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Critique de kielosa


Ce n'est qu'un an avant sa mort , en 2016 à l'âge de 89 ans, que Madeleine Chaumat a finalement marqué son accord pour la publication de ses notes relatives à son enfer lors de la Guerre d'Algérie. Des notes plus spécifiquement sur la torture et l'incarcération dans des conditions terribles dont elle a fait l'objet pendant 2 ans et qu'elle avait écrit pour tenter d'expliquer à ses médecins successifs les origines de ses maux et de comprendre ce qu'elle a appelé sa "tombée dans le bleu, hors de mon corps - décorporée".

C'est Georges Chich, écrivain et poète de l'agglomération lyonnaise et auteur, avec Sylvie Sauvageon, de "L'Usine", qui a pris cette publication sur lui et en a préparé une belle introduction. Et c'est encore lui qui en a assuré une adaptation théâtrale, car il y a des poèmes d'Anna Greki, l'amie de Madeleine Chaumat dans sa prison à Alger, qui se prêtent parfaitement à une lecture publique.

La villa Sésini (ou Susini), un superbe bâtiment de la fin du XIXe siècle en style neo-mauresque dans les hauteurs d'Alger, a été l'endroit où l'auteure a subi les pires tortures de la part de soldats français. Soi-disant pour connaître le nom du destinataire des tracts en faveur du FLN qu'elle trimbalait sur son scooter ou tout simplement pour créer un climat de terreur. Va savoir ?

Je ne vais pas spécifier ces tortures et sévices inhumains, pour des raisons évidentes et qui auront continué à torturer cette pauvre dame dans des cauchemars atroces pendant plus d'un demi-siècle, malgré un suivi médical approprié, une grande sérénité et beaucoup de courage. Son récit bref et formulé avec une économie de mots, n'en demeure pas moins très dur et s'adresse donc à un public averti.

Originaire d'un petit village dans la Drôme, Madeleine Chaumat est partie au début des années cinquante, à l'âge de 25 ans, pour l'Algérie, où elle a travaillé comme simple employée à la Caisse d'allocations familiales d'Alger. Probablement poussé par une sorte de sympathie juvénile pour "l'underdog", elle a accepté de petites missions de courrier pour les rebelles qui lui ont coûté épouvantablement cher.

Un sort analogue a connu Louisette Ighilahriz, née en 1936 au Maroc, et devenue active dans les rangs du FLN (Front de libération nationale) à Alger. C'est la grande journaliste de guerre, Anne Nivat, qui a recueilli son témoignage dans un ouvrage intitulé "Algérienne" de 2001.

L'ingénieur à la retraite Henri Pouillot, né en 1938 en Sologne, a été appelé en Algérie et affecté de juin 1961 à mars 1962 à la villa Sésini. Comme militant des droits de l'homme, il a écrit 2 ouvrages : "La villa Susini" en 2001 et "Mon combat contre la torture" en 2004. En témoignant des pratiques de la torture, il veut "dénoncer le révisionnisme autour de la Guerre d'Algérie", qui met en cause les valeurs républicaines de la France à l'occasion des "honneurs" rendus aux activistes de l'OAS (Organisation de l'armée secrète) et soutenu par "la connivence d'une partie de la droite".

Finalement, il y a l'ouvrage qui a fait sensation en 2001 du général Paul Aussaresses (1918-2013) : "Services spéciaux. Algérie, 1955-1957. Mon témoignage sur la torture" et que j'ai lu peu après sa sortie. Ce qui n'est pas le cas de son "Je n'ai pas tout dit : Ultimes révélations au service de la France" de 2008.

Quoique le sujet ne soit pas la torture et les traitements inhumains, un livre qui recrée bien le climat violent de 1957 à 1962, est le témoignage d'Agnès Bastien-Thiry "Mon père, le dernier des fusillés" de 2005. Son père, le lieutenant-colonel Jean Bastien-Thiry fut effectivement fusillé le 1er mars 1963 à fort d'Ivry comme organisateur de l'attentat du Petit-Clamart, le 22 août 1962, contre le général De Gaulle.

Paul Ausssaresses a déclaré avoir rencontré Jean-Marie le Pen à la villa du feu notaire Sésini pendant ces années de troubles, mais je ne crois pas que ce soit pour cette raison qu'il vient d'être déchu de son titre de président d'honneur du FN. Ce sont des choses qui arrivent même dans les meilleures familles !

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