AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Paris insolite (24)

Une fois de plus, il s'agit de passer quatre, cinq mois d'hiver à l'intérieur de Paris, l'immense caravansérail des désespoirs et des miracles quotidiens, d'y trouver chaque jour de quoi manger et boire son content, le substantiel, et chaque nuit un asile tranquille, au sans-souci, tout en y menant bien sur vie joyeuse et pleine.
Et je rigole parce que pour le flic qui réglemente la circulation, je suis un vagabond qui rentre au port, la gueule râpeuse, les épaules voutées, la canadienne crasseuse, la musette vide, et une récente levée d'écrou en poche..
Et je vais y écrire un livre!

(…)


Parvenu au Pont Neuf, peu importe l'heure tardive, je suis chez moi, au cœur de mes appartements, je m'assieds sur un divan de pierre, je fume une cigarette. C'est le départ d'un nouveau voyage, tout aussi fructueux et excitant, dans les dédales de la capitale de tous temps mystérieuse, dans les bas-fonds, sous les toits, le Paris interdit au public, le Paris à l'envers.
Commenter  J’apprécie          130
Une des principales attirances de l'affamé est celle des menus crochés à la vitre des restaurants, qui le captent, de loin, de l'autre côté de la rue, l'aimantent, le rivent oculairement à leur lecture lente et qui sont de véritables poèmes, poésie pure, vivante, charnelle, les vocables et expressions ne parlant plus à l'âme mais à l'estomac, leur rythme ne contractant plus la matière grise mais la moelle épinière et les sucs gastriques, et dont la répétition à voix haute n'est plus tonalité illusoire mais fluidité salivante et humectante.
Commenter  J’apprécie          40
Mais quand on a choisi sciemment ce genre d’existence, ce modus vivendi, qu’on a dit merde une bonne fois pour toute à l’avenir, qu’on a refusé de prendre une assurance vieillesse (avec auparavant un boulot à la chaîne, semaine de quarante-huit heures plus la vaisselle et le bricolage de rabiot, distractions dominicales et familiales, rides précoces et rien vu du monde que le mur d’en face et de filles que celles de la concierge, et après la retraite, logement deux-pièces, dans nos meubles à nous, belote tremblotante et pue du bec avant qu’on t’enterre toi et la vie que tu as failli avoir, veau mort-né) évidemment on n’a guère le droit de gueuler contre la faim, c’est le jeu, et à chaque fois que ça m’arrive, je la boucle, je tais mes commentaires, j’évite la compagnie des bien nourris, je rejoins les copains qui savent à quoi s’en tenir et qui eux aussi parlent d’autre chose.
Commenter  J’apprécie          190
"Drame de la Cour des Miracles à Boulogne-Billancourt. - Après une nuit d'orgie en compagnie de Jésus-Christ, un chiffonnier est tué à coup de masse."
Puis le lendemain : "Au petit jour, Brutus, la terreur des biffins, a fait d'une voix calme le récit de son crime."
C'est par souci de vérité que j'indique des références noir sur blanc et si je recours à des coupures de presse, c'est que malheureusement je n'étais jamais là à l'heure du crime.
Commenter  J’apprécie          50
On ne voit là que l'habituel spectacle des bistrots de dernière catégorie. Mais des bigornes remarquables par l'ampleur des injures et de la verrerie brisée, et quelquefois une femme torchant son momignard qui a le vilain chié clair dans ses langes.
Commenter  J’apprécie          60
L'homme trimbale sa fortune éphémère, bric-à-brac hétéroclite (...), le tout en pièces détachées mais suffisant à une existence précaire et surtout extérieure.
Commenter  J’apprécie          10
Si tu veux de la misère, me dit la Bouscaille, bouge pas, tu vas bientôt être heureux. On y cavale, au chagrin.
Commenter  J’apprécie          30
Rien n’est plus épouvantable que le repêchage en Seine de cadavres qui s’en vont à vau-l’eau couler des jours meilleurs dans un autre univers, gosses maltraités et incompris, filles engrossées et abandonnées, chômeurs inadaptables, follingues obsédés, tous ces types de roman-feuilleton qui ont la vogue des lectures populaires et dont le spectacle cramponne les badauds comme des insectes scatophiles sur des merdes neuves. Les pompiers ceinturés et casqués comme au-devant d’un cataclysme citadin battent doucement la flotte, tâtent le fond avec des perches, trempent et promènent des grappins, ancres à quatre pointes, horribles instruments de torture qui vous hérissent l’épiderme à leur seule vue, vous font souhaiter que les crochets ne se plantent pas dans la chair tuméfiée et ne la crèvent comme une baudruche. Les riverains depuis des heures guettent le moment où la masse blanche et molle montera vers la lumière, sera attachée par des cordes le long du bateau et traînée comme ça, flottant la tête haute, le ventre bombé faisant péter les derniers lambeaux du linge de corps, monstre marin asexué et terrifiant dont l’odeur pressentie est dégueulante… Mais il n’y a que cinq baraques de secours le long de la Seine, pour sept sur le canal. Et c’est bien compréhensible. Le nombre des suicides entre la Râpée et les Moulins de Pantin est bien plus élevé que dans la partie touristique du fleuve. Le décor est là pousse-au-crime.
Le Grand Canal est le plus horrible décor de la ville.
Commenter  J’apprécie          40
Je pourrais obliquer vers la droite ou vers la gauche, retrouver ce qui reste de la zone, y chercher dès ce soir un gîte dans les communautés de villas en tôle ondulée des chiffonniers, ou faire le grand tour de la capitale comme les relégués interdits de séjour qui campent à Gennevilliers, à la lisière du département, et rôdent aux abords des boulevards extérieurs, n’osant se décider à pénétrer dans le labyrinthe dangereux des couloirs macadamisés, je pourrais aller m’installer en honnête compagnie dans les carrières de Montreuil ou tant d’autres abris de la proche banlieue. Mais je ne peux résister à l’envie de remonter tout de suite l’avenue d’Italie, de marcher plus vite vers les quartiers vivants, malgré les interminables boulevards vides, la traversée de Paris étant plus longue que celle d’un département. je ne jette qu’un bref coup d’œil vers les bistrots-tabac, je lorgne en vitesse les autobus, les platanes, les pissotières, je hume tout surpris l’odeur de l’essence et de la grosse bête citadine. Je me hâte. Tant pis pour ce soir. Encore une fois, je la sauterai. Mais j’ai trop envie de voir la gueule d’un copain, de connaître l’indicible plaisir naïf d’entrer dans un café familier, de serrer des mains, de dire du ton le plus tranquille : « Comment vas-tu ? », de jouer à l’innocent personnage qu’une absence d’un an ou deux laisse indifférent et qui se remet à sa belote comme à une partie interrompue la veille. Plaisir fugace d’ailleurs, car dix minutes après je raconte ma vie, deux heures après tout le monde sait par quels aventureux avatars j’ai réalisé le tour de force quotidien de la vie, et on en redemande, et je suis tout prêt à recommencer mon récit, car les plus sérieux des auditeurs ont droit aux détails, à la récolte des expériences accumulées, jamais inutiles, sur le vagabondage. Les bistrots sont faits pour ça.
Commenter  J’apprécie          10
...et je refuse de parler des plus malins, (...), escrocs légaux qui promettent la fortune, ou le retour de l'infidèle, ou la remonte des seins contre trois timbres, comme cette immonde vermine à gueule de fœtus abyssal rencontrée par hasard ...
Commenter  J’apprécie          41






    Lecteurs (137) Voir plus



    Quiz Voir plus

    QUIZ LIBRE (titres à compléter)

    John Irving : "Liberté pour les ......................"

    ours
    buveurs d'eau

    12 questions
    288 lecteurs ont répondu
    Thèmes : roman , littérature , témoignageCréer un quiz sur ce livre

    {* *}