
Le RPR est à la manoeuvre pour fustiger la politique de Raymond Barre, relayé par l'opinion dans des manifestations où un slogan populaire moque la succession des plans Barre : Barre 1, Barre 2, barres toi !

Raymond Barre est obligé de dégainer 4 fois le 49.3 pour parvenir à faire voter le budget 1980.
Charles Pasqua porte un diagnostic sévère sur le docteur Barre « L'opération a réussi mais le malade est mort. »

Au sein du gouvernement, le meilleur économiste de France est contesté par Robert Boulin, un gaulliste sociale dont les avertissements sur les effets néfastes de la politique d'austérité ont de plus en plus l'oreille de VGE.
Ce dernier ne franchira jamais le pas et Barre restera 1er ministre jusqu'en 1981…

VGE louvoie et s'éloigne de plus en plus des promesses de 1974, abolition de la peine de mort repoussée, loi sécurité et liberté poussée par Alain Peyrefitte.
Parallèlement les affaires « Broglie, Boulin, Bokassa et Copernic (minent) la fin de régime » sans compter « les virées nocturnes du nouveau président » ; ni « les chasses fastueuses en Sologne ou en forêt de Rambouillet. »

Le président sortant annonce sa candidature à la télévision, le 2 mars 1981 aux côtés de son épouse Anne-Aymone « Je ne serai pas un Président-candidat, mais un citoyen-candidat. »
Très vite sa campagne patine, il refuse de la faire sous la bannière UDF. le soutien de la Pravda à VGE dans le contexte de l'invasion de l'Afghanistan ne joue pas en sa faveur. Son bilan, avec la hausse du chômage n'est guère vendable. VGE croit en la pertinence de ses analyses qu'il a développées dans « Démocratie Française », mais comment incarner le changement après ces 7 années passées à l'Élysée ?


L'attitude ambigue du RPR face au PS, l'abandon du Programme commun au profit des 110 propositions du candidat Mitterand, la dispersion des lectorats entre VGE, Mitterand, Chirac et Marchais fait qu'au soir du 1er tour, le 26 avril 1981, la défait est prévisible, Charles Pasqua n'avait-il pas déclaré«  « Si en avril, au premier tour, nous nous retrouvons dans le schéma Giscrad/Mitterand, Giscard sera battu : il aura contre lui au deuxième tour 70 % des voix communistes et 25 % des voix de Jacques Chirac. de toute façon, la solution est entre nos mains. »

Un livre passionnant !
S'il traite d'une élection qui a déjà 40 ans, il montre de façon éclairée que les fractures actuelles au sein des partis politiques et dans l'électorat trouvent en partie leurs origines dans cette guerre fratricide des droites depuis 1974 et l'opposition Chirac/Giscard.
Je l'ai d'autant plus apprécié qu'il traite d'une époque où j'ai voté pour la 1ère fois aux présidentielles de 1974.

Les dernières pages proposent une chronologie détaillée, une bibliographie impressionnante, et un index des noms fort utile.
Une somme et une référence.
Merci Pierre-Frédéric Charpentier. Merci Masse Critique et les éditions du Félin.
Lien : https://camalonga.wordpress...
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