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Citations sur Substance (49)

Notre pensée obéit aux lois d'un chronomètre spécial qui, si elles s'appliquaient à notre corps, nous permettraient de bâtir une cathédrale en un clin d'oeil, même s'il va de soi que ladite cathédrale ne ressemblerait en rien à une cathédrale, n'en aurait que la monstruosité.
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Les gifles qu’on ne reçoit pas font parfois plus de mal que celles qui rougissent nos joues. Je sentis la Tante à la Rigueur Modulable se crisper, refouler ce que je pris pour des larmes, et l’instant d’après elle me serrait contre elle, ou plutôt contre la robe chasuble qu’elle portait quasi en permanence, comme si elle voulait étouffer au plus vite ses velléités de Médée de l’Aube.
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J’avais, je le précise, cinq ans, l’âge où philosopher empêche de penser. La Tante passa sa langue prédatrice sur ses lèvres, puis, inquiète à l’idée que je puisse voir dans cette manœuvre un prélude à la dévoration, augmenta le voltage de son sourire, mais, peu convaincue par ce subterfuge dont elle perçut forcément la portée menaçante, choisit alors d’écarquiller les yeux, ce qu’elle fit si violemment que sa perruque manqua verser sur son front. Je pris un deuxième biscuit, sans doute pour oublier le premier, lequel commençait à coller à mon arrière-palais.
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Ce phénomène prouvait si besoin était que je n’étais qu’un pantin, ou plutôt un automate, assujetti à la voix de celle qui me gouvernait, par laquelle très certainement je souhaitais être gouverné. Mais, à la différence des pantins, ou des automates, je bénéficiais paraît-il de ce petit miracle païen qu’est le libre arbitre, auquel je préférais d’ailleurs m’abstenir de recourir, tant la docilité est délicieuse, et pour tout dire lénifiante.
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Il y avait autre chose d’inquiétant dans les rêves que je faisais. Les personnes qu’il m’arrivait de provoquer, ou avec lesquelles je pactisais, levais le coude, me battais, selon des modalités n’ayant guère de ligatures logiques, semblaient appartenir à une même communauté, je veux dire par là que si je devais me fier à mon instinct – celui du rêve, qui seul connaissait les rouages de cette parade affreuse – il était clair que tous les protagonistes de mes rêves étaient, de façon assez paradoxale, morts.
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La nuit, la nuit m’inventait ivrogne, le rêve m’écartelait adulte, et au petit jour sa musique niaise me trouvait honteux à demi hébété dans un nid de peluches qu’un instant plus tôt, encore assoupi, j’aurais sans émoi mais non sans joie éborgnées pénétrées, pourquoi cette scission.
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Ces rêves me laissaient moralement exsangue – un blanc de seiche, ni à prendre ni à laisser. Au réveil, j’avais le sentiment d’être un adulte auquel on a jeté un sort et qui doit composer avec une forme d’emprunt, se satisfaire d’une amnésie partielle, ressasser des visions puissantes tout en s’accoutumant d’une existence atrophiée, enfant forcé.
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Je veux dire qu’en rêve tout en moi était adulte, mon corps, mes pensées, mes réactions, les activités auxquelles je me livrais et jusqu’aux forfaits que je commettais. À peine assoupi, un adulte en moi m’occupait tout entier, il chassait pour ainsi dire d’une taloche définitive l’enfant que j’aurais dû continuer d’être même dans les situations les plus extravagantes, pour se substituer à lui et m’obliger à vivre des expériences d’autant plus incompréhensibles qu’aux codes viciés du rêve elles mêlaient, ceux, encore plus abscons, de la maturité.
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Il n’y avait, selon la Tante, rien de plus noble et de plus gratifiant que de donner à manger, que de combler de saveurs un palais, qu’il soit gardé par une dentition à mille carats ou bée aux quatre vents tel un soupirail rongé, rien de plus enivrant que d’étoffer un ventre, de le tapisser de graisses protectrices, c’était le don à l’état pur, mieux, le don du don, une façon d’entrouvrir son corps idéel et de le transmuer en pâtés lorrains, en fondants aux asperges, de tirer de la corne d’abondance du soi mal rassasié des richesses susceptibles de redorer jusqu’à la moindre cellule .
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Tous les ventres n’ont pas la même forme. Certains sont des cavernes, d’autres des réduits. Il en est qui grondent et bavent comme des dogues, d’autres qui suintent et sifflent comme des orvets cherchant la pluie. (Dans ma tête, le dogue et l’orvet se dévisagent sur fond de langage – ils font presque fable.) Oublie jusqu’au sens de faim, d’appétit. (J’oubliais, voulais oublier.) Je t’ai recueilli quand tu avais tout juste trois ans, fallait-il que j’emplisse ta bouche de boue ? de cailloux ? de gentils petits détritus ? de grains de quoi ? de bouts de qui ? Qu’aurais-tu dit et pensé et senti et cru et compris et voulu et fait si je t’avais lancé une hostie et laissé l’attraper, ou ne pas l’attraper, advienne que pourra ?
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