"L'orang-outan était le subtil rouage. Il faisait la roue dans les arbres et toutes nos trajectoires individuelles s'en trouvaient heureusement modifiées. Le globe accomplissait même deux ou trois révolutions consécutives à contresens. Ainsi de loin reconnaissait-on notre planète entre toutes ; désormais, c'est un boeuf qui la traîne, elle ne sortira plus de son ornière."
Vous sentez déjà comme tout change, comme tout a changé ? Le bonheur ne tient plus à rien, il est tout entier hors de nous, dans les choses extérieures, impossible de l’avaler, de le boire, de l’absorber, afin qu’il coule en soi, qu’il se mélange à l’amalgame, qu’il soit la main plutôt que l’objet fragile et anguleux dedans, qui va choir et se casser ; l’espérance qui fut pâle et craintive, voilà qu’elle a le visage exophtalmique et cramoisi de la convoitise. Et voyez quand j’ouvre la bouche quels tristes coucous en sortent aujourd’hui.
Il ne parut pas concerné en nous voyant paraître, chargés de tout notre équipement. Nous aurions pu aussi bien ne transporter que des vitres. Un bateau, il n'en avait pas usage. Chapeau ni bottes non plus. Couteau, pour quoi faire? Boussole, inutile. Veux pas de ce vélo. Ton fusil, tu peux le garder. Chewing-gum, no thanks. Eteins-moi ça (lampe et radio) ! Merci de déplacer ta voiture, elle gêne. Hep ! tu oublies ton briquet ! Ainsi toutes nos épiceries, pharmacies, quincailleries ouvertes dans sa jungle firent faillite dans la semaine.
N'était-il pas pourtant, en l'absence de dieux et de Martiens avérés, notre seul public (...) ?