Prédateurs

Son être avait boité une bonne partie de sa vie à cause de lui. Maintenant elle devait se redresser.

Lorsque le sang coule, c'est la vie à l'état pur qui se disperse.

Mlle Dawson, vous n’avez jamais vu une sentinelle se faire couper la gorge, enchaîna-t-il sombrement. L’homme panique dans ces cas-là, la terreur le déchire tout autant que le fer qui s’enfonce dans sa chair et sectionne peau, muscles, veines, artères, cordes vocales. Le sang se met à dégouliner à l’intérieur, dans la trachée, et à l’extérieur. L’homme ressent autant de douleur que de terreur à la découverte de ce chemin de mort qui le tranche en deux. Personne dans un cas comme celui-là ne penserait à laisser un indice pour démasquer son assaillant. Croyez-moi, personne. Sauf dans les romans. En vrai, il n’y a que gargouillis, souffrance et peur incommensurable.

Mais comment des milliers d'Hommes pouvaient-ils s'acharner à se massacrer sans l'ombre d'une rancœur et sans même se connaitre ?

C'est la peur qui permet à une espèce aussi dominante et puissante de vivre en communauté. La peur des prédateurs extérieurs nous oblige à nous entraider depuis l'aube de la civilisation, la peur de l'autre. Faites-la disparaître et l'homme retourne à son premier instinct : satisfaire ses désirs.

Le sang s'écoulait en rigoles vers le ressac jusqu'à former un long ruban colorant les premiers mètres de littoral, sans cesse repoussé par les vagues, comme si la mer elle-même refusait de porter le poids de cette haine.

Lorsque le sang coule, c'est la vie à l'état pur qui se disperse, il est la semence de l'âme, et chaque goutte brille comme l'étendard de l'existence.

L’être humain pouvait s’habituer à tout. Le pire demeurait dans la chair comme dans l’âme, non plus comme un souvenir, avec le temps, mais comme une réelle altération de la personnalité. (p.406)

Le Mal n’est pas un état qui s’installe, non, je crois que tout homme est neutre, parcouru d’élans de bonté et parfois transpercé par des pulsions maléfiques. (p.565)

Lorsque le sang coule, c’est la vie à l’état pur qui se disperse, il est la semence de l’âme, et chaque goutte brille comme l’étendard de l’existence.